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Le Figaro du 15 mars 2021
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lundi 15 mars 2021 LE FIGARO - N° 23 814 - www.lefigaro.fr - France métropolitaine uniquement
Dernière édition
lefigaro.fr « Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais
PIERRE NORA
FIGARO SANTÉ
LE PARCOURS PASSIONNANT LE CANCER DEVIENDRA-T-IL D’UN DES PILIERS DE UNE MALADIE CHRONIQUE COMME L’INTELLIGENTSIA FRANÇAISE PAGE 16 LES AUTRES ? NOTRE SUPPLÉMENT
Joe Biden reprend l’offensive face à la Chine
RECONFINEMENT Des jours décisifs pour l’exécutif PAGE 5
ALLEMAGNE
La CDU d’Angela Merkel sanctionnée dans les urnes
Le président américain défie Pékin sur le terrain de la diplomatie vaccinale, en lançant une initiative avec ses alliés de la région indo-pacifique pour produire un milliard de doses d’ici à 2022.
PAGE 7
JUSTICE
À Aix-enProvence, magistrats et avocats sont en guerre
Cette initiative commune a été décidée vendredi, au cours d’un sommet virtuel avec l’Inde, le Japon, l’Australie et les États-Unis, rassemblés au sein de l’alliance informelle
PAGE 13
Pourquoi le XV de France a encore échoué en Angleterre
CONJONCTURE
Le plan de relance américain va doper la reprise mondiale La francophonie gagne-t-elle du terrain ? Les cinq sens à l’épreuve du Covid : l’ouïe, par Martin Steffens La tribune de Gérald Darmanin en réponse aux Églises chrétiennes La chronique de Nicolas Baverez La tribune de Frédéric Rouvillois n
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PAGES 17 À 19
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FIGARO OUI FIGARO NON
Réponses à la question de samedi : AstraZeneca : faut-il, selon vous, suspendre par précaution la vaccination ?
NON 56 %
TOTAL DE VOTANTS : 159 434
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Votez aujourd’hui sur lefigaro.fr Un reconfinement de l’Île-de-France vous paraît-il inévitable ? FABIEN CLAIREFOND-FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO
Une proposition de loi pour « donner le droit à une fin de vie libre et choisie », débattue le 8 avril à l’Assemblée nationale, a déjà reçu le soutien de la présidente LREM de la commission des lois à l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. Un autre texte en faveur d’une « aide médicalisée active à mourir », déposé par le député de la majorité Jean-Louis Touraine, a été cosigné par 164 élus LREM. Le gouvernement s’interroge sur l’opportunité de discuter de ce sujet sociétal très sensible en peine crise sanitaire. PAGE 8
POOL/REUTERS
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La majorité pousse une loi sur la légalisation de l’euthanasie
La cérémonie, diffusée vendredi soir sur Canal+, a atteint des sommets d’indécence et de vulgarité. Politisée à l’extrême, soumise à la culture woke, elle donne une vision pathétique et grotesque du septième art en France. PAGES 38 ET 39
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Autre
orientale, les pays concernés restent sur leurs gardes pour tirer leur épingle du jeu et ne pas se retrouver prisonniers d’une nouvelle guerre froide entre Pékin et Washington.
ÉDITORIAL par Bertrand de Saint Vincent [email protected]
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Cinema inferno
n an, ou presque, que les films français et étrangers ont déserté le grand écran. On guettait les César avec une lueur d’espoir. Certes, la cérémonie nous a habitués à des scénarios catastrophes ; celui de l’an dernier, avec chasse à l’homme et invitation au classement des invités par couleur de peau, atteignait des sommets. Cette année, une occasion unique était offerte de renouer avec la grâce. Du glamour, du charme, une touche d’humour, et la France entière se serait levée pour la réouverture de ses salles. Le cinéma, c’est du rêve. Las, lorsqu’on a ouvert les yeux, le cauchemar était toujours là. En robe Chanel, en chemise de nuit ou dans le plus simple appareil, les damnés de la terre semblaient s’être donné rendez-vous à l’Olympia. Pendant plus de trois heures, des intermittents aux migrants, des pesticides à l’islamo-gauchisme, d’Adama Traoré à George Floyd, on applaudit à peu près toutes les causes, à l’exception de celle du septième art. On se serait cru à un meeting de bobos gauchistes ; ne manquaient que les black blocs. Mais il est vrai que pour détruire la vitrine du cinéma français les comédiens présents sur scène n’avaient besoin de personne.
Toutes les interventions allaient dans le même sens - les autres sont interdits : celui d’une mise en cause de la politique gouvernementale, des méfaits du capitalisme, de la domination blanche. Reléguée en coulisses, Roselyne Bachelot, telle Marie-Antoinette, attendait sa décapitation. À de rares exceptions près - Catherine Ringer interprétant Bécaud, une jeune espoir se disant « honorée », Sami Bouajila évoquant son père -, seuls les morts auxquels fut rendu hommage inspiraient le respect. À l’issue de la soirée, les César avaient atteint leur objectif : faire fuir les téléspectateurs, déchaîner les critiques sur les réseaux sociaux, donner envie de regarder de vieux films sur Netflix. Sur les ruines encore fumantes de ce champ de bataille, on chercha, en vain, une voix autorisée capable de s’élever contre cette parodie mortelle. Il n’y eut personne. On a beau savoir qu’au cinéma les héros sont de fiction, ce silence apeuré résonne comme un coup de feu.
Les damnés de la terre semblaient s’être donné rendez-vous
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CHAMPS LIBRES
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plus largement un premier coup d’arrêt aux ambitions régionales chinoises, notamment en matière maritime. Néanmoins, dans cette bataille du vaccin qui fait rage en Asie
César 2021 : une image accablante du cinéma français
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Demain
aux pays pauvres, pour contrer les ambitions de son rival chinois. Les États-Unis et les démocraties de la zone indo-pacifique espèrent que leur plan parviendra à donner
è NEW DELHI DÉPLOIE SA DIPLOMATIE DU VACCIN AFIN DE TENIR TÊTE À PÉKIN è PÉKIN OU WASHINGTON ? LES PAYS ASIATIQUES REFUSENT DE CHOISIR è LE JAPON, PREMIÈRE DIGUE DE L’AMÉRIQUE FACE À LA CHINE PAGES 2 ET 4
RUGBY
OUI 44 %
Quad. Elle prévoit notamment que le milliard de vaccins promis soit produit en Inde. New Delhi entend ainsi s’imposer comme un fournisseur incontournable de doses destinées
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
L'ÉVÉNEMENT
Le plan de Biden pour freiner les ambitions de la Chine
TOM BRENNER/REUTERS
Le président américain a décidé de donner un coup d’arrêt aux menées régionales de Pékin en investissant le terrain de la distribution des vaccins.
Notre objectif est de nous assurer que nous avons les capacités, les plans et les concepts opérationnels pour pouvoir opposer une dissuasion crédible à la Chine ou à quiconque voudrait s’en prendre aux États-Unis
»
LLOYD AUSTIN, CHEF DU PENTAGONE
Vendredi, lors d’une conférence virtuelle, Joe Biden, à la MaisonBlanche, et ses alliés japonais, indien et australien, ont décidé de « lancer un effort ambitieux pour aider à mettre fin au Covid-19 ». TOM BRENNER/REUTERS
ADRIEN JAULMES £@AdrienJaulmes CORRESPONDANT À WASHINGTON
L’ADMINISTRATION Biden lance son premier défi à la Chine sur le terrain de la diplomatie vaccinale. En annonçant vendredi un ambitieux programme de production et de distribution d’un milliard de vaccins contre le Covid dans la région Indo-Pacifique en coopération avec l’Inde, le Japon et l’Australie, le nouveau président américain a choisi de contrer avec ses propres armes les ambitions régionales de Pékin, qui a fait de la distribution de vaccins l’une des branches de sa politique d’influence à l’étranger. Ce plan a été lancé au cours d’un sommet multilatéral rassemblant les principaux alliés de Washington dans cette partie du monde : l’Inde, le Japon et l’Australie. Réunis dans le Dialogue quadrilatéral sur la sécurité, connu aussi sous son surnom abrégé de Quad, ces pays ont aussi en commun d’être préoccupés par les ambitions régionales chinoises, notamment en matière maritime. Tenue par vidéo, cette conférence rassemblait, outre le président américain, Narendra Modi, le premier ministre indien, et ses homologues japonais et australien, Yoshihide Suga et Scott Morrison. « Nous lançons un effort ambitieux pour aider à mettre fin au Covid19 », ont annoncé les quatre chefs de gouvernement dans une tribune publiée simultanément à la conférence. « Ensemble, nous nous enga-
geons à développer et à accélérer la production de vaccins sûrs, accessibles et efficaces. Nous nous associerons à chaque étape pour faire en sorte que les vaccins soient administrés dans toute la région indo-pacifique jusqu’en 2022. » Cette conférence virtuelle était le premier sommet multilatéral de Joe Biden depuis sa prise de fonction. Formé au lendemain du tsunami de 2004 pour coordonner l’aide aux victimes de cette catastrophe régionale, le Quad n’est pas une alliance aussi structurée que l’Otan. Mais son rôle informel est devenu au fil du temps un contrepoids à la politique expansionniste de la Chine en Asie, et l’organisation est régulièrement dénoncée par Pékin comme un bloc antichinois.
Un défi sans ambiguïté Dans la nouvelle guerre froide qui oppose Washington à Pékin, ce plan vaccinal présente des similitudes avec le plan Marshall d’aide à la reconstruction de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale. Mais au lieu d’être unilatérale, cette initiative s’appuie sur les capacités de chacun des partenaires. Les États-Unis fournissent une partie du financement, mais surtout leur expertise en matière vaccinale, en mettant à disposition les brevets développés par leurs laboratoires pharmaceutiques. En particulier le dernier à avoir été approuvé, le vaccin unidose de Johnson & Johnson, logistiquement plus facile à administrer et déjà en cours de déploiement dans des pays émergents comme l’Afrique du Sud.
POOL/REUTERS
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C’est une occasion importante pour nous d’exposer en termes très francs les nombreuses préoccupations que nous avons
»
ANTONY BLINKEN, SECRÉTAIRE D’ÉTAT AMÉRICAIN, ÉVOQUANT SON PROCHAIN CONTACT AVEC LES HAUTS RESPONSABLES DE LA DIPLOMATIE CHINOIS JEUDI, À ANCHORAGE (ALASKA)
La puissante industrie pharmaceutique indienne sera chargée de la production massive des doses de vaccins. Les usines indiennes devraient ainsi fournir un milliard de doses supplémentaires de vaccins d’ici à la fin 2022, en s’appuyant sur ce que Modi a appelé la « formidable capacité de production de vaccins » de son pays. Le Japon contribuera au financement de cette production, mais aussi à « la chaîne du froid », c’està-dire les installations de congélation nécessaires au stockage des vaccins. L’Australie doit consacrer 77 milliards à la distribution du vaccin, en particulier pour les 19 nations insulaires du Pacifique qui ont des liaisons de transport avec elle et des relations étroites avec l’armée australienne. Après avoir laissé pendant l’année écoulée Pékin mener une diplomatie agressive, où ses ambassadeurs, surnommés les « loups combattants », ont fait valoir les succès de la Chine dans la gestion de la pandémie, tout en niant toute responsabilité dans son déclenchement, les démocraties de la région donnent ainsi le premier coup d’arrêt aux menées de Pékin. Si la Chine n’a pas été évoquée au cours de la conférence, les partenaires du Quad lui ont néanmoins lancé un défi sans ambiguïté en évoquant leur vision commune « d’une région indo-pacifique libre, ouverte, résiliente et inclusive… accessible et dynamique, régie par le droit international et des principes fondamentaux tels que la liberté de navigation et le règlement pacifique
des différends, et où tous les pays sont en mesure de faire leurs propres choix politiques, à l’abri de toute coercition ». « Ces dernières années, cette vision a été de plus en plus mise à l’épreuve, ont insisté les chefs de gouvernement. Ces épreuves n’ont fait que renforcer notre détermination à faire face ensemble aux défis mondiaux les plus urgents. » Ce coup de semonce diplomatique précède de quelques jours les tournées en Asie des deux plus hauts responsables de la politique étrangère américaine. Le secrétaire d’État, Antony Blinken, et le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin, doivent arriver lundi au Japon, et devraient ensuite se rendre en Corée du Sud pour des discussions portant sur la sécurité régionale, notamment face aux ambitions de la Chine, mais aussi sur le défi nucléaire de la Corée du Nord et la pandémie de coronavirus.
L’heure n’est plus aux concessions
Au retour, Blinken et le conseiller à la Sécurité nationale, Jake Sullivan, auront jeudi leur premier contact avec les hauts responsables de la diplomatie chinoise, Yang Jiechi, et le conseiller d’État chinois Wang Yi, lors d’une conférence à Anchorage, en Alaska. « C’est une occasion importante pour nous d’exposer en termes très francs les nombreuses préoccupations que nous avons », a annoncé Blinken mercredi au Congrès, façon diplomatique d’annoncer que l’heure n’est plus aux concessions. Ces premières initiatives de la nouvelle Administration américaine indiquent un double changement de la part de Washington visà-vis de Pékin. La première rupture a lieu avec la diplomatie personnelle pratiquée par Trump, qui avait tourné pendant la dernière année de son mandat à une surenchère verbale avec la Chine, tout en affaiblissant les alliances internationales de son pays. Cette approche diplomatique plus classique, qui s’appuie à nouveau sur les alliés régionaux, ne renoue pas pour autant avec la politique menée par Barack Obama et Hillary Clinton, dont l’aveuglement, la faiblesse et parfois la complaisance avaient souvent laissé le champ libre à Pékin. L’année de la pandémie a aussi été celle du grand réveil américain vis-à-vis de la Chine. Démocrates comme républicains sont dorénavant à peu près d’accord sur le danger représenté par ce rival stratégique. S’il n’y a pas encore de doctrine Biden comme il y avait eu celle de Truman au début de la guerre froide, le nouveau président américain vient de manifester qu’il n’entendait pas rester passif face à la nouvelle puissance de la région indo-pacifique. ■
New Delhi déploie sa diplomatie du vaccin afin de tenir tête à Pékin EMMANUEL DERVILLE £@e_derville
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NEW DELHI
LA DIPLOMATIE indienne bataillait depuis quelques semaines pour persuader les États-Unis, le Japon et l’Australie d’investir dans ses capacités de production de vaccins anti-Covid. Au sommet du Quad qui s’est tenu le 12 mars, elle a obtenu gain de cause. Ainsi, New Delhi va pouvoir s’imposer comme un fournisseur incontournable de vaccins pour les pays pauvres et contrer la diplomatie de son rival chinois. En décidant d’aider le groupe pharmaceutique indien Biological E à accroître sa production de do-
ses, le Quad donne un coup de fouet à la diplomatie impulsée par New Delhi depuis le début de l’année. Le géant sud-asiatique était déjà bien positionné dans ce domaine avant l’épidémie : ses entreprises comme Serum Institute of India et Biological E figuraient parmi les plus gros producteurs de vaccins au monde. Depuis le 20 janvier, l’Inde a vendu ou donné 58 millions de doses à 71 pays. 40 % ont été livrées en Afrique et 30 % en Asie du Sud. Pour New Delhi, il s’agit de contrer l’influence de la Chine dans ces deux régions, mais aussi de resserrer les liens avec deux continents clés pour ses besoins en matières premières, pour son économie et sa sécurité nationale.
L’Afrique est devenue un marché important pour les groupes indiens qui, depuis quinze ans, multiplient les investissements dans l’agroalimentaire, les mines, la pharmacie… L’Inde est désormais le quatrième partenaire commercial de ce continent. Les matières premières comme le pétrole, le charbon, les métaux et pierres précieuses, ont représenté plus de la moitié de ce que l’Inde a importé d’Afrique en 2018 d’après une étude d’Exim Bank, l’agence indienne d’aide aux exportations. En outre, en fournissant des vaccins à ses voisins, l’Inde peut espérer réchauffer ses relations avec les pays d’Asie du Sud courtisés par Pékin. Le Bangladesh a été le plus gros bé-
58
millions de doses
de vaccin indien ont été vendues ou données à 71 pays depuis le 20 janvier
néficiaire de la diplomatie vaccinale indienne en recevant 9 millions de doses, alors que les tensions entre Dacca et New Delhi se sont accrues après la réforme de la citoyenneté votée par le Parlement en décembre 2019. Le Bangladesh craint que cette loi, qui accorde la citoyenneté indienne aux clandestins à condition qu’ils ne soient pas musulmans, provoque le retour de milliers d’immigrés. « En plus, les investissements chinois au Bangladesh ont refroidi les relations bilatérales », observait l’Observer Research Foundation (ORF), un centre de recherche proche du gouvernement indien, dans une note parue en janvier. « La diplomatie du vaccin donne
aussi à l’Inde une opportunité pour résoudre son contentieux territorial avec le Népal », ajoutait l’ORF. Même le Pakistan, fidèle allié de la Chine, va obtenir des vaccins indiens. Le 4 mars, le ministère pakistanais de la Santé a indiqué qu’il allait recevoir, par l’intermédiaire de l’alliance Gavi, 16 millions de doses gratuites fabriquées en Inde. La diplomatie indienne a toutefois subi un revers important le 8 février lorsque l’Afrique du Sud a annoncé qu’elle n’utiliserait pas le million de doses offertes par New Delhi. Le vaccin, produit en Inde et conçu par AstraZenecaOxford, s’est révélé peu efficace face au variant sud-africain du coronavirus. ■
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L'ÉVÉNEMENT
Pékin ou Washington ? Les pays asiatiques refusent de choisir
Courtisés par les deux puissances rivales, notamment dans la bataille des vaccins, les États de l’Asie du Sud-Est ne souhaitent pas être embrigadés dans une nouvelle guerre froide. CORRESPONDANT EN ASIE
LA GUERRE du vaccin est déclarée en Asie orientale, en pleine rivalité sino-américaine. Les étrangers résidents à Hongkong pourront obtenir plus facilement un visa vers la Chine continentale s’ils se font inoculer un « vaccin produit en Chine », a décrété Pékin, le 12 mars, brandissant la bannière du nationalisme sanitaire pour affirmer sa mainmise sur l’ancienne colonie britannique. L’annonce est tombée le jour même où Joe Biden lançait une offensive diplomatique hors norme. Le président américain a promis de délivrer plus d’un milliard de doses du sérum Johnson & Johnson aux pays d’Asie du Sud-Est d’ici à 2022, en coopération avec l’Inde, le Japon et l’Australie. L’initiative, dévoilée lors du premier sommet virtuel du Quad, vise à contrer la diplomatie du vaccin actionnée par le régime communiste depuis plusieurs mois auprès de ses voisins. L’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean) est en effet désormais un champ de bataille clé du bras de fer géopolitique entre les deux premières puissances mondiales. Pékin surveille de près la relance du forum stratégique du Quad, et dénonce le retour d’une « logique de bloc » colportée par le trouble-fête américain, menaçant la « prospérité » asiatique. La coopération informelle entre ces quatre poids lourds de « l’Indo-Pacifique » qui plaident pour une région « libre et ouverte », dessine, sans l’affirmer ouvertement, un front antichinois. Son objectif est de contenir le géant renaissant, qui montre ses muscles de Hongkong à Taïwan, en passant par l’Himalaya, et la mer de Chine méridionale. « Il s’agit d’un sommet anti-Chine visant à former une petite Otan asiatique. Bien entendu, Pékin n’apprécie pas cette initiative qui cherche à relancer une guerre froide », juge Chen Qi, professeur à l’Université Tsinghua, dans la capitale chinoise. Officiellement, l’empire du Milieu regarde avec dédain le Quad, et la presse chinoise le juge voué à l’échec. « Les États-Unis sont perdus, et la seule stratégie qui les guide désormais est d’abaisser la Chine. Quiconque essaiera d’isoler la Chine dans la région s’isole de lui-même », affirme un éditorial du Global Times, quotidien nationaliste, affilié au Parti communiste. Mais derrière cette langue de bois décomplexée pointe l’inquiétude des stratèges rouges, hantés par le spectre de l’isolement, alors que la pandémie a dégradé l’image du pays à l’international, au fil des accusations sur l’origine du virus. Pékin se rassure en pointant les divisions et les arrière-pensées des membres du
Quad, notamment l’Inde et le Japon soucieux de maintenir des relations commerciales étroites avec l’usine du monde. « Pour l’instant, il n’y a pas de signe que le Quad puisse devenir une alliance militaire », juge Chen Qi. Un seuil qui déclencherait l’alarme à Zhongnanai, la résidence des hauts dirigeants du Parti, qui mènent une active diplomatie bilatérale auprès de leurs voisins, maniant la carotte et le bâton pour prévenir un encerclement.
CARNEGIE ENDOWMENT FOR INTERNATIONAL PEACE
SÉBASTIEN FALLETTI £@fallettiseb
La crédibilité américaine érodée
La première sortie internationale du secrétaire d’État Américain, Antony Blinken, cette semaine à Tokyo, puis à Séoul, avant de rencontrer Yang Jiechi, le plus haut responsable diplomatique chinois, jeudi, en Alaska, signale la détermination de la nouvelle Administration à renouer avec ses alliés et complique la tâche de Pékin. La première puissance asiatique a bénéficié d’un boulevard dans la région durant le mandat de Donald Trump, champion de l’Amérique d’abord, qui n’avait pas hésité à maltraiter ses alliés les plus proches et à tourner le dos à l’Asie du Sud-Est. Pendant quatre ans, Pékin a accru son influence, diplomatique et commerciale auprès de ses voisins, notamment grâce à la conclusion de la gigantesque zone de libre-échange RCEP, face à une Amérique toujours plus distante, qui sabrait le Transpacific partnership (TPP), conclu sous Obama. Malgré le volontarisme de Joe Biden, qui proclame « l’Amérique de
Les Asiatiques refusent de se prosterner devant Pékin, mais vont jouer les deux puissances l’une contre l’autre pour tirer leur épingle du jeu
»
LEE CHUNG MIN, CHERCHEUR AU CARNEGIE ENDOWMENT FOR INTERNATIONAL PEACE
retour », Pékin estime que le vent de l’Histoire souffle en sa faveur, renforçant mécaniquement sa centralité dans la région poumon de la mondialisation, face à des Occidentaux sur le déclin. « Les Américains veulent isoler la Chine, mais ce n’est plus possible à l’ère de l’interdépendance économique » juge Shi Yinhong, professeur à l’Université Renmin à Pékin. L’isolationnisme de Trump et la prudence d’Obama ont érodé la crédibilité américaine, notamment auprès des pays ayant un contentieux territorial en mer de Chine méridionale, tels que les Philippines ou le Vietnam. S’appuyant sur des siècles d’influence culturelle et la proximité géographique, la puissance chinoise s’étend désormais grâce à ses fleurons technologiques, Alibaba ou Huawei, ainsi que sa capacité de production vaccinale dans une Asean en quête de développement et dominée par des régimes autoritaires. Mais, courtisés par Pékin et Washington, la plupart des dix membres du bloc du Sud-Est asiatique, tout comme l’Inde ou même la Corée du Sud, font d’abord preuve de pragmatisme : ils ne souhaitent pas être embrigadés dans une nouvelle guerre froide. Ils souhaitent maintenir des relations vitales avec le géant chinois - souvent leur premier partenaire commercial - tout en se réjouissant du retour américain. A l’image de Singapour, dont le ministre des Affaires étrangères Vivian Balakrishnan, a réaffirmé la nécessité du « leadership américain » dans une interview au Figaro, mais soigne ses relations à Pé-
kin. « En réalité, les Asiatiques ne veulent pas être sommés de choisir un camp. Ils refusent de se prosterner devant Pékin, mais vont jouer les deux puissances l’une contre l’autre pour tirer leur épingle du jeu », analyse Lee Chung Min, chercheur au Carnegie Endowment for International Peace. Hormis le Cambodge et le Laos, satellites de Pékin, les autres capitales manient l’ambiguïté, se réjouissant des patrouilles de l’US Navy, tout en souriant aux caciques de la Chine rouge. Même Séoul, dont la sécurité est garantie par le Pentagone par un traité bilatéral, n’ose s’opposer frontalement à son voisin, premier partenaire commercial, qui absorbe un quart de ses exportations. Le retour diplomatique de l’Amérique relance la compétition à l’ère post-Covid, dans cette région locomotive de la mondialisation, où les investissements américains sont massifs, mais ne lui garantit pas un succès. « Les valeurs démocratiques affirmées au Quad sont en décalage avec la réalité de la région. Les Américains vont devoir muscler leur jeu sur le plan économique pour convaincre », juge Sebastian Strangio, auteur d’In the Dragon’s Shadow : South East Asia in the Chinese Century. Avec à la clé, la nécessité d’un nouvel accord de libre-échange, réinventant le TPP, mais cela s’annonce difficile à vendre au Congrès, à l’heure où la défense du travailleur américain revient au cœur du débat politique américain. Le « grand jeu » asiatique s’intensifie, sous le regard d’une Europe encore timorée. ■
HUAWEI ENCORE JUGÉ COMME UNE MENACE Le régulateur américain des télécoms (FCC) a classé vendredi Huawei parmi les entreprises chinoises d’équipements de télécommunications considérées comme une menace pour la sécurité nationale. La FCC estime que Huawei pose « un risque inacceptable » pour la sécurité nationale, de même que Hytera Communications, ZTE, Dahua Technology et Hangzhou Hikvision Digital Technology. « Les Américains comptent plus que jamais sur nos réseaux pour travailler, aller à l’école ou accéder aux soins de santé, et nous devons avoir confiance en des communications sûres et sécurisées », a commenté la présidente par intérim de la FCC, Jessica Rosenworcel. Cette décision, qui s’inscrit dans la lignée de celles prises sous Trump, douche les espoirs du fondateur et patron de Huawei, Ren Zhengfei, qui avait appelé en février l’Administration Biden à « une politique d’ouverture ».
Des Hongkongais font la queue à l’extérieur d’un gymnase pour se faire vacciner contre le Covid, fin février. Pékin a annoncé vendredi que les étrangers résidants à Hongkong obtiendraient plus facilement un visa pour la Chine continentale s’ils se font inoculer un vaccin chinois. ISAAC LAWRENCE/AFP
Le Japon, première digue de l’Amérique face à la Chine RÉGIS ARNAUD £@regisarnaud
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TOKYO
LE PREMIER ministre Yoshihide Suga sera le premier dirigeant étranger à rencontrer Joe Biden, en avril, aux États-Unis, « si les circonstances le permettent ». Les bases militaires d’Okinawa (sud du Japon) qui couvrent l’ensemble de la zone Asie-Pacifique sont une des arches de la « pax americana » dans la région. En échange de son hospitalité, le Japon bénéficie du parapluie nucléaire américain, meilleure assurance-vie face au péril chinois. « Solide comme le roc », « indestructible », « plus forte que jamais »… À chaque rencontre, Japon et États-Unis rivalisent de superlatifs pour évoquer leur alliance militaire. Mais celle-ci prend un
nouveau tour. Yoshihide Suga était vendredi en meeting virtuel avec ses homologues australien, indien et américain du Quad, quatuor régional de démocraties unies par un souci commun : la Chine. Sur le volet économique, l’Archipel se félicite d’être à côté de son dynamique voisin, avec qui il cultive un excédent commercial fait de composants et de produits sophistiqués. La deuxième économie du monde, postCovid, est repartie de plus belle et absorbe des exportations nippones. « Donald Trump voulait que l’économie japonaise se découple de l’économie chinoise ; mais c’est tout simplement impossible », explique Hiroki Takeuchi, de l’université américaine SMU. Japon et Chine se sont un peu plus liés en signant en novembre avec leurs voisins d’Asie-Pacifique (mais sans les
États-Unis) l’accord de libre-échange RCEP. En abolissant l’essentiel des
Comme droits de douane entre participants, le RCEP renforce les chaînes de producle Japon dans tion de la région : un donneur d’ordres les années 1930, situé à Tokyo synchronise par exemla Chine est ple la fabrication de produits (automobile, T-shirts…) au Bangladesh une puissance pour les vendre en Chine. « Nous asen pleine sistons à un recouplage de l’Asie-Paciascension fique dont les États-Unis sont absents. en Asie de l’Est. S’ils n’y prennent pas garde, ils seront laissés au bord du chemin » prévient Elle peut faire Hiroki Takeuchi. la même erreur Possibilité d’un que nous, incident militaire mais en dix fois Malgré cette interdépendance renforplus grave cée, le Japon ne baisse pas la garde
»
KUNIHIKO MIYAKE, CONSEILLER SPÉCIAL DU GOUVERNEMENT JAPONAIS
face à la Chine. La mise au pas de Hongkong et les rodomontades contre Taïwan sont les rares sujets inter-
nationaux sur lesquels Tokyo donne de la voix sur la scène internationale. La Chine souhaite naviguer comme elle l’entend dans l’océan Pacifique, Mare Nostrum de l’Amérique, mais cela suppose de faire passer ses bateaux et sous-marins par les eaux territoriales japonaises. « En 2000, j’étais bien seul à voir la menace chinoise. Il n’y avait que des « embrasseurs de pandas » (panda huggers) qui pensaient que la Chine se convertirait au capitalisme et accoucherait de la démocratie et d’une société civile », se rappelle Kunihiko Miyake. Ce conseiller spécial du gouvernement japonais s’inquiète surtout des coups d’épingle que donne la Chine à son pays en envoyant avions et navires militaires au large des Senkaku, chapelet d’îles contrôlé
par Tokyo mais revendiqué par les deux pays. Un incident militaire est possible. Il avertit : « Comme le Japon dans les années 1930, la Chine est une puissance en pleine ascension en Asie de l’Est. Elle peut faire la même erreur que nous – mais en dix fois plus grave. » Et d’enfoncer le clou : « Personne au gouvernement japonais ne peut le dire : mais si la Chine attaque Taïwan, elle devra attaquer les bases américaines situées au Japon, et donc attaquer le Japon. L’éventualité d’un conflit militaire existe. » Hiroki Takeuchi tempère : « Jusqu’à Barack Obama, les relations sino-américaines étaient bonnes et nous leur disions de se méfier. Maintenant, elles sont exécrables et nous leur disons de ne pas perdre espoir. En ce sens, notre relation avec la Chine est plutôt stable par rapport à celle de l’Amérique ! » ■
LE FIGARO
POLITIQUE
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Reconfinement : jours décisifs pour l’exécutif La situation sanitaire en Île-de-France, dans les Hauts-de-France et en Paca inquiète les autorités.
qu’une nouvelle réunion sur le sujet est prévue mardi à l’Élysée. « La question est la suivante : avec tout ça, est-ce qu’on arrive à tenir ? », commente un conseiller.
MATHILDE SIRAUD £@Mathilde_Sd
CRISE SANITAIRE Un an presque jour pour jour après le premier confinement du pays, la menace d’un nouvel enfermement pèse sur les régions où le virus circule activement. En Île-de-France, dans les Hauts-de-France et dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la situation sanitaire et le taux d’occupation des lits dans les services de réanimation inquiètent particulièrement l’exécutif. « Le gouvernement se tient prêt » à durcir encore les restrictions, a répété le premier ministre, tout au long du week-end, durant lequel Jean Castex a multiplié les visites dans les centres de vaccination et auprès des soignants. De son côté, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a assisté dimanche à l’évacuation de deux patients de Meaux (Seine-etMarne) pour Bordeaux, à l’aéroport d’Orly. Car pour éviter un confinement que le président de la République considère comme la solution de dernier recours, l’exécutif mise sur la déprogrammation d’opérations, les évacuations sanitaires, et une accélération de la vaccination. « Nous sommes sur le fil du rasoir », a considéré le premier ministre dans Le Monde, fixant l’objectif de 10 millions de Français vaccinés d’ici à mi-avril, contre 5 millions actuellement. « Nous sommes sur une ligne de crête, la situation est complexe, tendue et a tendance à se dégrader nettement ces derniers jours en Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et dans les Hauts-de-France », a observé, quant à lui, Jérôme Salomon, invité dimanche de « BFM Politique ». Dans ce contexte, « le confinement
« La limite absolue, c’est le tri entre les malades »
Dimanche matin, sur le tarmac de l’aéroport d’Orly, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, assiste à l’évacuation de deux patients de Meaux (Seine-et-Marne) vers Bordeaux. JACQUES WITT/AFP n’est pas tabou, le confinement n’est pas automatique, il doit être justifié », a indiqué le directeur général de la Santé, précisant que « tous les outils » étaient « en permanence sur la table ». À partir de ce lundi, 6 évacuations par jour auront lieu par avion, précise une source gouvernementale, avec une montée en charge prévue en fin de semaine. Selon nos informations, l’exécutif se prépare à « l’opération Chardon » jeudi et dimanche, avec la mobilisation de deux TGV médicalisés transportant chacun 25 patients. En tout, une centaine de patients seront donc transférés, y compris dans des cli-
niques privées sur lesquelles le chef de l’État compte s’appuyer pour désengorger les hôpitaux. Dans le même temps, et malgré les retards de livraison des vaccins
AstraZeneca, « on décaisse les doses au maximum », confie-t-on côté exécutif. « Il faut aller encore plus fort, encore plus vite », presse un proche d’Emmanuel Macron, alors
L’Élysée, Matignon et le ministère de la Santé surveillent plusieurs indicateurs en plus des taux d’incidence : la trajectoire des variants, la capacité hospitalière. « La limite absolue, c’est le tri entre les malades », prévient-on. Pour l’heure, Emmanuel Macron ne semble pas accélérer son calendrier. Le chef de l’État pèsera le pour et le contre d’un éventuel confinement de l’Île-de-France lors du prochain Conseil de défense sanitaire, qui doit se tenir mercredi. Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a une nouvelle fois exprimé, dimanche, son hostilité à une fermeture des écoles, dans les colonnes du Parisien. Autour du président de la République, certains affirment que de nouvelles restrictions sont inéluctables, d’autres invitent à la « prudence ». « Cela fait déjà cinq ou six semaines qu’on nous annonce qu’un confinement est imminent alors qu’il ne s’est jamais produit », rappelle l’un de ses interlocuteurs. ■
Le « confinement n’est pas tabou, le confinement n’est pas automatique, il doit être justifié
»
JÉRÔME SALOMON, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA SANTÉ
À Paris, le criblage montre que les variants anglais représentent 67 % des cas positifs
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avec 1 100 lits occupés, soit 96 % des capacités maximales d’avant l’épidémie, qui préoccupe le plus les autorités, et oblige l’organisation d’un grand nombre d’évacuations. Et à l’échelle de la région, la situation est assez différente d’un département à l’autre, puisque l’occupation des réas varie de 71 % dans les Yvelines à 188 % en Seineet-Marne. La détérioration en Île-de-France n’est pas une anomalie par rapport au reste du pays, où on constate que le nombre de cas progresse désormais dans une soixantaine de départements. Mais en tenant compte des quelques départements où la situation s’améliore
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L’ACCÉLÉRATION prévue du rythme des évacuations sanitaires de patients montre à quel point la situation épidémique en Île-deFrance inquiète les autorités. Après des situations très tendues dans le Nord et dans le Sud ces dernières semaines, avec des points chauds à Dunkerque et à Nice, c’est désormais en région parisienne que l’incidence du Covid est la plus élevée dans le pays, avec 377 cas par semaine pour 100 000 habitants. Et la tendance est mauvaise, puisque tous les indicateurs repartent à la hausse dans la région: le nombre de cas quotidiens, le nombre d’hospitalisations et le nombre d’admissions en service de réanimation. C’est ce dernier point,
très nettement, comme l’Ardèche, la Creuse, la Lozère, les Deux-Sèvres ou la Somme, l’augmentation du nombre de nouveaux cas quotidiens dans tout le pays est assez lente. La moyenne est aujourd’hui autour de 22 000 cas, ce qui marque une progression de +6 % en une semaine. Pour le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, interrogé dimanche sur BFMTV, cette aggravation de la situation est une conséquence des variants du virus. « Depuis quelques jours, il se passe quelque chose, et nous voyons l’effet plein de la variante britannique qui est maintenant majoritaire dans 80 à 85 départements » a-t-il expliqué. « Cette variante est plus contagieuse, plus virulente » et « elle se répand dans toutes les classes d’âge, » at-il précisé. À Paris, le criblage montre que les variants anglais représentent 67 % des cas positifs. Dans le JDD, l’épidémiologiste Vittoria Colizza estime qu’il « est très peu probable » que l’on puisse désormais freiner l’épidémie sans reconfiner. « On a vraiment besoin de mesures de distanciation sociale, sans doute différenciées selon les territoires » a-t-elle estimé. Jérôme Salomon a expliqué une apparente contradiction au niveau national, la hausse des arrivées en services de réanimation alors que le nombre d’hospitalisations baisse, par l’effet combiné des variants anglais avec celui de la vaccination. Les mutations semblent entraîner, selon certaines études anglaises, un plus grand nombre de cas graves et une plus forte mortalité. En revanche, la vaccination proportionnellement plus forte chez les plus âgés réduit fortement leur risque d’être hospitalisés. Mais cette réduction n’a pas d’effet sur les réanimations, puisqu’elle concerne des personnes souvent trop âgées pour pouvoir y être admises. ■
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CYRILLE VANLERBERGHE £@cyrillevan
Année 2021 - Photos non contractuelles - LIDL RCS Créteil 343 262 622.
L’Île-de-France, nouveau point chaud de l’épidémie
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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POLITIQUE
La primaire des écologistes en questions
Si la direction d’EELV avance dans l’organisation, certains cadres s’interrogent encore sur d’autres modalités. Membre de la Convention citoyenne pour le climat, l’activiste trentenaire Mathilde Imer porte cette question au sein de l’association 2022 ou jamais, constituée d’acteurs de la société civile, de l’économie sociale et solidaire… Objectif : faire pression, remplacer ou doubler la primaire des écologistes « dont le périmètre est trop restrictif », par « un processus large de désignation populaire ». Ils attendent « 500 000 personnes pour soutenir ce processus » et se présentent comme « un tiers de confiance, neutre, au sein de la gauche ».
SOPHIE DE RAVINEL £@S2RVNL
ÉCOLOGIE Les 27 septembre et 27 octobre 2016, les écologistes avaient été plus de 12 000 à départager quatre candidats. Yannick Jadot était sorti en tête devant Michèle Rivasi, Cécile Duflot et Karima Delli. Quatre mois plus tard, le parti décide de se rallier au candidat PS, Benoît Hamon. Aujourd’hui, la situation apparaît bien différente. Arrivés en tête aux européennes, riches de plusieurs métropoles emportées aux municipales, les écologistes sont convaincus d’engranger de nombreux élus aux régionales et départementales. Ils veulent faire de leur primaire de septembre le rendez-vous de la rentrée à gauche et s’en servir comme rampe de lancement de la campagne présidentielle. Ils espèrent plus de 100 000 votants, peut-être le double ! Voir la Verte Karima Delli diriger une liste unifiée dans les Hauts-de-France allant des Insoumis aux socialistes, leur donne des ailes. Rien pourtant n’est encore assuré, pas même leur primaire. Soucieux d’écarter les frontières de leur parti de quelque 10 000 adhérents, Europe Écologie-Les Verts a constitué un « pôle écologiste » avec plusieurs petites formations : Cap Écologie, Génération Écologie, Génération. s et le Mouvement des progressistes. C’est ce pôle qui discute de la primaire. Plusieurs points sont a priori actés : elle sera ouverte à tous par votes électroniques à condition de payer 2 euros et de s’engager à soutenir le vainqueur en 2022. Si le pôle espère attirer dix fois plus d’électeurs qu’EELV en 2016, il restera loin de la primaire de l’hiver 2017 au PS, où plus de 2 millions de votants au deuxième tour s’étaient déplacés. Les candidats écologistes devront obtenir le parrainage de 12 à 15 % d’un conseil de 200 cadres du pôle, chacun pouvant parrainer un seul candidat. Leurs projets seront déposés en juillet. Pour le moment, trois candidats sont en lice dont une seule officiellement : Sandrine Rousseau. Les deux autres, le député européen Yannick Jadot et le maire de Grenoble Éric Piolle (lire ci-dessous), conservent une distance prudente. Car dès l’automne, Yannick Jadot a prévenu : « Si la primaire rend impossible l’impératif de rassemblement et devient une machine à diviser et donc à perdre, alors je prendrai mes responsabilités. » Crédité depuis Noël de 7 à 9 % dans les sondages, il mène la course bien en tête, au même niveau que la socialiste Anne Hidalgo, tous deux quelques points derrière Jean-Luc Mélenchon. Outre son envie de s’affranchir d’une primaire coûteuse en énergie, source de divisions internes, le député européen s’interroge encore sur le meilleur processus pour désigner un candidat unique - et hy-
Le « vote préférentiel »
pothétique - de la gauche. « Si on est convaincu qu’il faut une candidature unique dans l’espace situé entre Mélenchon et Macron, alors il faudra un processus de désignation à la taille de cet espace », a-t-il plaidé le 7 mars sur Radio J. Ajoutant : « Il ne faut pas que la primaire écologiste soit un obstacle à ce grand rassemblement. » De quoi ébranler les convictions ? Au sein du pôle, un cadre reconnaît que « ça patine un peu » sur la
primaire chez EELV. « C’est à se demander, dit-il, si ce parti a vraiment envie de se dépasser, voire de se confronter à la possibilité d’exercer le pouvoir. Si quelques-uns sont très motivés, d’autres, nombreux, préfèrent faire 10 % seuls que 50 % en ouvrant les fenêtres… » « Ils jouent petit », regrette encore ce cadre, qui s’interroge aussi sur « l’absence d’un calendrier qui permette une véritable campagne de mobilisation ».
Trois prétendants à la primaire écologiste, Sandrine Rousseau (à gauche), le député européen Yannick Jadot (au centre) et le maire de Grenoble, Éric Piolle, lors d’une manifestation à Rang-du-Fliers, dans le Pas-de-Calais, le 6 février. BLANQUART CH/ ANDBZ/ABACA
Secrétaire général de Génération.s, Benjamin Lucas prévient : « L’écologie populaire peut vraiment drainer des électeurs partis depuis longtemps, nous devons susciter une dynamique qui dépasse le cadre de nos partis… » Lui aussi, même s’il se veut « loyal au pôle écologiste », se demande si cette primaire est le bon outil pour placer la gauche en situation de l’emporter.
De son côté, la députée Delphine Batho, à la tête de Génération Écologie, s’interroge sur sa propre candidature et porte une proposition singulière pour éviter les divisions mortifères : le « vote préférentiel ». « Plutôt que de sélectionner un candidat et d’éliminer les autres, il s’agit de classer les candidats par ordre de préférence, explique l’ancienne ministre. Rien de tel pour éviter le piège du présidentialisme et constituer un collectif. » « En 2022, assure-t-elle, la question de la réforme institutionnelle sera centrale, et cette primaire pourrait l’anticiper par cette innovation, suscitant une vraie dynamique de participation. » Lors du dernier conseil fédéral, les cadres de EELV ont cependant voté contre. « Ce n’était pas une opposition franche, mais des interrogations », explique la porte-parole Sandra Regol. « Avec beaucoup de monde, le moindre ratage est plus difficile à gérer », avance-t-elle, prenant le risque de nourrir le procès en « petit bras ». ■
L’écologiste Éric Piolle raille la « nostalgie » des socialistes ARTHUR BERDAH £@arthurberdah
Éric Piolle, dimanche, sur le plateau du « Grand Jury RTLLe Figaro-LCI ». N. KOVARIK/AGENCE 1827
LE FEUILLETON de l’impossible union de la gauche a encore de beaux jours devant lui. Alors que les socialistes, les écologistes, les communistes et les Insoumis se sont entendus pour faire liste commune dans les Hauts-de-France, cet accord inédit a suscité une vague
d’espoir dans d’autres régions. Notamment en Auvergne-Rhône-Alpes où, pour espérer battre le président sortant, Laurent Wauquiez, le PS vient d’investir Najat VallaudBelkacem. Ce profil, censé rassembler, a été vertement critiqué par le maire EELV de Grenoble, Éric Piolle, lors du « Grand Jury RTL-Le FigaroLCI » dimanche. « (Elle) était élue auprès de (Gérard) Collomb et après ministre de Manuel Valls… », a-t-il rappelé, s’étonnant qu’elle « puisse dire “tiens, venez derrière moi” ». « Ça va sembler incongru un peu à tout le monde. C’est quand même pas la logique politique, et l’aspiration des gens », a-t-il tranché, rappelant que, en plus de sa ville, les écologistes avaient « gagné Lyon, la métropole de Lyon, (et) Annecy » aux dernières municipales. Autrement dit, que si union il doit y avoir, cela doit se faire derrière les Verts plutôt que les roses. « Après, il y a peut-être une nostalgie au PS, qui fait que c’est difficilement acceptable », a-t-il ironisé.
Idem, d’ailleurs, pour la présidentielle de 2022, où les écologistes ne veulent pas reproduire leur erreur de 2017. Lorsqu’ils s’étaient rangés derrière le socialiste Benoît Hamon, obtenant à l’époque le pire score de l’histoire du parti (6,36 %). Cette fois-ci, les écologistes misent beaucoup sur leur primaire, prévue en septembre prochain, et qui « démarrera après les régionales » de juin. Ce scrutin interne doit permettre de départager les différents prétendants, parmi lesquels se trouvent déjà Sandrine Rousseau et probablement Yannick Jadot. Ainsi qu’Éric Piolle ? « Ce n’est pas l’heure », esquive-t-il, entretenant un secret de polichinelle sur ses intentions jusqu’à l’été.
« Un débat moisi » D’ici là, le maire de Grenoble entend se consacrer pleinement à la gestion de sa ville. Sur le plan sanitaire, bien sûr, mais pas seulement. Début mars, les noms de deux professeurs du Sciences Po local, accusés « d’islamophobie », ont été pla-
cardés sur la façade de l’Institut d’études politiques. Un événement « grave », cinq mois après l’assassinat de Samuel Paty, qu’il « condamne avec la plus grande fermeté ». « Il n’y a pas de “mais” sur cette question », ajoute-t-il. Plutôt que d’islamophobie, lui-même « préfère » d’ailleurs « parler de discriminations envers les musulmans ». Pour autant, l’édile a fait part de sa « colère » et sa « rage » face à la multiplication des débats sur l’islamo-gauchisme à l’université ou l’ensauvagement de la société. « Nous installons aujourd’hui un débat qui est moisi », a-t-il déploré, accusant l’exécutif de « reprendre les termes de l’extrême droite ». Dans son viseur se trouvent notamment le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et sa collègue de l’Enseignement supérieure, Frédérique Vidal. Mais aussi Emmanuel Macron. « Il y a un brouillage des valeurs de la part du président de la République et de ses ministres qui est insupportable sur l’essentiel », assène-t-il. ■
Genevard dénonce « l’affolement législatif » à l’Assemblée
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EMMANUEL GALIERO [email protected]
DROITE Le jeu du pouvoir avec l’agenda législatif dans la dernière ligne droite avant la présidentielle serait donc un miroir aux alouettes. Ce message d’alerte est lancé par Annie Genevard. La vice-présidente LR de l’Assemblée voit un gouffre entre la réalité du calendrier parlementaire, qu’elle juge « désorganisé », et l’image réformatrice que cultivera l’exécutif jusqu’au bout du quinquennat. Pour appuyer sa démonstration, la députée du Doubs renvoie aux récents propos de François Patriat, sénateur de la Côte-d’Or, reconnaissant lui-même le peu de temps utile restant pour les réformes. Selon le chef de file des sénateurs macronistes, l’espace est restreint d’ici
à 2022, puisque encombré par les lois séparatisme et climat. Genevard rebondit sur ce constat et accuse : « Le compte à rebours est engagé. Il y a un affolement législatif. C’est sauve qui peut la réforme, parce qu’ils ont pris conscience du manque de créneaux disponibles. Sans compter que les lois auront très peu de chances de voir le jour si elles sont votées in extremis. »
L’impasse du chronomètre Les dispositions relatives à l’instruction en famille prévues dans la loi séparatisme ne seront applicables qu’après le quinquennat, prédit la députée. Idem pour d’autres mesures de la loi travail touchant à la réforme de la SNCF. La création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale sur la dépendance, annoncée comme une « nouveauté révolutionnaire à grand renfort de communication »
sera également lettre morte sans loi sur le grand âge et l’autonomie, pense l’élue d’opposition. Elle fait aussi observer que la loi portée par la présidente LREM de la commission des affaires sociales Brigitte Bourguignon n’est pas citée parmi celles promises à examen. « Or, une absence de texte législatif serait la preuve flagrante que l’on se moque du monde », accuse Genevard. Selon elle, un « soupçon d’affichage » pèsera sur toutes les lois votées dans la dernière ligne droite du quinquennat. Face à l’impasse du chronomètre, la droite est convaincue qu’Emmanuel Macron a déjà lancé ses troupes dans une stratégie de campagne et que les arbitrages se joueront entre les ministres qui pèsent et ceux qui ne pèsent pas. Les promesses législatives fleurissent: loi de programmation pluriannuelle pour l’Éducation nationale (Blanquer), logement so-
J.-C. MARMARA/LE FIGARO
Pour la vice-présidente LR, un « soupçon d’affichage » politique pèsera sur toutes les dernières lois du mandat d’Emmanuel Macron.
C’est sauve qui peut la réforme, parce qu’ils ont pris conscience du manque de créneaux disponibles
»
ANNIE GENEVARD, DÉPUTÉE LR DU DOUBS
cial (Wargon), grand âge (Bourguignon), sécurité (Darmanin), justice (Dupond-Moretti), aide à l’enfance (Taquet), loi 4D (Gourault)… De nombreux textes cherchent à s’insérer dans le calendrier, mais tous ne le pourront pas. D’autant qu’Emmanuel Macron, dès le 13 janvier, a invité les ministres à lever le crayon. « Au-delà d’un jeu d’influences sans doute féroce au sein du gouvernement, on voit bien que parmi les ministres qui ont déjà intégré cette impasse, certains vont tenter de la surmonter en passant par des propositions de loi », décrypte Genevard. Par exemple, la PPL créant la fonction de directeur d’école portée par la députée LREM du Val-d’Oise Cécile Rilhac lui semble « directement pilotée » par le ministère de l’Éducation. De même, pour cette autre proposition visant à « démocratiser le sport en France ».
« Tout cela est fait sciemment », critique la vice-présidente de l’Assemblée, heurtée par le fait que le président de la République incite à réformer aussi sans passer par la loi, via des décrets ou des mesures d’application directe comme les arrêtés ou les circulaires. « Leur obsession est de faire croire qu’ils réforment jusqu’au bout, mais une proposition de loi ne peut pas se substituer à un projet de loi, toutes ces dérivations ont leurs limites », met en garde la parlementaire. Genevard croit enfin que l’ensemble des derniers choix politiques du quinquennat n’auront qu’une seule boussole. Tous, selon elle, seront dictés par leur poids politique à l’aune de la présidentielle. « Mais il y aura le bilan de la majorité et celui de la réalité, car la réforme est loin, très loin d’être au rendez-vous de ce mandat. » ■
LE FIGARO
INTERNATIONAL
lundi 15 mars 2021
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La CDU d’Angela Merkel sanctionnée dans les urnes La défaite encaissée dimanche par les conservateurs dans deux Länder bouscule la donne avant les législatives de septembre. PIERRE AVRIL [email protected] CORRESPONDANT À BERLIN
ALLEMAGNE Le parti d’Angela Merkel perd des plumes. La CDU a enregistré deux revers électoraux dimanche à l’occasion des scrutins régionaux du Bade Wurtemberg et de Rhénanie Palatinat, deux Länder frontaliers de la Belgique, du Luxembourg et de la France. Le parti chrétien-démocrate, qui jusqu’à présent caracolait dans les sondages nationaux, a perdu quatre points dans la première, et la plus importante, de ces régions (23 %) qui a pour capitale Stuttgart. Il récolte ainsi la deuxième place derrière les Verts qui, pour leur part, renforcent légèrement leur posi-
tion (31,5 %), selon les sondages réalisés par les deux principales chaînes ZDF et ARD. En Rhénanie Palatinat, la défaite de la CDU est plus marquée, puisque son score atteint 26,9% contre 31,8% en 2016, la plaçant également en deuxième position derrière les inamovibles sociaux-démocrates du SPD, en baisse pour leur part d’environ trois points. Ces contre-performances seront mises au crédit des différentes affaires qui ont secoué le parti conservateur ces derniers jours. La semaine passée, deux de ses députés, le Bavarois Georg Nüsslein (CSU) et l’élu du Bade-Wurtemberg, Nikolas Löbel (CDU), ont démissionné de leurs partis respectifs, soupçonnés d’avoir joué les intermé-
diaires rémunérés lors de contrats passés entre les autorités et des fabricants de masques. Dans une controverse distincte, un parlementaire chrétiendémocrate a renoncé à son mandat après que son journal électoral a hébergé des articles publicitaires rédigés par le très peu démocratique gouvernement azerbaïdjanais.
Communication calamiteuse La portée électorale de ces affaires - qui nourrissent des soupçons de corruption et d’affairisme au sein du parti conservateur - aurait pu être encore plus lourde. À cause de l’épidémie de coronavirus, un grand nombre d’électeurs avaient voté par courrier et par anticipation, avant que ces scandales n’attei-
gnent leur paroxysme. Plébiscitée au début de la crise du sanitaire, la CDU paie de surcroît aujourd’hui les récentes erreurs de gestion commises par le ministre de la Santé, Jens Spahn. La communication publique autour de l’épidémie se révèle calamiteuse. Les autorités viennent d’assouplir les contraintes sanitaires au moment où, selon l’institut Robert Koch, le pays doit se préparer à une troisième vague. Dans le Bade Wurtemberg, connu pour abriter une grande partie de l’industrie automobile nationale, ce revers pourrait éjecter la CDU de la coalition que le parti forme depuis quatre ans avec les Verts. Le ministre président Winfried Kretschmann, un écologiste modéré et catholique, pourrait préférer
une alliance avec le petit parti libéral FDP (en légère progression), et le SPD (en légère baisse). Cette triple alliance pourrait également se perpétuer dans le Rhénanie Palatinat, où les sociaux-démocrates, bien qu’en baisse, conservent la présidence de la région. Le résultat constitue un lourd handicap de départ pour le nouveau président de la CDU, Armin Laschet, dont l’ambition est de succéder à Angela Merkel à l’issue des élections législatives nationales de septembre. Le Bade Wurtemberg était considéré comme un exemple d’une coalition fédérale Verts/conservateurs. L’élection dominicale, marquée par la progression des Grünen et le recul des deux principaux partis du pays, rebat les cartes. ■
Draghi fait le choix délicat de reconfiner en Italie
Plus de la moitié des Italiens sont confinés dès lundi pour endiguer une troisième vague de contagions. VALÉRIE SEGOND £@ValSegond ROME
EUROPE Le premier ministre Mario Draghi s’est fixé un objectif difficile à l’orée de sa deuxième adresse aux Italiens depuis son discours de confiance au Parlement. Pour leur faire accepter un énième confinement depuis un an, il doit leur apporter sinon des preuves, du moins des éléments convaincants, que sa première mission - la résolution de la crise sanitaire - avance bel et bien. Aussi a-t-il choisi le nouveau centre de vaccination géant construit sur le parking de l’aéroport de Fiumicino, pour annoncer vendredi qu’à compter de lundi, 10 régions et la province de Trento, sont placées « en zone rouge ». Plus de la moitié des Italiens, résignés, se retrouvent ainsi confinés, à
l’exception de ceux qui ne pourront faire autrement que se rendre à leur travail ou qui auront une obligation dûment démontrée. Dans ces régions, les élèves de tous niveaux doivent rester à la maison, car les écoles sont fermées, comme la plupart des commerces et restaurants. Neuf régions sont placées en « orange », avec les magasins ouverts, mais nombre d’entre elles ont choisi de fermer leurs écoles et lycées. Seule la Sardaigne reste « blanche ». Ce régime de rigueur sera maintenu jusqu’au 6 avril et toute l’Italie sera sous cloche durant les trois jours du week-end de Pâques. Si Mario Draghi prend grand soin d’expliquer les raisons de ce reconfinement, à commencer par la violence de la troisième vague, s’il dit comprendre ses conséquences sur chacun et promet d’apporter toutes les aides financières rapidement
Des Romains se promènent samedi, via del Corso, l’une des principales rues commerçantes de la capitale italienne, avant un nouveau confinement qui sera maintenu jusqu’au 6 avril. FILIPPO MONTEFORTE/AFP
(une rallonge de 10 à 15 milliards par mois de confinement supplémentaire, selon Bloomberg, doit s’ajouter aux 32 milliards déjà engagés depuis janvier), c’est sur la campagne de vaccination qu’il était le plus attendu. Il « assure » qu’elle va encore s’accélérer et passer de 170 000 injections par jour ces dernières semaines à 500 000. Alors que les doutes sur la disponibilité des vaccins demeurent, il dit faire tout son possible pour que l’Italie reçoive bien dans les temps les doses promises et qu’elle en produise elle-même davantage.
Un esprit commando Samedi, le général Francesco Paolo Figliuolo, nommé commissaire spécial chargé de l’urgence sanitaire, a détaillé la stratégie de sa campagne visant à vacciner 60 % de toute la population (et pas seulement des
plus de 16 ans) avant fin juillet, 70 % fin août, et 80 % fin septembre (soit 48 millions de personnes). Ce plan parie toujours sur la livraison de 8 millions de doses d’ici à la fin mars, 52 millions au deuxième trimestre, et 84 millions au troisième. Il s’appuie aussi sur une distribution plus efficace des vaccins et la création de points de vaccination dans tous les espaces disponibles : hôpitaux, casernes, entreprises, gymnases, entrepôts, parkings, écoles, lieux de culte. D’autres, comme des unités mobiles, s’ajouteront encore aux 1 733 points de vaccination fixes déjà opérationnels. Tous les médecins, y compris les étudiants en troisième cycle, mais aussi les dentistes, les médecins du travail ou du sport, les pharmaciens, sont appelés à venir vacciner. La campagne affiche un esprit commando : un suivi constant des
écarts entre le plan et sa mise en œuvre doit permettre d’organiser très rapidement des interventions ciblées. En particulier dans les zones où se déclarent de nouveaux clusters, pour couper court à l’accélération de la circulation du virus. Un stock de 1,5 % des doses reçues doit être constitué pour intervenir au plus vite dans les communes en situation critique. Alors que la santé est habituellement gérée par les régions en Italie, le général Figliuolo recentralise aussi la gouvernance de la campagne de vaccination. Il coordonne ainsi tous les ministères concernés ainsi que les régions, et assure un contrôle très serré de l’exécution sur toute la chaîne. Aux régions, chargées de créer les nouveaux points de vaccinations dans les espaces identifiés, de s’adapter à la nouvelle donne. ■
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SES SIX ANNÉES d’exil à Sciences Po Paris ont permis à Enrico Letta, 54 ans, de se tenir à l’écart des batailles de courants du Parti démocrate italien (PD), mais aussi de cicatriser et de mûrir. C’est en homme revigoré par une traversée du désert qu’il revient à Rome pour prendre la succession de Nicola Zingaretti à la tête du parti et tenter de le sauver d’un naufrage annoncé. Seul candidat en lice, Enrico Letta a été élu à l’unanimité dimanche huitième secrétaire général du parti depuis sa création, il y a quatorze ans. Comment ce politique chevronné, chassé en 2014 de la présidence du Conseil par Matteo Renzi, revient-il en sauveur, soutenu par ceux-là mêmes qui l’avaient lâché ? Élu en mars 2019 pour refonder le PD, Zingaretti ne mènera jamais l’opération. Pour faire barrage à la Ligue, le parti revient dès août 2019 au pouvoir, et trahit ses promesses en s’alliant avec le Mouvement 5 étoiles : « Dès que le PD s’est retrouvé avec des ministres au gouvernement, Zingaretti a été submergé par la guerre entre courants », raconte Mauro Calise, politologue à l’université Frédéric-II à Naples. Et pendant dix-huit mois, pour éviter les élections an-
ticipées qui auraient ramené la Ligue au pouvoir, le PD se montre si loyal au premier ministre Giuseppe Conte, qu’il finit par se soumettre à toutes les exigences du M5S. Au point que lorsque Matteo Renzi fait tomber le gouvernement Conte 2, Zingaretti se prononce « pour un troisième gouvernement Conte, ou les élections anticipées. » Or révèle Mauro Calise, « pendant qu’il jure sa fidélité à Conte, des élus démocrates font savoir au président Mattarella qu’ils sont prêts à soutenir un gouvernement d’union nationale. » Une trahison pour le secrétaire général, qui démissionnera deux semaines après l’arrivée de Draghi.
Une revanche à prendre « Depuis lors, le PD est pris dans la spirale de l’échec », dit Sofia Ventura de l’université de Bologne. Il voit ses électeurs partir vers le M5S, dont Giuseppe Conte pourrait prendre la tête, et dégringole à la 4e place dans les sondages. Et il se terre dans un mutisme coupable face à Matteo Salvini qui occupe toute la scène médiatique. Alors qu’il faut sauver le parti du risque de naufrage, on pense à Enrico Letta, un historique qui connaît parfaitement la formation qu’il a contribué à faire naître, et qui a
Seul candidat en lice, Enrico Letta, ancien chef du gouvernement italien, a été élu à l’unanimité, dimanche. ERIC PIERMONT/AFP
une revanche à prendre. Même Mario Draghi l’appelle pour lui dire combien il est risqué pour la stabilité du gouvernement d’avoir un PD faible et sans leader. À peine débarqué à Rome, sentant qu’il aura les coudées franches, Letta demande ainsi carte blanche. Il
affirme qu’il n’acceptera aucun ultimatum et exige d’être un secrétaire général à part entière, et non de transition. Revient-il alors pour refonder le parti à l’issue d’un congrès en bonne et due forme ? Nicola Zingaretti jure qu’il s’inscrit dans la continuité. Mais dimanche, Enrico Letta s’est montré plus désireux de rupture. Il dit vouloir un nouveau parti qui ouvre ses portes, un parti qui qui s’appuie sur les jeunes en leur donnant le droit de vote à 16 ans, qui donne toute leur place aux femmes, qui offre la nationalité italienne aux enfants d’immigrés. Il souhaite aussi un PD qui reparte des territoires et non des centresvilles, et qui fasse la synthèse entre les courants, comme pour les dépasser. Bref, « plus décisionnelle, son approche sera moins douce que par le passé » estime Marc Lazar, spécialiste de la vie politique italienne.
Pour soutenir Draghi Mais surtout, « le gouvernement de Mario Draghi est notre gouvernement », dit-il. La phrase qui livre tout le sens de ce retour. « L’opération Letta ne vise pas tant à changer la ligne du parti qu’à soutenir activement le gouvernement Draghi
pour pouvoir lors des prochaines élections en revendiquer l’héritage », explique Lina Palmerini, l’éditorialiste du Sole 24 ore. D’autant que les grands thèmes de Draghi, annoncés dans son discours au Sénat du 17 février, sont précisément ceux que défend la gauche : la fiscalité progressive, la lutte contre les inégalités, la défense de l’Europe, l’instruction, l’environnement, la parité, la croissance et l’emploi. Or, juge Lina Palmerini, « Letta était le meilleur candidat pour soutenir Draghi. Il le connaît très bien pour l’avoir souvent croisé dans sa longue carrière politique en Europe comme au ministère de l’Industrie. Il le comprend et parle son langage. Il a été en 2013 lui aussi le premier ministre d’un gouvernement construit sur une large majorité. Il partage avec lui ses convictions réformistes, libérales et européistes. » S’il revient à Rome pour soutenir Mario Draghi, Enrico Letta doit aussi travailler aux alliances : avec les Cinq étoiles, sans pour autant s’y soumettre, ni se laisser dévorer par eux. Et avec toutes les forces de gauche, pour créer des coalitions, condition pour gagner. Car s’il vient aujourd’hui, c’est bien pour sauver le parti. ■ V. S. (À ROME)
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Enrico Letta arrive en sauveur à la tête du Parti démocrate italien
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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SOCIÉTÉ
Le débat sur l’euthanasie refait surface
Dans la majorité, des voix s’élèvent pour soutenir une proposition de loi sur « une aide active à mourir ». AGNÈS LECLAIR £@AgnesLeclair
FIN DE VIE Alors que la France compte ses morts en pleine pandémie, le débat sur l’euthanasie refait surface. Jamais complètement éteint au cours de ces dernières années, il a ressurgi une fois de plus dans l’actualité avec l’inscription à l’agenda parlementaire de quatre propositions de loi sur « une aide active à mourir ». La semaine dernière, le texte sur le « droit à mourir dans la dignité » examiné au Sénat et finalement retiré - avait peu de chances d’aboutir. Il en va autrement de la proposition de loi d’Olivier Falorni (Libertés et Territoires) pour « donner le droit à une fin de vie libre et choisie » qui sera débattue le 8 avril à l’Assemblée nationale. Malgré les réserves du gouvernement sur l’opportunité de discuter de ce sujet sociétal très sensible en peine crise sanitaire, il pourrait créer la surprise. Ce texte a en effet reçu des soutiens de poids. Dimanche, la présidente LREM de la commission des lois à l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a annoncé dans Le Journal du dimanche qu’elle était prête à voter ce texte, et ce en dépit des réserves du gouvernement. Le député de la majorité Jean-Louis Touraine (ex-PS), à la manœuvre depuis des années pour faire évoluer la loi sur la fin de vie, est lui aussi prêt à le soutenir après l’avoir amendé. Ce dernier est également l’auteur d’une proposition de loi en faveur d’une « aide médicalisée active à mourir » pour les personnes gravement malades et en fin de vie, qui a permis de prendre le pouls de la majorité sur ce sujet sensible. Son texte a été cosigné par 164 élus LREM, soit plus de la moitié de la majorité. « Pas question de procrastiner pour attendre des promesses de campagne. D’autant qu’Emmanuel Macron considère que la fin de vie n’est pas un sujet de campagne électorale, confie Jean-Louis Touraine. Il y a urgence à faire cesser le “mal mourir” en France. C’est une chose de se battre pour la vie, c’en est une autre d’entretenir des agonies insupportables. » Jeudi dernier, le ministre de la Santé a tenté d’endiguer ces offensives en annonçant le lancement,
dès avril, d’un nouveau plan national de développement des soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de vie. « Cela fait près de trois ans qu’il aurait dû être annoncé. Cette attente, sans plan et sans budget, fait évidemment partie des raisons pour lesquelles on dit que la loi actuelle sur la fin de vie n’est pas suffisamment appliquée », relève la Dr Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap). Ce médecin qualifie de « complexe » la tenue d’un débat sur l’euthanasie en pleine crise sanitaire. « Il y a quelque chose de schizophrène dans cette démarche alors que l’on vient de passer toute année à sauver des gens, même très âgés ou très fragiles. Nous avons sacrifié beaucoup pour ces patients et c’est à l’honneur de notre société. Il me semble donc particulier de venir questionner la valeur de ces vies et leur utilité aujourd’hui », analyse-t-elle.
« Un choix intime » Jean-Louis Touraine juge au contraire que la crise du Covid-19 souligne l’urgence de changer la loi alors que « les cas de drames de fin de vie se sont multipliés de manière inimaginable », notamment pour des personnes âgées isolées dans les Ehpad « qui n’ont pas été accompagnées » et sont parties « dans des états de détresse respiratoire atroces ». Au Sénat, les partisans d’un changement de la loi ont pour leur part salué à plusieurs reprises Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d’État aux Personnes âgées sous le gouvernement de Lionel Jospin, atteinte d’une maladie dégénérative et partie en Suisse pour avoir recours au suicide assisté. « Ce choix intime (…) nous dit d’abord que la législation actuelle ne répond pas à la situation cruelle que beaucoup de nos compatriotes vivent », a plaidé l’auteur du texte, la socialiste Marie-Pierre de la Gontrie. Ils s’appuient enfin sur un sondage d’avril 2019, réalisé par Ipsos pour Lire la Politique, selon lequel 96 % des Français sont favorables à l’euthanasie. L’association Soulager mais pas tuer leur oppose un sondage Ifop du 10 mars dernier dans lequel les Français, interrogés sur leurs deux priorités pour la fin
de vie, indiquent plutôt vouloir « ne pas subir de douleur » (48 %) et « ne pas faire l’objet d’un acharnement thérapeutique » (46 %) que d’« obtenir l’euthanasie » (24 %). « Il est extrêmement choquant de proposer une loi visant à légaliser l’euthanasie alors que nos soignants sont en train de se battre pour sauver des vies, s’élève Tugdual Derville, porte-parole de Soulager mais pas tuer. La France a choisi un modèle de protection sociale de santé qui met le patient au cœur de son projet. Un texte sur l’euthanasie casserait tout ce système. » Une aide active à mourir entraînerait un « bouleversement majeure dans la relation de soin », souligne Claire Fourcade. « Mourir de manière acceptable, c’est un souhait partagé par tous, poursuit-elle. On peut y répondre de deux manières : en améliorant l’accompagnement et le soulagement de la douleur ou en répondant que vous avez raison de vouloir mourir. Ce ne serait pas un pas de plus dans la loi mais un tout autre chemin. » ■
Jeudi dernier, le ministre de la Santé a annoncé le lancement, dès avril, d’un nouveau plan national de développement des soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de vie. RAWPIXEL.COM/ STOCK.ADOBE.COM
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Un problème de calendrier Le président de l’Assemblée Richard Ferrand a lui exprimé son scepticisme concernant la période, estimant qu’il fallait « de grands débats spirituels ». « Depuis le Covid, je trouve que nous sommes chaque jour confrontés à la mort, et il me semble qu’aujourd’hui il faut privilégier les textes qui renouent avec l’espérance, avec l’aprèsguerre », a déclaré l’élu du Finistère mercredi au micro de BFMTV. Devant les sénateurs, jeudi, le ministre de la Santé a donc indiqué que le gouvernement était défavorable à la légalisation de l’euthanasie, ouvrant la voie à une évolution concernant les soins palliatifs, préalable à une modification de la loi Claeys-Leonetti promulguée en 2016. Olivier Véran a annoncé le lancement « d’un nouveau plan national de développement des soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de vie », à compter d’avril. Dans l’entourage du premier ministre, on invoque en premier lieu un problème de calendrier pour pouvoir aller plus loin. « Ce n’est pas le bon
moment pour ouvrir un tel débat. Pendant la première vague de l’épidémie, nous avons été confrontés au problème de pénurie de curare, utilisé en réanimation, ce qui avait provoqué une polémique », rappelle un proche de Jean Castex. Le patron des députés LREM, Christophe Castaner, a eu l’occasion de discuter de l’opportunité d’évoluer sur ce sujet sociétal avec le premier ministre. Le 2 mars, les responsables de la majorité en ont débattu à Matignon. « On a dépensé des milliards d’euros pendant la crise sanitaire pour sauver les vieux, pour les réanimations, et maintenant on va dire qu’on légifère sur l’euthanasie ? », interroge l’un d’eux, identifiant un piège politique. Sur France 3 ce dimanche, le délégué général de LREM Stanislas Guerini est également intervenu dans le débat. Selon lui, il «serait peut-être utile de mettre en place une Convention citoyenne pour créer des conditions de consensus et que chacun puisse prendre ses responsabilités». Une proposition qui a irrité une partie des députés LREM et qui a suscité de très vives réactions sur les réseaux sociaux. Devant tant d’obstacles, l’exécutif espère que les députés les plus velléitaires sur le sujet rentreront dans le rang. « Il y a toujours un risque pour que ça passe au Parlement, mais entre cosigner une proposition de loi et voter contre l’avis du gouvernement, dans le contexte, je ne suis pas sûr que les députés soient aussi nombreux à la fin », tempère un proche du premier ministre. ■
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LÉGIFÉRER sur la fin de vie, rouvrir le débat sur « le droit à mourir dans la dignité » : les parlementaires de gauche et de la majorité ont beau s’agiter et multiplier les initiatives sur le sujet, l’exécutif freine des quatre fers, anticipant un piège politique. Après la proposition de loi de la sénatrice PS Marie-Pierre de la Gontrie qui n’a pas abouti, un texte du député Olivier Falorni (Libertés et territoires) donnant le droit à une « fin de vie libre et choisie » doit être examiné le 8 avril à l’Assemblée nationale. Le gouvernement a rendu un avis défavorable, mais au sein même de LREM, le député Jean-Louis Touraine a déposé une proposition de loi sur « l’aide médicalisée active à mourir », cosignée par 164 parlementaires de la majorité présidentielle. L’élu du Rhône, par ailleurs professeur de médecine, a été reçu par le directeur de cabinet du premier ministre, Nicolas Revel, début mars. « Mais les lois de la République sont ainsi faites qu’à la fin, c’est le gouvernement qui décide », sourit un proche du président. Car le chef de l’État ne souhaite pas s’engager sur une réforme aussi sensible et intime dans un contexte de crise sanitaire. En 2019, Macron s’était ainsi prudemment tenu à l’écart des débats autour du cas Vincent Lambert. Ce sujet ne faisait par ailleurs pas partie de son programme présidentiel de 2017. Si bien que même ses
ministres favorables à l’euthanasie reconnaissent la « difficulté » d’avancer sur un tel dossier d’ici à la fin du quinquennat, en dépit des initiatives parlementaires. « Une telle évolution sociétale, même si elle est plébiscitée par les Français, doit être sanctionnée par l’élection présidentielle. Si le président se représente en 2022, je n’exclus pas qu’il puisse le proposer », estime un ministre.
Depuis le Covid, je trouve que nous sommes chaque jour confrontés à la mort, et il me semble qu’aujourd’hui, il faut privilégier les textes qui renouent avec l’espérance, avec l’aprèsguerre
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PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
L’exécutif contraint de clarifier sa position
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Emmanuel Macron face à un dossier sensible qui divise son camp MATHILDE SIRAUD £@Mathilde_Sd
CONTRE-POINT
RICHARD FERRAND, PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE
l est des offensives de fin de mandat qui ressemblent à des barouds d’honneur (celle du MoDem sur la proportionnelle, par exemple). Il en est d’autres qui ressemblent à d’ultimes coups de bélier pour faire céder les dernières résistances. Celle des partisans de l’euthanasie et du suicide assisté appartient à la seconde catégorie. La discussion d’une première proposition de loi a été interrompue au Sénat la semaine dernière et le gouvernement, par la voix d’Olivier Véran, a exprimé sa préférence pour une évaluation de la loi Leonetti et une meilleure pratique des soins palliatifs. Mais une nouvelle salve est prévue à l’Assemblée. Deux propositions de loi n’iront sans doute pas loin : celle de la LFI Caroline Fiat et celle de la LR Marine Brenier, qui revendique la rédaction de son texte « en lien » avec l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), qui, dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, s’indignait de ce qu’on ose invoquer la « sacralité » de la vie pour s’opposer à son projet. Mais celui du LREM Jean-Louis Touraine est cosigné par 164 députés, dont la majorité par des élus du groupe LREM. Et celui d’Olivier Falorni (Libertés et territoires) sera discuté en premier, le 8 avril. Dans Le JDD, la présidente de la commission des lois, Yaël Braun-Pivet, annonce qu’elle votera cette proposition de loi. De par sa fonction, la députée des Yvelines occupe une position institutionnelle au sein de la majorité. Or, plusieurs députés, même intimement pro-euthanasie, pourraient s’abstenir pour ne pas placer l’exécutif dans l’embarras. L’expression de la présidente des lois risque donc d’être prise comme un permis de participer à l’offensive. Au point d’en permettre le succès ? C’est là que Falorni et Touraine jouent sur l’effet rasoir à deux lames de leurs textes, identiques et travaillés de concert. Un premier pour faire une démonstration de force ; un second pour faire basculer les hésitants. Certes, les allers-retours avec le Sénat rendront difficile un vote avant un an, mais ils parient qu’à défaut d’aboutir ils obtiendront de Macron, et d’autres candidats, d’en
faire une promesse de campagne en 2022. Après avoir remporté la bataille sémantique en s’appropriant le mot de « dignité », les partisans du suicide légalisé s’appuient, avec plus de cynisme que de décence, sur les angoisses exprimées face à la mort lors de la crise sanitaire. L’exécutif semble plus embarrassé sur le moment choisi que sur le fond. En 2017, Emmanuel Macron avait dit vouloir choisir sa mort. Nommé à la Chancellerie, Éric Dupond-Moretti a fait savoir qu’il était disposé à porter un projet de loi en ce sens. Le président du groupe, Christophe Castaner, est lui aussi favorable à l’euthanasie. Mais le chef de l’État n’en avait pas fait un engagement de campagne. Et quel sujet plus que celui-là mériterait un vrai débat national plutôt que d’être imposé à la va-vite en fin de législature ? Si Macron et Castex ne veulent pas ajouter cette transgression à la difficulté des temps, ils doivent le dire explicitement. Laisser faire le Parlement sans endosser la responsabilité ni d’un vote ni d’un rejet des textes, histoire de ne heurter aucune sensibilité, relèverait d’une forme d’hypocrisie. ■
Quel sujet plus que celui-là mériterait un vrai débat national plutôt que d’être imposé à la va-vite en fin de législature ?
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SANTÉ
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PSYCHO
DOSSIER
STOCK.ADOBE.COM
LE CANCER DEVIENDRA-T-IL UNE MALADIE CHRONIQUE COMME LES AUTRES ? PAGES 10 ET 11
COMMENT CERNER VOTRE PERSONNALITÉ AU TRAVAIL PAGE 12
santé
Le poids de naissance a un impact sur la santé de l’adulte
ANNE PRIGENT £@AnnePrigent1
PÉDIATRIE Pendant longtemps, on a pensé que les maladies cardiovasculaires et métaboliques résultaient de l’interaction entre le comportement d’un individu et son patrimoine génétique. Mais des données récentes indiquent que la grossesse est déjà une étape cruciale pour la santé cardiovasculaire de l’adulte en devenir. On sait depuis toujours que la grossesse et le début de la vie sont « une période de croissance fulgurante : le fœtus triple son poids entre 6 et 9 mois de grossesse, et le poids triple à nouveau entre la naissance et 1 an, rappelle le Pr Dominique Darmaun, pédiatre au CHU de Nantes. Mais il a fallu attendre le début des années 1990 et les travaux de David Barker pour s’intéresser à ce qui se passe in utero et découvrir que la croissance du fœtus avait des effets tout au long de la vie. » Le Pr David Barker a en effet établi un lien entre un faible poids de naissance (en dessous de 2,5 kg à terme)
et les décès par maladies cardiovasculaires. Pour ce faire, le médecin et épidémiologiste britannique a comparé les registres de décès à l’âge adulte aux poids de naissance soigneusement notés par les sagesfemmes anglaises dès le début du XXe siècle. « Depuis, les études ont montré que ce sont à la fois les bébés de faible poids et ceux de gros poids de naissance (plus de 4 kg) qui sont les plus à risque de devenir obèses et de développer des maladies cardiovasculaires, dont le diabète à l’âge adulte », précise le Pr JeanJacques Altmann, diabétologue à l’Hôpital européen Georges-Pompidou (Paris). Ces observations ont abouti au concept de l’« origine développementale de la santé et des maladies » (en anglais, « developmental origins of health and disease », ou DOHaD), ou « programmation fœtale ». « Le terme de programmation me semble inapproprié, car il sous-entend un caractère inéluctable. Or, il s’agit plutôt d’une prédisposition accrue aux maladies cardiovasculaires », tempère le Pr Dominique Darmaun.
RAMONA HEIM/STOCK.ADOBE.COM
Trop faible ou trop élevé, il est un facteur de risque de futures maladies cardiovasculaires.
Selon certaines études, le surpoids ou l’obésité de la maman jouerait un rôle plus important que le diabète gestationnel. Or la fréquence du surpoids et de l’obésité de la mère sont en augmentation
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PR DELPHINE MITANCHEZ, PÉDIATRE AU CHU DE TOURS
Qui sont les bébés concernés ? Hormis les enfants nés prématurés, dans certains cas, le faible poids de naissance est lié à un retard de croissance intra-utérin (RCIU). Cette pathologie méconnue du grand public concernerait environ 50 000 naissances par an en France. Elle est le plus souvent provoquée par des altérations de la vascularisation et de la fonction placentaire due à la prééclampsie, mais une dénutrition maternelle, quelle qu’en soit la cause (malabsorption, maladie inflammatoire chronique, etc.) a les mêmes conséquences.
Modifications épigénétiques
Les gros bébés sont plutôt observés chez les mères diabétiques ou présentant un diabète gestationnel, c’est-à-dire un diabète se développant au cours de la grossesse. « Selon certaines études, le surpoids ou l’obésité de la maman jouerait un rôle plus important que le diabète gestationnel. Or la fréquence du surpoids et de l’obésité de la mère sont en augmentation », précise cependant la
Pr Delphine Mitanchez, pédiatre au CHU de Tours. Cette influence du poids de naissance sur le capital santé des nourrissons et des adultes qu’ils deviendront trouve son explication dans des modifications épigénétiques induites par l’altération du milieu intra-utérin, par exemple par des modifications des nutriments apportés au fœtus lors de périodes « sensibles » du développement. Il s’agit de modifications non de la séquence ADN des gènes, mais de son « emballage », par exemple par l’attachement de radicaux méthyles sur des promoteurs de gènes, qui vont modifier l’expression de ceux-ci et augmenter le risque d’apparition de maladies plus tard dans la vie. D’autres mécanismes sont également en jeu. « Il est par exemple établi que le retard de croissance intrautérin a un impact sur la croissance des organes, explique le Pr Darmaun. Le fait d’avoir une croissance ralentie par dénutrition du fœtus diminue le nombre de cellules béta du pancréas qui sécrètent l’insuline, et cela pourrait ainsi favoriser la survenue ulté-
rieure d’un diabète. Même chose pour le rein, qui aura moins de néphrons (unité fonctionnelle du rein, NDLR) à la naissance. La taille du rein plus petite est un facteur de risque d’hypertension. » Même si bien des mécanismes restent à éclaircir, la programmation fœtale est une réalité. Un constat qui peut alarmer : un enfant né avec un faible poids de naissance est-il « condamné » au diabète à l’âge adulte ? Non, rassurent les spécialistes. « On considère que la période des 1 000 jours (qui vont de la conception aux 2 ans de l’enfant, NDLR) est une fenêtre à risque, mais aussi une fenêtre d’opportunité pour inverser les choses. Et notamment par des mesures de nutrition précoce. Ce qui ressort dans un certain nombre de publications scientifiques, c’est le bénéfice de l’allaitement maternel », affirme la Dr Delphine Mitanchez. Enfin, si le poids de naissance est un facteur de risque, le mode de vie et l’alimentation de l’enfant puis de l’adulte permettent de prévenir l’apparition de ces pathologies. ■
COMMUNIQUÉ
Prostate et troubles urinaires, que faire ?
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Vos trajets en voiture sont systématiquement entrecoupés de « pauses techniques », vous vous relevez plusieurs fois la nuit, votre vessie ne vous semble jamais tout à fait vide…
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La prostate est une petite glande située sous la vessie, qui entoure le conduit de sortie de l’urine appelé urètre. A partir de 50 ans, le volume de la prostate augmente, et même si cette croissance est un processus normal lié au vieillissement, elle entraîne souvent des conséquences désagréables lorsque la prostate appuie sur la vessie ou l’urètre. Le débit à l’intérieur de l’urètre est réduit tandis que la pression dans la vessie augmente. Il en résulte des difcultés à uriner, l’apparition d’envies fréquentes ou encore une sensation de vidange incomplète de la vessie.
La découverte d’un spécialiste américain En 1997, le Dr. Ronald Wheeler, médecin et chirurgien urologue, dépose un brevet pour une formule naturelle à base d’extraits végétaux concentrés (Pygeum africanum, Courge, Serenoa repens), de vitamines et de minéraux capables d’agir sur le gonement de la prostate et de réguler l’activité hormonale : ProstaSécurA. Il soumet ensuite sa formule à des études an de conrmer son efcacité. Les résultats sont excellents*, notamment sur le sou-
lagement des troubles urinaires (grâce à l’extrait de Pygeum africanum). ProstaSécurA agit sur l’ensemble des causes du gonement de la prostate. Il est conseillé depuis plus de 20 ans à travers le monde avec beaucoup de succès. *Etudes Dr Wheeler, 2005-2007
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Quelque chose appuie sur votre vessie
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DOSSIER SANTÉ
Le cancer deviendra-t-il une maladie chronique comme les autres ? Les progrès des traitements permettent de vivre non seulement après mais aussi bien plus longtemps « avec » le cancer. Un nouveau paradigme que les patients peinent à intégrer… PAULINE LÉNA
ONCOLOGIE « Désormais, on peut prolonger la vie des patientes pendant de très longues années avec une qualité de vie acceptable, indique la Pr Céline Chauleur, chef du service de gynécologie obstétrique du CHU de Saint-Étienne. Parler de chronicité me semble ainsi très juste lorsqu’on évoque le cancer de l’ovaire, par exemple. » Le cancer, une maladie chronique ? L’OMS le place effectivement dans cette liste, à côté des maladies cardiovasculaires, des affections respiratoires chroniques, du diabète ou de la déficience visuelle ou auditive. Et de nouveaux traitements dessinent, de plus en plus souvent, une troisième voie entre rémission et décès… Pour les malades, pourtant, difficile de comparer l’annonce d’une hypertension artérielle ou d’un diabète - qui, bien contrôlés, ne changent pas essentiellement le cours de la vie - à un diagnostic de cancer qui bouleverse systématiquement le parcours de chaque patient, même pour les cancers de bon pronostic comme celui du sein ou la prostate… « Leur offrir une maladie chronique ne les convainc pas, rappelait ainsi Marie-Frédérique Bacqué, professeur de psychopathologie à l’université de Strasbourg dans un numéro spécial de Psychooncologie consacré à cette question, en 2019. Le changement de vocabulaire ne laisse personne dupe. » Car, pour véritablement faire passer le cancer dans la catégorie des maladies chroniques, il faudra revoir l’organisation des soins, qui, pour l’instant, ne permet pas d’intégrer correctement cette nouvelle prise en charge au long cours. Les derniers plans cancer insistaient ainsi déjà sur l’idée de vivre après le cancer, intégrant le fait que les progrès thérapeutiques permettent de guérir de nombreux patients, mais que les traitements n’étaient qu’une étape dans leur vie, durablement impactée par la maladie. Ce concept repose sur toute l’histoire du combat contre le cancer, qui doit être complètement éliminé de l’organisme pour être considéré comme « guéri ». Désormais, les thérapies ciblées et l’immunothérapie rebattent les cartes en imposant peu à peu une notion inimaginable jusqu’ici : il
parcours sinusoïdal, avec des moments où ils vont bien et des moments où ils rechutent et doivent prendre de nouveaux traitements. « Ils doivent refaire la bataille, et c’est plus difficile à chaque fois, car ils l’ont déjà vécue. » Il faut également apprivoiser l’attente sans cesse répétée d’une nouvelle mauvaise nouvelle. Par ailleurs, de nombreux traitements se prennent désormais par voie orale, à la maison, pendant des années, bien loin de l’hôpital et de l’attention permanente des soignants. « La prise en charge reste trop centrée autour de l’hôpital, on nous le reproche beaucoup, mais il n’existe pas encore de maillage suffisant en ville », regrette le Pr Alain Ravaud, chef du service d’oncologie médicale du CHU de Bordeaux. « Il faut élargir : dans le libéral, de nouveaux métiers, comme les infirmières de coordination ou de suivi, pourront accompagner des patients
s’agit non plus de vivre « après », mais « avec » le cancer. Des cancers réputés incurables, comme celui du rein ou le mélanome, peuvent ainsi être stabilisés à un stade métastatique sans symptômes pendant de nombreuses années. Pour les cancers les plus sensibles à l’immunothérapie, 5 % à 10 % des patients peuvent même aller jusqu’à la rémission complète ! Mais, pour le patient, le discours reste en partie inaudible. « Même si c’est très motivant pour nous de savoir qu’on peut proposer des traitements qui prolongent vraiment la vie en bonne santé, c’est très difficile pour les patients d’entendre qu’un cancer est chronique », souligne la Pr Mireille Mousseau, responsable du service d’oncologie médicale du CHU de Grenoble. « Pour eux, on va les opérer, leur faire de la chimiothérapie, de la radiothérapie, et ce sera terminé. Là, ils n’en voient pas le bout. » Il faut donc les préparer à un
Illustration en 3D montrant des leucocytes attaquant une cellule cancéreuse. SCIEPRO/STOCK.ADOBE.COM
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métastases osseuses et cérébrales que l’on ne voyait que rarement lorsque les patients mouraient avant leur apparition. Même si le terme est encore sans doute peu adapté au ressenti des patients et au contexte historique de la lutte contre ces pathologies, la prise en charge du cancer est effectivement entrée dans l’ère de la chronicité, avec de nouveaux modes de diagnostic, de nouveaux lieux de traitement et de suivi. Un nouveau concept qui conduira, à terme, à modifier la perception même de la maladie pour que la société s’y adapte : la notion même, récemment et durement acquise, de droit à l’oubli dix ans après le traitement du cancer, pourrait ainsi bientôt devenir déjà obsolète avec ces cancers qui, certes, ne « guérissent » pas, mais avec lesquels on peut coexister plus ou moins pacifiquement durant de nombreuses années. ■
La prise en charge du cancer évolue positivement Survie nette standardisée (en %) selon l’année de diagnostic Cancer diagnostiqué en...
... 1990
... 2010
... 2015
CANCER DU POUMON
CANCER COLORECTAL
CANCER DU SEIN
79 % 53 %
12 %
19 % 22 %
Survie à 5 ans
8%
64 % 65 % 47 %
89 % 89 %
CANCER DE LA PROSTATE
95 % 92 %
82 %
92 %
71 %
70 %
59 %
57 %
14 % ND
Survie à 10 ans
ND Survie à 5 ans
Survie à 10 ans
ND Survie à 5 ans
Survie à 10 ans
Source : Institut national du Cancer
cependant annoncer une analyse plus « utile » des prélèvements sanguins et des résultats plus fiables.
Séances de jeux avec un chien dépisteur
D’autres approches sont à l’étude pour atteindre le graal du test de dépistage du cancer. Il s’agit toujours de détecter la pathologie le plus tôt possible dans son développement : quel que soit le cancer, le traitement est plus efficace s’il est mis en place précocement. Il est essentiel aussi que le test soit facile à mettre en œuvre et non invasif pour en permettre l’utilisation comme dépistage de masse : plus on teste largement, plus grandes sont les chances d’identifier les personnes concernées. De nombreuses équipes s’attachent à identifier des marqueurs biologiques spécifiques d’au moins un type de cancer. Une équipe niçoise a ainsi publié, en 2020, une revue de tous les biomarqueurs sanguins des cancers bronchiques capables d’orienter
ND Survie à 5 ans
Survie à 10 ans Infographie
Intelligence artificielle et test sanguin pour un dépistage plus précoce DÉTECTER et localiser plus de 50 types de cancers à partir d’une simple analyse de sang ? C’est la promesse faite en avril dernier par une étude de la Mayo Clinic parue dans Annals of Oncology. Si les spécialistes ont rapidement souligné la mauvaise fiabilité du test, qui donnerait trop de faux positifs (diagnostics de cancer alors qu’il n’y a pas de cancer), cette étude annonce cependant l’arrivée dans quelques années de tests de dépistage sanguin précoce pour les cancers les plus fréquents. L’idée : isoler et identifier l’ADN spécifique des cellules cancéreuses, qui circule dans le sang du patient dès leur apparition, donc bien avant que le cancer ne fasse des dégâts. Cette approche est à l’essai depuis de nombreuses années, mais elle a toujours été mise en échec par son manque de sensibilité (il faut trouver l’ADN tumoral dans le sang) et de spécificité (il faut identifier de quelles cellules cet ADN provient). Les capacités de calcul accrues de l’intelligence artificielle semblent
de plus en plus nombreux. » D’autant que les effets secondaires, lorsqu’ils ne sont pas bien pris en charge, conduisent à de nombreux abandons de traitement. Un suivi hebdomadaire en plus des rendezvous tous les trois ou quatre mois de surveillance à l’hôpital semble donc indispensable pour aider les patients à bénéficier vraiment de ces années gagnées grâce aux nouvelles thérapies. Il faudra également sans doute revoir l’organisation du remboursement, car, pour de nombreux patients, l’accès à ces soins de suite et de suivi est difficile en libéral, où se pratique communément le dépassement d’honoraires, et inefficace à l’hôpital, où les délais sont prohibitifs. Les services d’oncologie, complètement redessinés pour des traitements majoritairement réalisés en ambulatoire, devront par ailleurs encore se modifier pour accueillir des patients atteints de
le diagnostic lorsque l’imagerie ne permet pas d’identifier la zone tumorale. Dans le cancer de la prostate, c’est un examen d’urine qui pourrait identifier plus rapidement la présence d’une tumeur : comment imaginer un test moins invasif ? D’autres chercheurs sont allés plus loin : des travaux de l’Institut Curie présentés en 2017 indiquent que des chiens ont détecté, avec 90 % de sensibilité, un cancer du sein chez des patients dont ils ont simplement reniflé l’haleine ! Voilà de quoi imaginer le dépistage de masse le plus agréable qui soit : des séances de jeux et câlins, une fois tous les deux ans, avec un chien dépisteur… Restera cependant à progresser sur le risque de surdiagnostic, et donc de surtraitement : on sait désormais que certains cancers n’évoluent pas, ou si lentement qu’ils n’ont pas le temps de sévir. Mais on peine encore à faire le tri entre ces derniers et ceux qu’il faut impérativement prendre en charge. ■ P. L.
Cancers du sang : des avancée presque normale, avec ou san Même si c’est très motivant pour nous de savoir qu’on peut proposer des traitements qui prolongent vraiment la vie en bonne santé, c’est très difficile pour les patients d’entendre qu’un cancer est chronique PR MIREILLE MOUSSEAU, RESPONSABLE DU SERVICE D’ONCOLOGIE MÉDICALE DU CHU DE GRENOBLE
»
LA NOTION de cancer chronique existe depuis longtemps pour certains cancers du sang et de la moelle osseuse, en particulier lorsqu’ils apparaissent après 65 ans. Leucémies, lymphomes et myélomes, chez l’adulte, sont en effet souvent des cancers d’évolution très lente, qui peuvent rester sans traitement chez un très grand nombre de patients. Pour les autres, l’arrivée de thérapies ciblées a changé la donne en leur offrant une véritable chance de guérison ou de rémission longue. Le myélome multiple se développe à partir des cellules à l’origine des cellules sanguines et peut rester sans symptômes pendant de nombreuses années. Les formes dites « indolentes », d’évolution particulièrement lente, peuvent également être qualifiées de chronique sans nécessiter de traitement pendant de très nombreuses années. Leucémie lymphoïde chronique (LLC) et leucémie myéloïde chronique (LMC) sont plus fréquentes. Elles sont dues, comme toutes les leucémies, à la multiplication de cellules anormales, lymphocytes ou
cellules jeunes immatures. Les symptômes, fatigue et infections à répétition, n’apparaissent que tardivement dans l’évolution de la maladie lorsque les cellules anormales, trop nombreuses, empêchent celles qui restent de fonctionner correctement.
Un médicament à prendre par voie orale, chez soi
Le diagnostic est donc souvent fortuit, au moment d’une prise de sang réalisée pour une autre pathologie. Dans le cas de la leucémie lymphoïde chronique, une augmentation du volume de la rate, liée à une production trop importante de lymphocytes pour rester dans le sang et la moelle osseuse, peut être également découverte de manière fortuite lors d’un examen de l’abdomen pour une autre affection. En l’absence de symptômes, la prise en charge se résume à une surveillance accrue des cellules sanguines impliquées, tous les six mois à un an. Lorsque la maladie évolue vers des stades symptomatiques, chimiothérapies et thérapies ciblées
LE FIGARO
SANTÉ DOSSIER
SANTÉ LUDOVIC MARIN/POOL VIA REUTERS
»
EMMANUEL MACRON
LE 4 FÉVRIER, LORS DE LA PRÉSENTATION DU 4E PLAN CANCER
3,8
millions de Français en vie en 2017 ont eu un diagnostic de cancer au cours de leur existence (1,8 million d’hommes et 2 millions de femmes)
6,1
miliards d’euros en 2019 de dépenses hospitalières liées au diagnostic, au traitement et au suivi des cancers
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permettent, dans la majorité des cas, une rémission qui peut, pour certains patients, être définitive. En revanche, face à une leucémie myéloïde chronique qui touche des cellules sanguines au début de leur développement et peut donc altérer, à terme, toute la formule sanguine, des traitements sont aujourd’hui prescrits même dans les formes débutantes, lorsque moins de 6 % des cellules sont anormales. Il s’agit de ralentir l’évolution vers les formes plus graves qui menacent la vie des patients. Depuis quinze ans, cependant, de nouveaux traitements sont apparus, révolutionnant la prise en charge de cette maladie de mauvais pronostic : la majorité des patients peuvent vivre pratiquement normalement avec un médicament à prendre par voie orale, chez soi. La LMC est ainsi devenue l’image d’Épinal qu’évoquent de nombreux spécialistes pour le futur : un cancer connu, traité au long cours sans symptômes et avec peu d’effets secondaires, pour une vie presque normale. ■ P. L.
SOURCES DES CHIFFRES : SPF, RÉSEAU FRANCIM, HCL, INCA, 2019; PANORAMA DES CANCERS EN FRANCE, INCA, 2021
93 % chez la femme entre 1990 et 2018, 65 % chez l’homme
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Pourquoi le cannabis récréatif est plus dangereux à l’adolescence
La question de vivre longtemps avec les séquelles du cancer est une (…) dimension que nous devons mieux prendre en compte
de nouveaux cas de cancer
lundi 15 mars 2021
DROGUE Le cannabis à usage médical, qui bénéficie des dispositions d’autorisation temporaire d’utilisation et qui est testé dans le cadre de l’expérimentation programmée en 2021, ne doit pas être confondu avec le cannabis dit « récréatif » qui présente un risque de toxicité reconnu pour la santé, particulièrement chez les adolescents. La France est le plus grand consommateur d’Europe et la drogue, qui circule dès l’âge de 12 ans, a été expérimentée par la moitié des élèves de terminale. La France est aussi le pays d’Europe qui consomme le cannabis sous la forme la plus concentrée, dans une proportion de 70 % sous forme de résine seule ou associée à l’herbe, et seulement à hauteur de 30 % sous forme d’herbe ! Ce qui nous place largement en tête en matière de dangerosité devant les Pays-Bas, l’Italie et encore plus loin devant le Royaume-Uni… Il convient de préciser que cette résine de cannabis n’a plus rien à voir avec le « joint de Papy ». La culture de la plante a considérablement changé au cours des dernières décennies, augmentant sa teneur en principe actif, le tétrahydrocannabinol (THC), multipliée par trois en dix ans et par six en vingt-cinq ans. Cette toxicité accrue explique le nombre croissant et la gravité de ses effets indésirables chez tous les consommateurs, surtout les plus vulnérables, les adolescents. À la lumière des neurosciences, on sait que l’adolescence constitue dans la vie une période clé, mais aussi critique, avec une véritable « tempête sous le crâne » associée à de profonds bouleversements biologiques, susceptibles d’être perturbés par la
prise de cannabis au prorata de pacités intellectuelles, provosa concentration en THC. Répéquer des troubles mentaux et tons que cette consommation, créer une dépendance. En 2012, constatée dès la classe de 5e, pour la première fois, une étude de cohorte sur plus d’un millier s’accroît donc au cours d’une de sujets depuis l’âge de 3 ans période qui est celle de la matujusqu’à 38 ans, a démontré la ration cérébrale, de l’éducation, toxicité du cannabis chez l’homde la préparation à la vie adulte, me, en particulier chez les adodes choix professionnels et affeclescents : plus la tifs… Ainsi, au gré des consommation était apprentissages mais précoce, plus les trouaussi d’un besoin bles étaient imporaccru de nouvelles tants. Les adolescents expériences, la madéjà dépendants avant turité plus précoce l’âge de 18 ans n’arrides circuits de la révaient pas à décrocompense incite les cher ; leur risque adadolescents à condictif s’en trouvait sommer, alors même majoré, tandis que que les circuits aptes leur quotient intellecà freiner cette prise tuel (QI) chutait en de risques ne sont moyenne de huit pas achevés. PROFESSEUR points, comparativeOr le cerveau ne JEAN-PIERRE ment aux sujets ayant devient pas adulte GOULLÉ commencé à consomavant l’âge de 25 ans, ● Toxicologue, mer le cannabis seuled’où une pareille membre ment à l’âge adulte. vulnérabilité chez le Depuis, plusieurs jeune adulte. Les des académies études ont confirmé performances ranationales les effets délétères du diologiques actuelde pharmacie cannabis pendant cetles permettent de viet de médecine te phase de maturasualiser l’atteinte cétion cérébrale et une rébrale chez les adobaisse du QI conséculescents consomtive à une consommation frémateurs de cannabis. L’IRM réquente et dépendante. Or, paravèle ainsi une diminution du doxalement, alors que l’on volume du cortex préfrontal, la constate une diminution du nomzone justement impliquée dans la bre de consommateurs dans noplanification, la prise de décision tre pays, le niveau de dépendance et le contrôle de l’impulsivité, et et d’addiction ne cesse de proce d’autant que la consommation gresser chez les jeunes de 17 ans, a débuté précocement. passant de 18 % en 2011 à 22 % en Effets 2014, pour atteindre 25 % en délétères 2017. C’est à la puberté que l’orgaLes anomalies du développement nisme prépare le terrain pour la cérébral en cette période partiprocréation… et l’avenir de la culièrement vulnérable peuvent descendance. Or la qualité des affecter les facultés d’apprentisgamètes dépend aussi de l’exposage, altérer et diminuer les ca-
sition à des facteurs externes tant sensoriels et sociaux qu’environnementaux, comme la pollution, les perturbateurs endocriniens, mais aussi la consommation de produits toxiques, le cannabis en particulier.
Des « marques » par-dessus les gènes
Depuis l’avènement de l’épigénétique, nous ne pouvons plus ignorer que nous ne léguons pas à nos enfants que des gènes identiques à ceux hérités de nos parents. Cette nouvelle science nous oblige à ne plus nous réfugier derrière une fatalité génétique, mais à assumer que nous transmettons aussi notre vécu à notre descendance. La consommation d’un toxique comme le cannabis, outre qu’il traverse la barrière du placenta, appose des « marques » par-dessus (« epi » en grec) les gènes du parent qui en consomme, la mère comme le père, en modifiant leur expression au même titre que les perturbateurs endocriniens, par exemple. Contrairement aux mutations génétiques qui altèrent le génome lui-même, ces marques ne sont pas irréversibles. Mais elles peuvent être transmises d’une génération à l’autre, et ce de façon d’autant plus irrévocable que l’exposition aura été précoce. Le cannabis des parents risque d’hypothéquer la santé intellectuelle et mentale des enfants et leur conférer une plus grande tendance à l’addiction. C’est pourquoi, il est urgent de prendre des mesures de prévention ciblant les adolescents et les jeunes adultes en âge de procréer mais aussi, plus en amont, de sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge, avant la puberté. ■
Transplantation rénale : pour une politique ambitieuse et concrète GREFFE À l’occasion de la Semaine du rein, les patients et professionnels de santé impliqués dans la transplantation rénale interpellent l’ensemble des pouvoirs publics sur les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien et qui ont été aggravées par la crise sanitaire avec l’arrêt temporaire du programme de transplantation et la survenue, chez des patients atteints de maladies rénales, de formes graves, parfois mortelles, de Covid-19. Au-delà des disparités d’accès et d’activités avérées entre les régions performantes et celles qui le sont moins, la réalité est celle de difficultés d’organisation (notamment pour l’activité de prélèvement dans certaines régions), d’un manque de personnels soignants et de la nonaffectation du forfait greffe aux services de transplantation rénale. Tout cela est en grande partie responsable de la pénurie d’organes. Alors que la transplantation rénale est un enjeu de santé publique et une priorité de la Haute Autorité de santé (HAS), la France est loin des objectifs du plan greffe lancé en 2017 et qui s’achève cette année : 75 % seulement du nombre de transplantations fixé dans le plan (moins de 4 900 par an) sont réalisés, et seulement 50 % pour les transplantations à partir de donneur vivant. En outre, alors que le plan greffe arrive à échéance, nous n’avons pas de visibilité sur son renouvellement. Pour répondre à ces défis, une action collective est impérative, et nous appelons tous les acteurs à se mobiliser en faveur d’un objectif commun : la mise en œuvre d’une politique ambitieuse en matière de transplantation rénale, coconstruite avec tous les acteurs. Dans le livre blanc Cinq recommandations concrètes, une mobilisation collective au service des patients,
nous identifions des recommandations d’actions sur lesquelles cette politique pourrait s’appuyer pour faire bouger les lignes.
Étoffer les coordinations de prélèvement
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PROFESSEUR MARYVONNE HOURMANT PROFESSEUR BRUNO MOULIN PROFESSEUR GILLES BLANCHO PROFESSEUR GEORGES FOURNIER ALAIN TROUILLET PROFESSEURS JEAN-LOUIS TOURAINE, AGNÈS FIRMIN LE BODO, HERVÉ SAULIGNAC*
Le renforcement des coordinations de prélèvement au sein des hôpitaux préleveurs et un meilleur maillage territorial permettant d’englober tous les services en lien avec les situations d’urgence, permettraient de développer le nombre des prélèvements. Cela passe a minima par un meilleur fléchage des moyens financiers disponibles et une augmentation des moyens humains.
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Développer la transplantation avec donneur vivant
Elle constitue une réponse à la pénurie d’organes. Son essor passe nécessairement par un renforcement des équipes et par le développement du don croisé. La transplantation avec donneur vivant pourrait aussi constituer un indicateur d’évaluation des centres. L’information aux patients atteints de maladie rénale chronique sévère sur cette possibilité doit être faite le plus tôt possible. L’information des donneurs potentiels et leur suivi médico-social doivent également être développés et renforcés.
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Réduire les disparités d’accès à la liste d’attente
Bien que la HAS ait publié des
recommandations pour l’inscription des patients sur la liste d’attente en 2017, il persiste des disparités liées à l’âge et au statut diabétique. Certaines régions ont aussi une population plus importante de patients en grande précarité qui nécessiteraient une prise en charge spécifique. Certaines régions sont clairement plus efficaces en matière d’inscription, de prélèvement et de transplantation. Nous proposons qu’y soient réalisés des audits afin d’établir un modèle reproductible dans les régions les moins dynamiques.
Améliorer la qualité de vie des patients greffés et des donneurs vivants
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La qualité de vie des patients doit devenir un élément d’évaluation de la transplantation. Son amélioration implique de développer la coordination entre professionnels de santé et de recourir davantage aux infirmiers de pratiques avancées. Les nouveaux outils, par exemple la télésurveillance et la téléconsultation, constituent des pistes intéressantes. Le rôle des associations de patients est fondamental sur ce sujet.
la recherche u Soutenir La recherche doit permettre
d’apporter de nouveaux outils diagnostiques et thérapeutiques pour allonger la durée de vie des greffons. Dans un futur plus lointain, de véritables substituts aux organes
transplantés devront être conçus. Le développement de l’intelligence artificielle dans le domaine de la transplantation devrait améliorer les stratégies diagnostiques et thérapeutiques. La mise en œuvre de ces recommandations ne suppose aucun investissement coûteux. Le coût du traitement par transplantation étant 5 à 10 fois inférieur à celui de la dialyse, améliorer le système existant en le rendant opérationnel permettrait de générer d’importantes économies, jusqu’à 8,5 milliards d’euros, cumulées sur cinq ans, selon la Fondation Greffe de vie. Les signataires de cette tribune en appellent à l’ensemble des pouvoirs publics pour utiliser cette contribution comme le point de départ d’une mobilisation générale de tous les acteurs impliqués dans la transplantation rénale en France. Agissons vite pour les patients. * Pr Hourmant : cheffe du service de néphrologie-immunologie clinique au CHU de Nantes, présidente de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation. Pr Moulin : chef de service de néphrologie-transplantation aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, vice-président de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation. Pr Blancho : directeur de l’Institut de transplantation urologienéphrologie, président de la Société francophone de transplantation. Pr Fournier : président de l’Association française d’urologie. M. Trouillet : président de France Rein. Pr Touraine : député du Rhône, président de France Transplant. Mme Firmin Le Bodo : députée de Seine-Maritime. M. Saulignac : député de l’Ardèche.
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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SANTÉ
Comment cerner votre personnalité au travail NATHALIE SZAPIRO-MANOUKIAN
PSYCHO Certains postes nécessitent une bonne gestion de son stress, une prise d’initiatives, et la capacité à résister à des pics d’activité intense. D’autres requièrent un niveau d’activité plus posé et/ ou le suivi de procédures claires. D’autres encore nécessitent de savoir innover, organiser, etc. « Un même candidat ne peut pas convenir à des postes aussi différents. Ces tests ont donc pour objectif de placer le bon candidat au bon poste afin que recruteurs et candidats soient tous deux gagnants », explique Estelle Malvy, psychologue, qui a longtemps exercé dans les ressources humaines avant de rejoindre les centres Cogito’z, entre autres dédiés à la construction d’un projet professionnel et/ou de reconversion. Les tests Sosie et Neo Pi-R sont les deux tests les plus utilisés par les psychologues d’entreprises. Le test de personnalité Sosie comporte 98 groupes de 3 à 4 affirmations et sert à identifier les valeurs développées dans le travail. Le candidat doit choisir, pour chaque groupe, l’affirmation qui lui correspond le plus et celle qui lui correspond le
moins. Il en ressort des traits de personnalité (comme la sociabilité, la curiosité, la persévérance…), des valeurs (challenge personnel, organisation…) et des styles de comportements qui vont servir de base d’échange avec le psychologue. De son côté, le Neo Pi-R analyse la personnalité via des auto-questionnaires avec des propositions pour lesquelles il faut indiquer un degré d’accord sur une échelle. Les résultats servent aussi de support à l’échange. « Les résultats ne sont jamais discriminants et, d’ailleurs, bien d’autres critères entrent en compte dans le choix d’un candidat, à commencer par ses compétences, son expérience, le contact, le type de poste, etc. », rassure Estelle Malvy. Même si ces tests sont réalisés pour la bonne cause, en pratique, pour les candidats à l’embauche, ils représentent souvent une source de stress supplémentaire. C’est pourquoi le psychologue commence toujours par les mettre à l’aise, en expliquant qu’ils doivent voir ces tests comme une opportunité de mieux connaître leurs points forts et leur manière de travailler, que tout va se passer sous la forme d’un échange et qu’ils pour-
ESTELLE MALVY
Sélectionner le meilleur candidat, affiner ses choix professionnels… Des tests psychologiques dédiés ambitionnent de vous y aider.
Le plus important est que les candidats restent le plus sincère possible dans leurs réponses. Adapter ses réponses pour donner la meilleure image de soi est exactement ce qu’il ne faut pas faire
»
ESTELLE MALVY, PSYCHOLOGUE
ront d’ailleurs nuancer s’ils ne se reconnaissent pas dans certains résultats. Après avoir rempli le questionnaire d’un test, ce qui prend 30-40 minutes, chaque candidat s’entretient dans la foulée avec le psychologue : ce retour est obligatoire sur le plan légal. « Le plus important est que les candidats restent le plus sincère possible dans leurs réponses, insiste Estelle Malvy. Adapter ses réponses pour donner la meilleure image de soi est exactement ce qu’il ne faut pas faire ! Déjà, cela va se voir au travers des réponses et c’est ce que les psychologues appellent “l’effet de désirabilité sociale”. Ensuite, cela n’a guère d’intérêt pour le candidat car si, au final, le poste ne lui correspond pas, sa période d’essai se soldera par un échec. Il ne sera pas gardé et risque d’en souffrir alors qu’il aurait été parfait pour un autre poste. » Contrairement aux tests que l’on trouve sur internet et qui n’ont jamais été validés, ces tests utilisés par les psychologues (et uniquement accessibles à ces derniers)
ont fait l’objet d’études pour en valider les résultats. « Ils n’ont rien à voir avec les tests de logique ou de raisonnement parfois proposés sur des postes nécessitant ces qualités. Ils n’ont rien à voir non plus avec les mises en situation ou jeux de rôle qui, s’ils sont utilisés par l’entreprise, doivent être annoncés au préalable », insiste Estelle Malvy.
« Bénéficier du regard extérieur d’un tiers »
Mais au-delà du test à l’embauche, on peut avoir besoin d’être guidé pour trouver sa voie avant de chercher un emploi, changer d’entreprise ou même de profession. « Le bilan de compétences, que chacun peut faire de sa propre initiative (il fait partie des formations prises en charge au titre du Compte personnel de formation), aide à prendre conscience de ses envies, de ses motivations et de ses ressources. Bénéficier du regard extérieur d’un tiers est utile, car l’expérience montre que l’on n’a pas forcément conscience de ce que l’on fait bien. Or pour accrocher un re-
cruteur potentiel, il faut arriver à dire qui l’on est et de quoi l’on est capable ! », plaide Élodie Antoni, psychologue du travail, consultante et enseignante dans l’enseignement supérieur. Pour le savoir, outre des tests psychologiques, le psychologue peut s’appuyer sur des tests d’intérêts professionnels. « Ce sont des tests dans lesquels il faut classer par préférence spontanée différentes activités de loisirs, des verbes d’action ou des métiers, afin de faire émerger ses goûts. Car identifier ce que l’on aime faire n’est pas si facile », note Élodie Antoni. Le psychologue est aussi amené à faire parler de soi : ses envies, ses loisirs, ses expériences (même si elles touchent d’autres domaines) donnent un premier aperçu. Recueillir le point de vue de l’entourage, avec l’accord de l’intéressé, peut permettre d’en apprendre davantage. « L’idée est d’arriver à se définir le plus précisément possible par rapport à un futur poste convoité », conclut la psychologue du travail. ■
Les « Radium girls », lumineuses à en mourir
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SOLINE ROY £@so_sroy
LE 10 avril 1917, Grace Fryer franchi les portes de l’US Radium Corporation, dans le New Jersey, elle a de quoi se réjouir : la jeune femme de 18 ans vient de trouver un travail facile, très bien payé et utile à son pays. Elle ignore qu’avant de la tuer seize ans plus tard il fera d’elle un symbole de la lutte pour le droit à la sécurité des travailleurs américains… Sa mission : tracer sur des cadrans de montre des chiffres qui luiront dans l’obscurité, grâce au radium contenu dans la peinture. Grace et ses collègues répètent inlassablement les mêmes gestes : après avoir mélangé les ingrédients de la peinture, elles y plongent leur pinceau, tracent les chiffres. Et, régulièrement, passent le pinceau entre leurs lèvres pour en affiner la pointe… Les dangers de l’élément découvert en 1898 par Pierre et Marie Curie sont connus des scientifiques, mais, aux jeunes femmes on a assuré que le geste était sans risque. Et pourquoi s’inquiéter d’une substance en vogue quand dentifrices, crèmes de beauté et autres eaux enrichies promettent mille merveilles à qui les achète ? Les ouvrières s’amusent de cette peinture qui brille dans le noir , en ornent leurs ongles, leurs dents, et leurs robes attirent l’œil, parsemées d’étoiles de radium. En décembre 1925 dans le Journal of the American Medical Association (Jama), Harrison Martland, médecin légiste et chef du service médical du comté d’Essex (New Jersey), fait le calcul : à raison de 250 cadrans peints par jour, avec 1 à 14 passages du pinceau entre les lèvres par cadran, une ouvrière peut avaler de 3 à 43 microgrammes de substances radioactives par jour. « Ces opérateurs ont (…) pu ingérer de plus grandes quantités d’éléments radioactifs qu’il a jamais été donné à visée thérapeutique. » Elles ne tardent pas à en payer le prix.
En 1922, une première ouvrière meurt ; la radioactivité n’est pas évoquée mais l’exhumation du corps, cinq ans plus tard, sera sans équivoque. Grace Fryer a quitté l’usine en 1920 mais elle commence à perdre des dents et développe de douloureuses infections de la mâchoire. Sur les radiographies, celle-ci semble « mangée par des mites », écrivent en 2015 dans Radiology deux chercheurs de l’université d’Indiana. Le Dr Theodore Blum, dentiste à New York, sera le premier à décrire, en 1923 devant l’American Society of Oral Surgeons and Exodontists, « un cas d’ostéomyélite de la mandibule et du maxillaire assez semblable à la nécrose phosphorique », clairement imputable au radium. Deux ans plus tard, le statisticien Frederick Hoffman résume dans le Jama les enseignements tirés de 12 cas, dont 4 décès. « L’aspect le plus sinistre (…) est que la maladie est apparemment latente pendant plusieurs années avant de manifester ses tendances destructrices de l’os
HISTOIRES DE MÉDECINE
de la mâchoire et des dents ». En 1929, toujours dans le Jama, Martland dénombre 15 décès où l’empoisonnement est « fortement suspecté », 5 pour lesquels il est prouvé. L’US Radium Corporation lutte pied à pied. Professeur d’hygiène industrielle à l’université Columbia, Frederick Flinn publie trois rapports qui nient avec constance la responsabilité du radium. Il évoque la syphilis, discréditant des jeunes femmes dont beaucoup sont célibataires, et note qu’aucun cas n’a été re-
Dans l’atelier de l’US Radium Corporation, dans le New Jersey (États-unis), vers 1922.
censé en Europe… sans préciser que les ouvrières n’y utilisent pas de pinceau, donc n’ingèrent pas la substance. Il s’avérera que Flinn était rétribué par l’US Radium… Celle-ci mandate aussi Cecil Drinker, professeur à l’École de santé publique de Harvard. Il visite l’usine et constate que les poussières de radium sont partout présentes. « Les cheveux, visages, mains, bras, cous, robes, sous-vêtements, et même les corsets des peintres de cadran étaient lumineux », écrit-il, notant des anomalies sanguines chez certains employés et des nécroses aux mains d’au moins un chimiste. Mais l’US Radium transmet aux autorités une version édulcorée du rapport. À Harvard, la Pr Alice Hamilton alerte Arthur Roeder, président de l’US Radium, « dit à tout le monde qu’il est absolument en sécurité parce qu’il a un rapport de vous l’exonérant de toute responsabilité éventuelle dans la maladie des filles, mais maintenant il semble qu’il soit allé encore plus loin. Le ministère du Tra-
DOMAINE PUBLIC/WIKIMEDIA COMMONS
vail du New Jersey a une copie de votre rapport et il montre que “chaque fille est en parfait état”. Pensez-vous que Roeder puisse faire quelque chose comme publier un faux rapport en votre nom ? », écritelle. Furieux, les Drinker publient l’intégralité de leur rapport dans le Journal of Industrial Hygiene.
« Une damnée parodie de justice »
Grace Fryer mettra deux ans à trouver un avocat et convaincra quatre autres victimes de porter plainte à ses côtés. En janvier 1928, un juge repousse l’audience de plusieurs mois à la demande de la firme. La presse prend le parti des jeunes femmes. « C’est une damnée parodie de justice. Il n’y a aucune excuse possible pour un tel retard. Ces femmes sont en train de mourir », s’insurge un éditorialiste. Devant le tollé, une audience est fixée en juin, mais l’US Radium propose un arrangement à l’amiable : les plaignantes réclamaient 250 000 dollars chacune, elles en auront 10 000, plus 600 par an jusqu’à leur mort et la prise en charge de leurs frais médicaux. L’US Radium persiste à nier sa responsabilité. Le 18 juin 1928, rapporte Richard Rowland du Argonne National Laboratory dans un rapport rédigé en 1994, le président de la firme écrit au commissaire à la Santé publique de la ville de New York que sa société a joué de malchance : elle qui a eu la générosité d’embaucher des gens de trop faible constitution pour travailler ailleurs, se voit bien mal récompensée lorsque tous les maux dont ils souffrent sont « attribués par le grand public à un “empoisonnement au radium” ». L’usine a fermé en 1926, mais d’autres fonctionnent ailleurs, notamment dans l’Illinois. Il faudra attendre encore des années pour que la peinture au radium soit enfin interdite, et l’on estime que 4 000 jeunes Américaines l’ont utilisée pour peindre des cadrans de montre. ■
LE FIGARO
lundi 15 mars 2021
SOCIÉTÉ
À Aix, magistrats et avocats en guerre L’expulsion d’un avocat par des policiers lors d’une audience suscite de vives réactions de la profession. PAULE GONZALÈS £@paulegonzales
JUSTICE Hurlements, confusion et robes noires bousculées au tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence. Il s’y jugeait jeudi et vendredi une très grosse affaire de stupéfiants avec onze prévenus défendus par les ténors des barreaux niçois et aixois. Avocats et magistrats s’y sont brutalement affrontés et l’affaire laissera des traces de chaque côté de la barre. Parmi les premiers, Paul Sollacaro, un habitué du grand banditisme et de la défense de rupture. Face à lui, le président Marc Rivet, magistrat chevronné, ancien parquetier de juridiction interrégionale spécialisée, compétente pour les affaires complexes de criminalité organisée. Dès le début de l’audience, les protagonistes s’affrontent brutalement. Me Sollacaro demande pour son client, absent pour cause de Covid, la disjonction du dossier, c’est-à-dire la possibilité d’être jugé seul et plus tard. La formation de jugement, avec l’accord du parquet dans un premier
temps, refuse la demande. Les magistrats savent qu’il s’agit d’une technique classique de défense permettant d’éviter les confrontations entre prévenus. Selon la jurisprudence de la Cour européenne, même sans pouvoir, Me Paul Sollacaro pourrait défendre son client en son absence. Une impossibilité déontologique catégorique pour les avocats, qui ne conçoivent pas l’absence des prévenus à leur procès, surtout quand ils encourent de lourdes peines. L’avocat est donc face à une double injonction contradictoire : aller chercher pour le défendre son client, qui, contaminé par le Covid, ne pourra paraître à l’audience.
« Invectives et attaques personnelles virulentes »
Le ton monte, les invectives et les noms d’oiseaux fusent entre les deux hommes. La tension entre les magistrats et les avocats est telle que le président Rivet en appelle aux forces de l’ordre, qui sortent Me Paul Sollacaro manu militari. Il décide ensuite de continuer le procès coûte que coûte, cette fois-ci
Vendredi, des avocats manifestent devant le tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence, au lendemain de l’expulsion d’un de leurs confrères par des policiers à la demande d’un juge. CLEMENT MAHOUDEAU/AFP
rapport « deLe force
visant à fédérer une profession contre l’autre est étranger à toute idée de justice
»
RENAUD LE BRETON DE VANNOISE, PREMIER PRÉSIDENT DU TRIBUNAL D’AIX-EN-PROVENCE
dredi soir le fait que Paul Sollacaro « s’en est vivement pris au président en proférant à son encontre des invectives et attaques personnelles virulentes . » Et de rappeler que « le rapport de force visant à fédérer une profession contre l’autre est étranger à toute idée de justice. » Dans le sien, le Conseil national des barreaux (CNB) reprochera au président d’audience d’avoir « tenu des propos inadmissibles à l’encontre des avocats » et d’avoir « manifesté
contre l’avis d’Achille Kiriakides, le procureur monté à l’audience. Les autres avocats, solidaires de leur confrère évincé, quittent le prétoire et des commissions d’office sont proposées pour les prévenus qui le souhaitent. L’audience est suspendue. Dans un communiqué, Renaud Le Breton de Vannoise, le premier président d’Aix-en-Provence, garant de l’indépendance de ses collègues magistrats, a dénoncé ven-
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un mépris à l’encontre de la profession d’avocat et des règles à suivre pour un procès équitable. » De son côté, le bâtonnier d’Aixen-Provence, Philippe Bruzzo, a dénoncé « une première inadmissible ! ». « Dans ce cas de figure, le renvoi et la disjonction sont toujours accordés. Quant à oser toucher physiquement à l’avocat, jamais, même pendant les procès de Riom, cela ne s’est produit. » Furieux, il refusera d’ailleurs de désigner des avocats commis d’office, se portera comme seul défenseur des dix prévenus et, face aux intérêts contradictoires qu’il doit défendre et les 3 000 pages de dossiers à digérer, demandera à nouveau… le renvoi. Cela lui sera refusé et les prévenus seront jugés sans avocat. Jérôme Gavaudan, président du CNB, s’insurge : « Pourquoi, dans notre pays, en 2021, doit-on nous imposer ces choix indignes ? Quelle image de la justice ? De l’audience ? Du respect de la défense ? Ce qui s’est passé à Aix est inadmissible, c’est une caricature de justice que nous devons dénoncer avec vigueur. » De son côté, Paul Sollacaro a porté plainte auprès du parquet général d’Aixen-Provence. « J’ai été alerté de l’émoi suscité par cet incident », a commenté le ministre de la Justice Éric DupondMoretti vendredi, lors d’une visite à Marseille. L’affaire n’est pas neutre, alors que le garde des Sceaux demande un travail d’introspection aux magistrats et de revoir le régime de leur responsabilité. Les seuls à peut-être tirer leur épingle du jeu, les prévenus, dont les peines seront sans doute atténuées compte tenu des conditions du procès. ■
Privés de centre-ville, les livreurs nantais manifestent Ils sont en colère contre un arrêté municipal qui interdit, depuis le 8 mars, l’accès des rues piétonnes aux scooters thermiques.
TRANSPORT C’est un effet inattendu du couvre-feu à Nantes. Pour répondre à la demande croissante du nombre de livraisons à domicile de repas, les coursiers sont passés du vélo au scooter. Et dans le centreville, ces pétarades sont devenues insupportables pour nombre de riverains qui se sont plaints auprès de la mairie. La réaction ne s’est pas fait attendre. « Les aires piétonnes de Nantes (…) sont interdites à la circulation des deux-roues motorisés à moteur thermique », indique l’article 2 d’un arrêté municipal entré en vigueur ce lundi 8 mars. En revanche, ceux qui circulent avec « un deux-roues à moteur électrique peuvent circuler
toute la journée, de 6 h 00 à 2 h 00. » Mais l’investissement est trop onéreux par rapport au prix dérisoire d’une course, et très peu de livreurs possèdent un scooter silencieux. Aussi ont-ils très mal digéré cette décision municipale.
« Le bruit ? On le subit aussi ! »
En moins d’une semaine, les coursiers en colère ont organisé deux manifestations dans la cité des Ducs de Bretagne. La première, il y a une semaine sur l’esplanade des Machines de l’île de Nantes. Elle a rassemblé près d’une centaine de livreurs avec leur scooter. La seconde s’est déroulée vendredi, en présence de plusieurs dizaines d’entre eux dans les rues de la ville, avec un stop devant le théâtre Graslin. « La mairie et les plateformes nous exploitent », « On bosse
LOIC VENANCE/AFP
ÉRIC DE LA CHESNAIS £@plumedeschamps
Des livreurs manifestent à la fois contre la décision municipale et leurs conditions de travail, vendredi à Nantes.
même en ville », ou « Le bruit ? On le subit aussi ! » Tels sont les slogans que l’on pouvait lire sur les pancartes brandies par les manifestants qui, pour ne pas se faire verbaliser dans
les rues piétonnes, étaient venus sans leur engin motorisé. « La décision de la mairie, c’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, fustige Xey, un livreur de 25 ans. Les plateformes se font déjà beaucoup de profit sur notre dos et celui des restaurateurs. » « Ils nous ont donné des endroits où l’on peut garer nos scooters (…), on doit finir à pied, sauf que les restaurants les plus près sont à 150 mètres, ceux qui sont loin, c’est à 300 mètres. Vous imaginez ? », interpelle pour sa part Nasreddine, la quarantaine, livreur depuis quatre ans. Certains ont même appelé à la grève pendant le week-end. Un mouvement qui a eu des répercussions auprès des clients. « Le week-end, j’aime bien me faire plaisir en commandant via Uber Eats ou Deliveroo un repas auprès d’un restaurant, explique Solène Houitte, jeune salariée
À Argenteuil, un hommage vibrant à Alisha Des centaines de personnes ont marché dimanche en mémoire de l’adolescente, morte noyée dans la Seine. GUILLAUME POINGT £@guillaumepoingt
mais aussi des élus, comme la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse.
« Dérives des réseaux sociaux » La question du harcèlement en ligne était sur toutes les lèvres. Car avant le drame, Alisha avait vraisemblablement été victime de harcèlement par ses agresseurs sur le réseau social Snapchat. « Je voulais être là par solidarité avec la famille. J’ai une fille de 15 ans qui a été victime de harcèlement au collège. J’espère qu’il y aura une prise de conscience pour protéger d’autres jeunes », explique Fatima, une
mère de famille d’Argenteuil. « Nous sommes là pour être tous ensemble, ça peut réchauffer les cœurs », confie de son côté Nassima, venue de Cormeilles-enParisis avec ses enfants de 6 et 9 ans. « Il faudrait mettre en place des cours pour sensibiliser les jeunes aux dérives des réseaux sociaux et éviter d’autres catastrophes », préconise la mère de famille. Un peu plus loin, Louane, une lycéenne de 16 ans, est venue rendre hommage à sa camarade, qu’elle « connaissait de vue ». « Ça nous a tous beaucoup affectés, au lycée, l’ambiance a changé, on ne parle que de ça », constate la jeune fille. ■
ZOOM Paris : un policier tue par balles un homme qui le menaçait avec un couteau
Un policier a tué par balles, dimanche dans le 18e arrondissement de Paris, un homme qui l’avait menacé avec un couteau lors d’une agression aux circonstances encore floues. Le policier a tiré avec son arme de service sur cet homme alors que, pris en chasse, ce dernier s’était retourné pour lui donner des coups de couteau, à l’angle de la rue Boinod et de la rue des Poissonniers. La police n’évoque à ce stade « aucune notion de propos religieux ou terroristes » prononcés au moment de l’agression.
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HARCÈLEMENT « Alisha me manque, je me sens seule. On m’a arraché une partie de moi. » C’est un cri du cœur de la mère d’Alisha et des larmes étouffées qui ont conclu la marche blanche en hommage à cette adolescente de 14 ans, morte noyée le 8 mars, après avoir été frappée et jetée dans la Seine par deux camarades de classe. Hier, à Argenteuil (Val-d’Oise), plusieurs centaines de personnes ont défilé du lycée Cognacq-Jay, où étaient scola-
risés Alisha et ses deux agresseurs, jusqu’au parc des Berges, en bord de Seine. De nombreuses roses blanches et des petits mots ont été déposés devant son lycée. « Justice pour Alisha » ou encore « Stop harcèlement », pouvait-on lire sur les tee-shirts de plusieurs participants. La famille de l’adolescente avait pris place à l’avant du cortège avec une immense photo de la jeune fille et une banderole indiquant : « Hommage à Alisha. » Plusieurs jeunes enfants de la famille, originaire du Pakistan, portaient des petits drapeaux tricolores. Dans la foule, beaucoup de parents venus avec leurs enfants
d’une clinique en ville. J’ai entendu parler de la grogne des livreurs par une collègue du travail et j’ai renoncé à passer par ces plateformes. » Si cette interdiction est incomprise par certains, elle est en revanche appréciée par d’autres. « Cela va pacifier la circulation dans le centre-ville nantais où la cohabitation dans les rues piétonnes étroites est parfois difficile », commente Sébastien Grimaud, maître pâtissier à la tête du salon de thé éponyme. Son magasin, situé près de la place Royale, est installé juste devant un burger. « Certains livreurs en scooter, se croyant seuls du fait du couvre-feu, se sont approprié ces espaces et roulent trop vite tout en créant danger et nuisance sonore », déplore-t-il. Pour ses livraisons, lui préfère avoir recours à des sociétés de coursiers locales qui utilisent vélos ou gyropodes. ■
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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SPORT
De petites erreurs pour un grand raté
Par la faute d’une fin de match mal maîtrisée, les Bleus ont encore échoué en Angleterre. Explications. DAVID REYRAT £@DavidReyrat
RUGBY Il a manqué peu de choses au XV de France pour mettre fin à seize années de disette à Twickenham. Évacuons d’emblée la vaine polémique autour de l’arbitrage. L’essai de Maro Itoje était valable. Le Crunch ne se perd de toute façon pas sur cette action. C’était aux Bleus de se mettre plus tôt à l’abri d’un tel coup du sort toujours à craindre dans les dernières minutes. Ils n’y sont pas parvenus et la responsabilité de cette défaite sur le fil (23-20) en incombe pleinement aux joueurs français et à leur staff. Les causes sont techniques, mentales et stratégiques. Véritable motif d’espoir cependant, rien qui ne soit impossible de corriger à court terme, mais une somme de détails à régler pour ne plus revivre à l’avenir cette frustration déjà éprouvée en décembre en finale de la Coupe d’automne.
Le troisième ligne centre anglais Billy Vunipola stoppé par Grégory Alldritt et Antoine Dupont, samedi à Twickenham. PAUL CHILDS/ACTION IMAGES VIA REUTERS
l’occupation pour faire reculer les Anglais. Matthieu Jalibert a imité son demi de mêlée, se montrant moins précis au pied pour rendre quelques munitions précieuses aux joueurs de Sa Gracieuse Majesté. Cette équipe est, il est vrai, jeune (19 sélections et 25 ans de moyenne). Elle manque encore de tauliers capables de mettre autoritairement fin à la précipitation. Le capitaine, Charles Ollivon, n’est ainsi pas par-
venu à imposer un retour au calme, à insuffler du sang-froid à sa tendre charnière. Brice Dulin, seul trentenaire de cette équipe, aurait dû, lui aussi, intimer pareilles consignes à ses partenaires. Un constat, et c’est une bonne nouvelle pour y remédier, effectué quelques minutes après le coup de sifflet final par Ollivon : « Il faut qu’on soit plus solides sur les bases et dans notre système sous la pression. On va travailler en-
core plus pour être plus endurant dans la tête lors des fins de match. » On apprend aussi dans la défaite, a rappelé Fabien Galthié.
coaching sujet à caution uUn Le sélectionneur en personne
n’est pas exempt de tout reproche sur les difficultés rencontrées par son équipe dans les dernières minutes. Son recours au coaching a en effet de quoi surprendre, pour
uDes erreurs techniques
Dans le money-time, comme disent les Américains, le moindre détail a de lourdes conséquences. Or, dans les vingt dernières minutes, les joueurs français ont accumulé les erreurs. Des plaquages ratés, des dégagements imprécis qui ne permettent pas de desserrer l’étau, des ballons perdus au contact, des comportements fautifs pénalisés. Chaque Bleu, ou presque, a commis sa bévue. Des petites erreurs qui, cumulées, forment un grand raté. En ne parvenant plus à inverser la pression face à des Anglais au bord du précipice, jetant toute leur énergie dans la bataille pour éviter une troisième défaite, en quatre matchs, qui aurait été synonyme de crise profonde, les Tricolores sont restés à la merci de cette énorme désillusion. Conclusion ? Il va falloir encore hausser le niveau d’exigence individuel, travailler ces fameux skills, ces gammes techniques.
manque de lucidité uUn Au-delà de ces erreurs indivi-
duelles, les Bleus ont également perdu le fil collectivement. La fatigue et la pression s’accroissant, les responsables du jeu ont manqué de lucidité. Antoine Dupont a continué à jouer vite, à dicter un tempo élevé, alors que la physionomie du match imposait de ralentir la cadence. De se concentrer sur la possession de balle en sacrifiant quelques relances offensives au rendement aléatoire. De privilégier
France-Galles, choc à double enjeu
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sélections
et 25 ans de moyenne pour le XV de France, une équipe jeune qui manque encore de joueurs d’expérience
Brice Dulin, samedi à Twickenham. « Les défaites font aussi évoluer. On engrange du vécu commun sur les bons moments, mais aussi sur les moments plus compliqués », explique l’arrière du XV de France. ADRIAN DENNIS/AFP
France-Galles, samedi (21 h) au Stade de France, s’annonce explosif. Les Gallois, invaincus, débarquent à Saint-Denis avec l’objectif de réaliser le Grand Chelem. Les Bleus, eux, peuvent toujours remporter le Tournoi (ce qui ne leur est plus arrivé depuis 2010). Avec 10 points au classement (mais deux matchs à disputer) contre 19 pour le XV du Poireau (mais une seule rencontre à venir), le XV de France doit d’abord battre les Gallois de plus de 7 points (pour les priver du point de bonus défensif). Ensuite, Ollivon et sa troupe devront dominer l’Écosse, toujours au Stade de France (la date du vendredi 26 mars est avancée pour ce report). Deux victoires impératives. Plus obligatoirement un bonus offensif (au moins quatre essais inscrits). Dans ce cas de figure, la première place se jouerait au goal-average général (+ 63 pour les Gallois contre + 39). D. R.
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4E JOURNÉE TOURNOI ITALIE (6) 7-48 GALLES (1) ANGLETERRE (4) 23-20 FRANCE (3) ECOSSE (5) 24-27 IRLANDE (2)
Brice Dulin : « On a encore un titre à aller chercher » L’ARRIÈRE du XV de France débriefe pour Le Figaro la défaite en Angleterre. Et fixe la marche à suivre pour rebondir au plus vite. LE FIGARO. - Ce n’était pas trop la soupe à la grimace samedi soir ? Brice DULIN. - Non. On a passé quelques heures ensemble samedi soir pour parler du match et évacuer. Pour que le réveil soit un peu plus léger. Ça a fait du bien. Avec le recul, quel sentiment prédomine ? On est conscient d’être passé pas très loin, d’avoir fait de bonnes choses. On avait les clés en main pour s’imposer. La rencontre était à notre portée, mais on l’a laissée filer à travers quelques erreurs in-
dividuelles et collectives. C’est loin d’être un match où on a été impuissant. On se dit que nous perdons à cause de nos petites largesses, c’est donc quand même positif. N’est-ce pas rageant, comme en décembre dernier, de s’incliner encore dans les dernières minutes contre les Anglais ? Le plus rageant, c’est de perdre un match du fait de nos petites erreurs. On l’a bien entamé, mais, sur les quinze dernières minutes, on sort moins bien de notre camp, on s’expose un peu trop et on remet les Anglais dans le match. Il vous manque d’être plus lucide dans la pression des fins de match ? C’est ça. Je commets par exemple une petite erreur avec cette pénaltouche sauvée dans ses 22 mètres par May (63e). On est moins précis, on inverse moins bien la pression qu’en début de match. La grande majorité des Bleus, touchée par le Cobid-19, n’avait pas joué depuis un mois. L’avez-vous payé en fin de match ? Non. On a fait une grosse semaine d’entraînement. On était même légèrement au-dessus de nos standards habituels. Au niveau du rythme, on y était. C’est plus dans la gestion de la fin de match qu’on doit s’améliorer. Prendre plus le temps de bien appréhender les situations. Parfois, l’axe qui gère le tempo du jeu doit mettre le pied sur le ballon. La solidarité défensive déployée par les joueurs était une réponse à ceux qui annonçaient un XV de France miné et désuni par cette crise sanitaire ? Je sais que ce sont des choses qui se disent, mais je peux vous assurer que le groupe s’entend superbien. En toute transparence, nous avons toujours été très heureux de nous retrouver. Pour nous, il n’y a pas eu de problème à passer cette période. Ce qui nous attriste le plus, c’est ce petit accroc…
Il vous reste deux matchs à disputer. Il s’agit donc de digérer cette défaite au plus vite… C’est pour ça qu’on a longtemps échangé samedi soir. Le but était de prendre conscience de nos erreurs, d’évacuer la déception et de basculer sans tarder sur la suite. De se focaliser sur le positif. La victoire dans le Tournoi est encore jouable comptablement. Il faut donc vite repartir sur quelque chose d’entraînant. On a encore un objectif élevé, un titre à aller chercher. Et on a toujours notre destin en mains : ça passe par deux victoires. Il va falloir qu’on se bouge pour l’atteindre. Samedi prochain, le défi sera relevé avec la réception de Gallois en lice pour le Grand Chelem. Les Gallois sont montés en puissance au fil du Tournoi. Et ils arrivent avec le plein de confiance pour remporter le Grand Chelem. Ça va être un défi énorme pour nous. On sait ce qu’ils visent, on sait ce que nous visons. Les deux équipes ont quelque chose à gagner, c’est plaisant. Remporter le Tournoi serait un vrai lot de consolation ? Bien sûr ! Remporter une compétition, c’est toujours l’objectif. Et, pendant des années, c’était compliqué… Ce qui s’est créé depuis un an et demi est exceptionnel. A nous de continuer à travailler, à engranger de l’expérience pour ce qu’on a vécu samedi ne se reproduise plus. Ou très peu. Galthié estime que ce match va faire grandir l’équipe de France. Totalement. Les défaites font aussi évoluer. On engrange du vécu commun sur les bons moments, mais aussi sur les moments plus compliqués. C’est ce qui nous aidera à mieux anticiper, gérer et contrôler nos prochains matchs. ■ PROPOS RECUEILLIS PAR D. R.
ne pas dire plus. Quand Eddie Jones envoyait tout son banc sur le terrain pour tenter d’inverser le verdict, Fabien Galthié s’est montré trop frileux. Deux changements à l’heure de jeu (Taofineua, touché au dos, et Haouas). Puis trois autres entre la 68e et la 72e minute. Malheureusement, les remplaçants n’ont pas apporté ce qu’on pouvait attendre d’eux, cédant eux aussi à l’urgence de défendre leur ligne. Plus pénalisant encore, le patron n’a pas lancé trois remplaçants dans la bataille, pour un match finalement disputé à 23 Anglais contre 20 Français. Vu l’intensité des débats, ne pas insuffler toute la fraîcheur possible pourrait s’assimiler à une faute professionnelle. Dans le détail, on peut se demander pourquoi avoir pris le risque de choisir l’option à six avants et seulement deux trois quarts sur le banc pour finalement ne pas utiliser le troisième ligne Anthony Jelonch. Dont les caractéristiques (rugueux et dur au mal) correspondaient parfaitement au genre de beauté des dernières minutes : une bataille furieuse et féroce. Ensuite, pourquoi, comme face à l’Irlande, avoir maintenu pendant 80 minutes Dupont et Jalibert ? Il était visible que les deux demis étaient dans le dur. Envoyer Baptiste Serin et Romain Ntamack gérer le dernier quart d’heure, afin de profiter de leur clairvoyance, aurait permis d’insuffler plus de maîtrise. Et puis, enfin, pourquoi réfuter sans cesse le terme de remplaçants pour employer celui de finisseurs pour ne pas avoir recours à leur service ? Au-delà de l’absurdité sémantique, le signal n’est pas optimal en termes de management. Les trois oubliés sont légitimement en droit de se demander si le staff leur fait confiance. ■
ZOOM Boxe : décès de Marvin Hagler, le féroce combattant
l’Américain Marvin Hagler est décédé subitement à l’âge de 66 ans, samedi, laissant la boxe orpheline d’une de ses plus grandes légendes. Combattant redoutable, regard de guerrier sous son crâne chauve, Hagler fut un champion incontesté chez les poids moyens de 1980 à 1987, offrant des combats mémorables notamment contre Thomas Hearns, Sugar Ray Leonard ou Roberto Duran. Pendant son règne sans partage, il a conservé les titres WBA, WBC et IBF par douze défenses victorieuses consécutives, ce qui constitué le deuxième plus long règne d’unification dans l’histoire de la boxe.
EN BREF Résultats du week-end
Clément Noël vainqueur du slalom de Kranjska Gora (Pinturault n’a pas terminé) ; Maximilian Schachmann (All) vainqueur de Paris-Nice (Roglic a chuté dans la dernière étape).
Golf : Rozner confirme Antoine Rozner a remporté le Qatar Masters, son deuxième succès en moins de quatre mois sur le Circuit européen.
Football : Le Graët réélu Avec 73 % des votes (seulement 25 % pour Frédéric Thiriez), Noël Le Graët a été réélu à la tête de la fédération.
29E JOURNÉE LIGUE 1 REIMS (13) ANGERS (10) MARSEILLE (5) NÎMES (18) DIJON (20) LENS (6) LORIENT (17) RENNES (8) MONACO (4) PARIS SG (2)
1-1 0-1 3-1 1-1 1-3 2-2 1-1 1-0 0-0 1-2
LYON (3) ST-ÉTIENNE (16) BREST (14) MONTPELLIER (9) BORDEAUX (11) METZ (7) NICE (12) STRASBOURG (15) LILLE (1) NANTES (18)
lundi 15 mars 2021
LE CARNET DU JOUR Les annonces sont reçues avec justification d’identité du lundi au vendredi de 9h à 13h et de 14h à 18h (excepté les jours fériés) et tous les dimanches de 9h à 13h.
Elles doivent nous parvenir avant 16 h 30 pour toutes nos éditions du lendemain, avant 13 h les dimanches.
La baronne François-Xavier de Bastard, née Yolande de Kervenoaël, son épouse, Isaure de Bastard, sa fille, ont la tristesse de faire part du décès du
baron François-Xavier de BASTARD le 11 mars 2021, à l'âge de 67 ans, muni des sacrements de l'Église, et vous prient d'assister ou de vous unir d'intention à la messe qui sera célébrée le mardi 16 mars 2021, à 10 h 30, en l'église Notre-Dame-de-l'Assomption, 88, rue de l'Assomption, Paris (16e).
Marie Christine Nardy, Eric et Hélène Boullet, Béatrice et Benoit Jobard, Muriel et Nicolas Simon-Barboux, ses 10 petits-enfants, ses 10 arrière-petits-enfants ont la tristesse de vous faire part du décès de
Anne BOULLET née Blanchard,
le 10 mars 2021, à l'âge de 93 ans. La cérémonie religieuse sera célébrée le mercredi 17 mars, à 14 h 30, en l'église Notre-Damede-la-Résurrection, Le Chesnay (Yvelines). Ni fleurs ni couronnes. 11, boulevard de la Porte-Verte, 78000 Versailles.
par courriel
carnetdujour@media.figaro.fr par téléphone
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Le colonel Xavier Bernard et Mme, née Amicie Thierry de Ville d'Avray, M. (†) et Mme Yves de Galzain, M. Patrice Bernard et Mme, née Ninon de Montaignac de Chauvance, M. et Mme Bruno Bès de Berc, ses enfants, ses vingt petits-enfants, leurs conjoints et ses 31 arrière-petits-enfants, ses neveux et nièces des familles Sicre de Fontbrune, de Lavarene, Lagesse, Mazon, Bernard, Bès de Berc et de Gayffier et tous ceux qui l'ont entourée dans les années de son grand âge, en union avec son époux, le colonel Paul Bernard (1908-2002), ont la grande tristesse de faire part du rappel à Dieu, à Tocane-Saint-Apre (Dordogne), le 7 mars 2021, dans sa 110e année, de
Mme Paul BERNARD
carnetdujour.lefigaro.fr
deuils Isabelle Halna du Fretay et Alain Pradal, Henry Halna du Fretay et Sedef Ecer, ses enfants, Sophie, Marine, Pierre, Selim, Ervan, Karl, Adam, Caroline, ses petits-enfants, Paul, Artur, Héloïse, ses arrière-petits-enfants, ont la tristesse de faire part du décès de
Geneviève BASSE née Goupy,
survenu le 10 mars 2021. La cérémonie religieuse sera célébrée en l'église Saint-Médard, à Paris (5e), le mardi 16 mars 2021, à 10 h 30. L'inhumation aura lieu le samedi 20 mars, à 11 heures, au cimetière de Roussillon (Vaucluse). Cet avis tient lieu de faire-part.
Mme Louis-Noël Chenu, Emilie Chenu, Rosalie et Edouard Héripret, Pierre-Eloi et Alphée Chenu, Armand et Sophie Chenu, Marie-Charlotte Chenu et Jean-Baptiste Faguer, ses enfants,
La cérémonie religieuse sera célébrée en la cathédrale Saint-Louis de Versailles, ce lundi 15 mars, à 14 h 30.
Mlle Monique de Bouttemont, M. et Mme Tanguy de Pompignan, M. Jean-Baptiste de Bouttemont, ses enfants, Ariane, Inès et Louis de Pompignan, ses petits-enfants, ont la tristesse de vous faire part du rappel à Dieu de
Mme Philippe de BOUTTEMONT
née Marie-Philomène des Garets, le 12 mars 2021, à l'âge de 80 ans. Elle a rejoint dans la Lumière du Seigneur, son époux, décédé le 14 novembre 2010. La messe de funérailles sera célébrée le mardi 16 mars, à 14 h 30, en l'église de Sartilly (Manche), suivie de l'inhumation au cimetière de Saint-Pierre-Langers. Une messe sera célébrée à son intention, le samedi 20 mars, à 14 h 30, en l'église Saint-Pierre, à Neuilly-sur-Seine.
ses enfants, Patrice Blanc et Nadine (†), Laurence et Christophe Gancel, Xavier et Isabelle Blanc, Christine et Laurent Bonnet Chomel, ses petits-enfants, Caroline, Alexandra, Arnaud, Charles et Claire, Séverine et Nicolas, Pierre et Blanche, Alice, Margaux, Nicolas
TOUS LES ÉVÈNEMENTS DE LA VIE S’ANNONCENT DANS LE CARNET DU JOUR : Naissances, fiançailles, mariages, anniversaires, deuils, souvenirs...
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ses deux arrière-petites-filles, Ariane et Margot, ont la tristesse de faire part du rappel à Dieu, le 9 mars 2021, de
Pierre BLANC La cérémonie religieuse aura lieu le jeudi 18 mars, à 10 heures, en la basilique Saint-Martin-d'Ainay, à Lyon (2e), suivie de l'inhumation au cimetière de Bibost (Rhône).
Julien, Kévin et Nadia, Maxence, Eliott, ses petits-enfants, Dimitri, son arrière-petit-fils, Yvonne Hollier, sa sœur, sa famille et ses proches ont la douleur de vous faire part du rappel à Dieu de
François HOLLIER
La cérémonie religieuse sera célébrée en l'église Sainte-Jeanne-de-Chantal, à Paris (16e), le mardi 16 mars, à 10 h 30.
Isabelle CRONIER de MURE de LARNAGE
Cet avis tient lieu de faire-part.
Jean-Luc JARROUSSE le 11 mars 2021. La cérémonie religieuse sera célébrée au Vésinet, en l'église Sainte-Marguerite, le mercredi 17 mars, à 14 h 30. Cet avis tient lieu de faire-part.
a la tristesse de vous faire part du rappel à Dieu de
M. Jerzy LASTOWIECKI le 11 mars 2021, à l'âge de 70 ans. La cérémonie religieuse sera célébrée le mercredi 17 mars, à 14 h 30, en l'église de Neuilly-en-Véxin (Val-d'Oise), suivie de l'inhumation dans le caveau familial.
née Pairault-Vergnaud,
le 9 mars 2021. La cérémonie religieuse sera célébrée en l'église protestante unie de l'Étoile, à Paris (17e), le jeudi 18 mars, à 10 heures, suivie de l'inhumation au cimetière de Saint-Cloud. 12, rue de la Redoute, 92210 Saint-Cloud.
Jean-Marc Paolini, Jennifer De Vilder, sa belle-sœur, Fiona, Charles, Robin, Eliane et Alexandra De Vilder, ses neveux et nièces, ont la douleur de vous faire part du rappel à Dieu de
Alphons DE VILDER
La cérémonie religieuse aura lieu en l'église Notre-Dame-d'Auteuil, à Paris (16e), le mercredi 17 mars, à 14 h 30.
Mauléon-Licharre (Pyrénées-Atlantiques). Anne Muller, sa compagne, Claudie Givry, sa famille et ses amis ont la douleur de vous annoncer le décès de
M. Claude GIVRY
ancien combattant d'Algérie, ancien courtier maritime, survenu à l'âge de 86 ans. La cérémonie religieuse aura lieu le mercredi 17 mars 2021, à 10 heures, en l'église Saint-Jean-Baptiste de Mauléon-Licharre. Cet avis tient lieu de faire-part.
ont la tristesse de vous faire part du décès de
Michel MISSOFFE
chevalier de la Légion d'honneur,
La famille remercie toutes les personnes qui s'associeront à sa peine.
Mme Jerzy Lastowiecka, née Laure de Cosnac, son épouse,
ont la tristesse de vous faire part du décès de
ses neveux et nièces
La cérémonie religieuse sera célébrée le jeudi 18 mars, à 10 heures, en l'église Saint-François-Xavier, à Paris (7e).
L'inhumation aura lieu le jeudi 18 mars, au cimetière de Neuilly-en-Sancerre.
M. Thibault Cronier de Mure de Larnage, son époux, Arthur et Inès, ses enfants, Marie-Christine Pairault-Vergnaud, sa sœur, ses neveux et nièces
Emilien, Alexis, Sacha, Saskia, Tatiana, Tristan et Gaspard, ses petits-enfants,
survenu le 11 mars 2021, à l'âge de 90 ans.
font part du rappel à Dieu de
le 12 mars 2021, muni des sacrements de l'Église.
Sébastien et Christina Missoffe, Alexandre et Marianne Missoffe, Aurelia et Antoine Denis, ses enfants,
La messe de funérailles sera célébrée le mercredi 17 mars 2021, à 10 h 30, en l'église de la Rédemption, Lyon (6e).
font part du rappel à Dieu de
Louis-Noël CHENU
Jacqueline Missoffe, sa femme,
à l'âge de 98 ans.
Colette, Romane, Blanche, Alfred, Olympe et Madeleine, ses petits-enfants,
le 6 mars 2021.
Mme Pierre Blanc, née Annie Goullioud, son épouse,
Jean-Jacques Hollier (†), Françoise Morvan, Sylvie Hollier, Pierre Hollier, ses enfants, Alain Morvan, son gendre,
Marie-France Jarrousse, son épouse, Guénaëlle, Damien, Domitille, Gauthier, Amaury, ses enfants, ses 12 petits-enfants
née Marie-Angèle de Fontbrune, à Sainte-Marie (Île de la Réunion).
Reprise des annonces sur : www.dansnoscoeurs.fr
Paris.
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En union avec Mme Jean-Claude Marganne, née Anne Roucher, Pierre-Alain et Albane Marganne, Brieuc, Cyprien et Apolline, Gilles et Luce Demarquet, Emmanuel (†), Isaure, Servane, Vianney, Sixtine, Bertille, Wandrille et Ambroise, Bruno et Isabelle de Plasse, Dimitri et Tristan, ses enfants et petits-enfants, ont la douleur de vous faire part du décès de
M. Jean-Claude MARGANNE survenu à son domicile le 9 mars 2021, dans sa 89e année, et vous prient d'assister ou de vous unir par la prière à la messe qui sera célébrée le samedi 20 mars, à 10 heures, en l'église Saint Etienne-Saint-Denis de La Ferté-sous-Jouarre. Elle sera suivie de l'inhumation, dans la plus stricte intimité.
Sylvie et Didier, François et Annie, Dominique et Marie-Hélène, Philippe et Monique, Véronique et Hugues, Thierry et Karine, ses enfants et leurs conjoints, ses petits-enfants et toute sa famille ont la tristesse de vous faire part du rappel à Dieu du
docteur Paul MATHÉ le 11 mars 2021, à l'âge de 96 ans. La cérémonie religieuse sera célébrée le mercredi 17 mars, à 10 h 30, en l'église Saint-Ferdinand-des-Ternes, Paris (17e). La famille remercie, pour son dévouement et sa chaleureuse présence, le personnel de la maison des Artistes de Batignolles qui l'a accompagné.
Le conseil d'administration, la direction générale et les collaboratrices et collaborateurs anciens et présents du
Groupe Firmenich
ont la grande tristesse de faire part du décès, survenu le 11 mars 2021, de leur très cher collègue et ami de longue date,
Michel MISSOFFE
président-directeur général de Firmenich Paris de 1969 à 1996, président du comité stratégique du Groupe Firmenich, chevalier de la Légion d'honneur. Nous garderons un grand souvenir de lui et exprimons à sa famille et ses proches tous nos sentiments de profonde sympathie.
La comtesse Henri de Vaumas, son épouse, René et Claire de Vaumas, Gabriel et Anne Strauss, Antoine et Diane (†) de Vaumas, Etienne et Astrid de Vaumas, Michel de Vaumas, ses enfants, ses petits-enfants et arrière-petits-enfants font part du rappel à Dieu du
comte Henri de VAUMAS le vendredi 12 mars 2021, dans sa 83e année. La cérémonie religieuse sera célébrée le jeudi 18 mars 2021, à 14 heures, en la collégiale Saint-Etienne de Dun-sur-Auron (Cher). L'inhumation aura lieu le vendredi 19 mars 2021, à 11 h 15, au cimetière de Flacé-lès-Mâcon (Saône-et-Loire).
remerciements Mme Jacqueline Ajer, sa sœur, M. Yves Faure-Brac, son beau-frère, ses neveux et petits-neveux, très touchés des marques de sympathie qui leur ont été témoignées lors du décès de
Mme Irène AJER vous prient de trouver ici, leurs sincères remerciements.
La comtesse Arnaud de Buyer-Mimeure, son épouse, ses enfants, ses petites-filles et toute la famille, très touchés des marques de sympathie qui leur ont été témoignées lors du décès du
comte Arnaud de BUYER-MIMEURE vous prient de trouver ici, leurs sincères remerciements.
souvenirs Eduardo de OLIVEIRA-CEZAR artiste peintre né en Argentine,
nous a quittés le 15 mars 2006. Eduardo, il y a quinze ans, tu as terminé ton heureux voyage sur terre. « Les morts dont on se souvient, vivent aussi heureux que s'ils n'étaient point morts ? » Maurice Maeterlinck. Tu resteras à jamais dans nos cœurs. Amr.
disparition
Jean-Claude Fasquelle, l’édition comme un sport de combat ÉRIC NEUHOFF [email protected]
Ses silences, dans Paris, étaient célèbres. Ils en disaient long. Jean-Claude Fasquelle parlait peu. Ça n’était pas pour ne rien dire. Cet éditeur de légende est parti dans son sommeil, à 90 ans. Ses rêves étaient sans doute peuplés de caractères d’imprimerie. À 23 ans, il avait repris la maison Fasquelle, qui publia Zola, Proust, Daudet. Au départ, c’est un métier auquel il ne connaît rien. Simplement, il aime les écrivains qui ont du style et fuit les sartriens comme la peste. Lancer la « Collection Libelles » lui paraît alors une évidence. Les pamphlets signés Bernard Frank, Roger Vailland, Michel Déon font circuler le sang. En 1960, l’affaire fusionne avec Grasset. Fasquelle la dirigera d’abord en tandem avec Bernard Privat, puis en solo jusqu’en 2000, date à laquelle il cède son fauteuil à Olivier Nora. Il s’en passait de belles, dans cet immeuble de la rue des Saints-Pères, à Paris, avec son escalier de bois, ses couloirs étroits, ses parquets qui grinçaient sous les pas du visiteur. Le Goncourt de 1966 pour Oublier Palerme, d’Edmonde Charles-Roux, annonce la couleur. Les couvertures jaune beurre frais ne vont plus arrêter d’être ceintes des fameux bandeaux rouges signalant les récompenses d’automne. À chaque rentrée, Fasquelle et son équipe (Yves Berger, Françoise Verny, François Nourissier) alignaient leurs auteurs en ordre de bataille, comme les soldats en uniforme de Barry Lyndon, et regardait ceux qui restaient debout. À sa voix, ce taiseux préférait celle des jurés. Sanglé dans ses costumes croisés, ce colosse au physique d’acteur hollywoodien traitait les membres des Renaudot, Médicis et compagnie avec les égards dus à leur rang. Les résultats ne se faisaient guère attendre.
Un bon vivant Fasquelle poussait les journalistes à se lancer dans le roman. Cela permit à Grasset de rafler l’Interallié à maintes reprises. On le lui reprocha. Cela ne l’empêchait pas d’obtenir des médailles pour Lucien Bodard ou Pierre Schoendoerffer. Le champagne fêtait ça. Sous ses dehors bien élevés, Fasquelle était un bon vivant. On n’est pas impunément l’ami de Kléber Haedens et de Roger Vailland. Il fallait entendre Fasquelle raconter comment le second prétendait ne jamais boire avant la nuit : pour ne pas mentir, il fermait dès l’après-midi les volets. Avec le premier, il partageait le goût du rugby. Pour lui, l’édition était un sport de combat. Il s’agissait aussi d’un jeu. La chance n’était pas à négliger. La sienne fut insolente. Fasquelle escaladait l’Himalaya du succès avec un mystérieux sourire de mandarin chinois. Durant de nombreuses années, il planta le drapeau Grasset au sommet de montagnes qui se dressaient place Gaillon (Drouant) ou avenue Franklin-Roosevelt (Lasserre).
Jean-Claude Fasquelle
en 1997. FRANCESCA MANTOVANI/OPALE/LEEMAGE Son catalogue affichait Rambaud, Fernandez, Lambron, Beigbeder. Il signait de généreux à-valoir, choyait Daniel Rondeau, protégeait son vieux complice Bernard Frank, expédiait Jacques Laurent à l’Académie française. Les cocktails se succédaient dans les locaux à l’ancienne du 6e arrondissement.
Des étés à Cadaqués Il y avait le Twickenham, ce faux pub anglais remplacé aujourd’hui par une boutique de mode, où s’ourdissaient de sombres complots dans des odeurs de bière blonde. Le soir, les dîners avaient lieu chez lui, square Vergennes, dans cette maison avec jardin qui semblait sortie d’un film de Claude Sautet. Sous l’égide de Fasquelle s’étaient lancés les nouveaux philosophes, BHL en tête, et les féministes bon teint comme Christiane Rochefort et Benoîte Groult (plus tard, ce fut le tour de Virginie Despentes). C’est lui qui persuada Bardot de rédiger ses Mémoires. Cet homme taillé dans le bronze et lent au dégel - le whisky et les grands bordeaux facilitaient les choses - présida avec son épouse Nicky aux destinées du Magazine littéraire, relança les Éditions du Sagittaire, où parurent Alexandre Astruc et Jean-François Bizot, fut actionnaire des Inrockuptibles, aida la maison d’auteurs Au diable Vauvert, participa en sousmain au triomphe de Joël Dicker. Les étés se déroulaient à Cadaqués, dans cette villa face à celle de Salvador Dali avec ses œufs géants sculptés sur le toit. Pour lui, un auteur se publiait jusqu’à sa mort, un usage princier guère plus de saison dans le milieu. On revoit Fasquelle à scooter dans les rues de Port Lligat ou, assis derrière son bureau qui avait appartenu à Zola, relisant les aventures de San Antonio, siégeant au prix Freustié, évoquant la figure de Gabriel Garcia Marquez ou saluant Umberto Eco, avec qui il avait fondé en 2015 les éditions La nave di Teseo («Le bateau de Thésée ») en Italie. On ne se refait pas. Il avait même donné son nom à un prix décerné en Mongolie, ce qui lui avait permis de dormir dans une yourte. Peut-être qu’il n’accordait de crédit qu’à la noblesse des mots. Puis la lumière baissa. Il y eut la disparition de sa fille, Ariane, en 2016 et celle de Nicky, l’unique, l’inflammable Nicky, victime du Covid au printemps 2020. À Saint-Germain-desPrés, une page s’est tournée. La dernière ? ■
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
CHAMPS LIBRES PORTRAIT
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Pierre Nora ou « la politesse de l’intelligence » Dans « Jeunesse » (Gallimard), l’historien raconte ses années de formation et explore ses « lieux de mémoire » personnels. Du Vercors, où il vécut la guerre, caché, à ses premiers pas d’éditeur, le lecteur suit le parcours passionnant d’un des piliers de l’intelligentsia française.
Gabrielle van Zuylen, femme mariée avec qui il eut une longue relation clandestine avant de vivre avec elle pendant plus de vingt ans jusqu’à sa mort, en 2010, qui l’a laissé dévasté. À évoquer celle qui fut sans doute le grand amour de sa vie, les larmes lui viennent. C’est ensuite qu’il est devenu le compagnon de la journaliste Anne Sinclair, elle-même brisée par la tourmente de l’affaire DSK. « On s’est consolés », sourit Nora, qui admet quelques chamailleries avec la journaliste : « Elle est plus à gauche que moi. Moi, par exemple, je ne pourrais jamais voter Hidalgo. » De gauche, de droite, Nora ? « Je suis né à gauche », dit-il, rappelant que son père a été le médecin de Léon Blum. Sa proximité avec Pierre Mendès France, via son frère Simon, après-guerre, l’a immunisé contre le marxisme dans lequel tombaient tous ses amis. Avec Le Débat, fondé en 1980, l’année de la mort de Sartre, il avait voulu rompre définitivement avec la posture de l’intellectuel engagé, lui préférant les vertus du dialogue et de l’expertise dans une Europe délivrée des idéologies. Il a manifesté sa largesse d’esprit en publiant chez Gallimard des auteurs très différents : de l’œuvre de Michel Foucault à l’essai de Luc Ferry et Alain Renault qui fustigeait les penseurs de la French Theory et dont il a trouvé le titre : La Pensée 68. « Je me suis construit comme un homme sans opinions au sens où Musil parle d’un homme sans qualités », confie-t-il. Ajoutant : « Je suis de gauche avec des gens de droite, de droite avec des gens de gauche. » Cette position « audessus de la mêlée » lui a valu beaucoup d’ennemis à gauche, notamment le sociologue Pierre Bourdieu. « Il me détestait. Pour lui, j’étais dans la doxa, lui dans la science. Il m’appelait l’arbitre des élégances, sourit Nora. Je ne devrais pas vous dire ça, car vous allez l’écrire… J’ai suscité beaucoup de jalousie dans ma vie. »
Eugénie Bastié
[email protected]
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Exercer enfin une plume trop longtemps mise au service d’autrui
On pénètre dans l’intimité de cette famille Nora qui fréquentait le Tout-Paris politique et intellectuel. Le père, Gaston Nora, grand chirurgien à l’hôpital Rothschild, l’aîné, Simon Nora, résistant puis haut fonctionnaire brillant proche de Mendès France. Rue La Boétie, la table est ouverte aux amis : on reçoit Merleau-Ponty, Lacan, plus tard Jean-Jacques Servan-Schreiber, Françoise Giroud. Pierre est le petit dernier, le « regardeur », comme il aime à se décrire. Cette enfance tranquille fut brisée par la guerre, qu’il a vécue de 9 à 13 ans en tant qu’enfant juif. Lui qui vivait dans un milieu bourgeois hyperassimilé bascule d’un seul coup du côté des persécutés. Son père est obligé de porter l’étoile jaune. « Oh, vous, un monsieur si bien ! », soupire la gardienne de leur immeuble. Gaston Nora devra son salut pendant la guerre à Xavier Vallat, commissaire général aux questions juives, avec qui il avait combattu dans les tranchées en 14. Le chirurgien juif témoignera en faveur du collaborationniste après la Libération. Complexité de l’histoire. Exilé à Grenoble, où il s’est fait tapoter la joue par le maréchal Pétain en mars 1941, Pierre Nora a vécu l’essentiel de la guerre clandestinement dans le Vercors, où ses frères participaient à la Résistance. Il a échappé de peu à la Gestapo, vu des paysans pendus au chambranle de leur maison. Une expérience qui l’a profondément marqué. « C’était un enfant bercé par les fées, né dans un milieu brillant et civilisé, qui a été fracassé par la persécution, raconte de lui son amie, l’historienne Mona Ozouf. Cela lui a donné une profondeur. Il a l’intelligence du malheur. » Cela lui a donné également un rapport ambigu à la judéité, qu’il raconte très subtilement dans Jeunesse.
« Aujourd’hui, il n’y a plus d’intellectuels, il n’y a que des engagés ! »
À la Libération, il refuse de faire sa bar-mitsvah, assimilant la tradition juive à des « enfantillages pénibles ». Un rejet qu’il dit aujourd’hui regretter, car il n’avait pas compris à l’époque ce que pouvait signifier l’affirmation juive pour ses parents, au sortir d’une guerre où ils avaient failli disparaître. « J’appartiens à la génération creuse », dit-il, entre « la génération pleine, celle de l’ultime expression d’un franco-judaïsme hyperassimilé, celle de mon père, mais aussi de Marc Bloch, Raymond Aron, Lévi-Strauss, pour qui la question juive se posait à peine, et la génération d’après, celle de BHL, Finkielkraut, Glucksmann, qui a opéré le retour à une “positivité juive”. » Une « absence-présence » du judaïsme qui se retrouve jusque dans son nom, Nora. Son père lui avait toujours raconté qu’il s’agissait de la francisation d’« Aron », pratiquée par de nombreux juifs français au XIXe siècle. En réalité, découvre l’historien, Nora signifie aussi en hébreu « le redoutable » et pourrait bien être le signe d’un réenracinement religieux plutôt que de l’assimilation. Qu’est-ce qui peut être plus traumatisant pour un intellectuel français que la guerre ? L’échec à Normale Sup, bien sûr. Lui qu’un ami de son frère avait fait agenouiller à 14 ans devant la grille de la Rue d’Ulm en lui faisant jurer qu’il y serait demain a raté trois fois le concours. Un échec qui a érodé sa confiance en lui de prédestiné. Alain Finkielklraut, son ami, qui a lui aussi échoué à la Rue d’Ulm - préférant retenter le concours à Saint-Cloud pour ne pas subir une seconde déconvenue -, se dit « ému par ce traumatisme de l’échec, si typique de l’élite française et de sa pathologie des concours ». « Humilié jusqu’à l’os », comme il le confie, cette défaite fut aussi pour Pierre Nora une chance, car elle l’aiguilla vers le métier d’éditeur, où il a excellé, bien plus probablement que s’il avait suivi une carrière purement universitaire. « Son bonheur, il le dit, est d’avoir échoué à Normale Sup. Cela ouvre l’esprit et beaucoup de portes. Voyez Macron, un recalé qui s’est bien rattrapé », sourit son ami Régis Debray. Il reste à Pierre Nora, qui a hésité entre l’agrégation de lettres et celle d’histoire, comme un regret lancinant, celui de n’avoir pas été écrivain. On sent que ce livre est une manière de se rattraper, d’exercer enfin une plume trop longtemps mise au service d’autrui. Derrière ses deux yeux bleus charmeurs, on devine vite le séducteur. De ses amours, il dévoile une partie dans Jeunesse. Et notamment sa relation atypique avec Marthe, aristocrate malgache, femme de lettres bien plus âgée que lui, qui fut son initiatrice. Mais aussi
« J ’ai suscité beaucoup de jalousie dans ma vie », explique Pierre Nora (ici dans son bureau, chez Gallimard, à Paris, en avril 2016). FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO
FRANÇOIS BOUCHON/LE FIGARO
œil bleu taquin, la peau bronzée, l’allure élégante et charmeuse : il a un côté Jean d’Ormesson de la rive gauche. La gravité et la profondeur de l’histoire plutôt que les étincelles de la littérature. Le ciel des idées plus que les eaux des îles grecques. Certains lui trouvent un air de patricien à l’antique. Longtemps, Pierre Nora fit trembler le Paris intellectuel. C’était l’époque où l’édition possédait le suprême pouvoir : accepter ou refuser des manuscrits. Il est vite devenu maître dans l’art de la lettre de refus. « Il faut que l’auteur préfère recevoir une telle lettre plutôt que d’être édité », aime-t-il à confier. Il nous reçoit dans son petit bureau, chez Gallimard. Table en formica, canapé en cuir beige avachi dont on imagine qu’il a dû accueillir les fesses des plus grands esprits depuis le temps – cinquante-cinq ans ! - que Pierre Nora règne sur la partie essais de la plus célèbre maison d’éditions de France. À 90 ans, celui qui avait déjà raconté, dans Historien public, sa vie d’éditeur publie Jeunesse, où il dévoile une part beaucoup plus intime de lui-même. Ce livre qu’il portait en lui depuis longtemps est né du désœuvrement du confinement et de l’arrêt de la revue Le Débat, qu’il dirigeait avec Marcel Gauchet depuis quarante ans. Au début, l’historien ambitionnait de raconter les grandes rencontres de sa vie. « Je me suis replongé dans ma correspondance de A à Z, mais rien qu’à la lettre A, il y a déjà Auriol, Aron, Arendt… » L’ampleur de la tâche le décourage et, à l’automne de son existence, il décide de parler des proches plutôt que des personnalités, de sa vie plutôt que celle des autres. La guerre, l’amour, les lettres : lui qui a été un homme d’ombres et de coulisses, pratiquant le métier de mettre en lumière l’œuvre des autres, se découvre et nous emmène, avec une plume élégante et précise, dans ses lieux de mémoire, ses regrets, ses blessures et ses joies.
Cette attitude de légèreté brillante et détachée agaçait aussi profondément Régis Debray, aujourd’hui son ami proche. « Il y a quarante ans, on s’échangeait des noms d’oiseaux, parce qu’on ne se connaissait pas vraiment. Je le voyais, lui, avec une cuillère d’argent, et il me voyait, moi, avec un couteau entre les dents. J’avais l’image d’un patricien allant dans le sens du vent et lui d’un trublion dangereusement anachronique. Nos histoires respectives ne coïncidaient pas. Ces clichés sont partis, et nous voilà les meilleurs amis du monde », raconte Debray. Leurs destins se sont croisés : Régis le militant est devenu philosophe ; Pierre « le regardeur » est un peu descendu du piédestal de l’objectivité pour entrer dans l’arène. Lui qui n’avait pris parti que pendant la guerre d’Algérie est de plus en plus engagé dans le débat. « Il mâche de moins en moins ses mots. Cette peur d’être taxé de droite, qui avait quitté Jacques Julliard avant lui, l’a quitté », remarque Alain Finkielkraut. « Je ne suis pas décliniste, je suis pire », dit en souriant celui qui admet avoir voté Macron en 2017 avec enthousiasme, mais être aujourd’hui désillusionné. « Le pauvre, aujourd’hui, j’ai de la peine pour lui, c’est un homme brillant qui était fait pour les temps heureux. Un Giscard en butte au retour du tragique. Il n’a eu que des emmerdes ! » Lors de la publication du livre de Patrick Boucheron L’Histoire mondiale de la France, l’inventeur des « lieux de mémoire » a pris fermement parti contre ce qu’il a qualifié d’arnaque éditoriale, fustigeant une entreprise de déconstruction du récit national. Aujourd’hui, l’invasion du décolonialisme à l’université le désole. Il est de ceux qui fustigent l’islamo-gauchisme et le militantisme qui règnent sur les campus. Il juge que « l’abaissement du niveau est sidérant ». C’est l’une des raisons qu’il a avancées pour en finir avec la revue Le Débat. « L’offre que nous représentons ne correspond plus à la demande », écrit-il dans son dernier article, car la revue cherchait, à rebours d’une époque immédiate et idéologisée, « des analyses, plutôt que des plaidoyers ou des manifestes (…), la confrontation des points de vue plutôt que l’affirmation d’une appartenance ». « Je me suis trompé sur la fin des intellectuels engagés. Aujourd’hui, il n’y a plus d’intellectuels, il n’y a que des engagés ! », souligne-t-il. La fin du Débat a sonné comme la fin d’un monde, celui d’un dialogue intellectuel apaisé, où l’on pouvait s’opposer sans s’offenser. C’est pourquoi Jeunesse n’est pas que le récit d’une vie, mais aussi la genèse d’un des derniers grands intellectuels à la française, capable de conjuguer l’élégance de la langue, la hauteur de vue et la largesse des références (de la poésie à la philosophie, en passant par l’histoire). Bref, cette « politesse de l’intelligence » (Debray) qui manque tant à notre époque. Au milieu de notre entretien, il s’interrompt et nous demande : « Vous croyez à la vie après la mort ? C’est quand même ce qu’il y a de plus intéressant. » Lui n’y croit pas, mais reste habité par le triptyque lévinassien d’une vie réussie : « recevoir, célébrer, transmettre ». Mission accomplie. ■
Son bonheur, il le dit, est d’avoir échoué à Normale Sup. Cela ouvre l’esprit et beaucoup de portes. Voyez Macron, un recalé qui s’est bien rattrapé RÉGIS DEBRAY, ÉCRIVAIN ET PHILOSOPHE
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CHAMPS LIBRES LE FIGARO
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QUELLE PLACE POUR LA FRANCOPHONIE FACE À L’ANGLOPHONIE ?
L’anglais est la première langue parlée dans le monde, résister à ses sirènes paraît inutile. Il serait vain de créer une concurrence entre lui et le français. Alexandre Wolff le répète : « Les terres bénies de l’apprentissage du français sont les terres anglophones. » Ainsi, il faut voir l’engouement que suscitent les classes bilingues à New York, qui ne cessent d’ailleurs de se multiplier. Cela étant, la cohabitation peut parfois se révéler dangereuse et infléchir la forte
2000
Belgique
2010
Luxembourg Monaco
Tunisie Canada
Niger Mali
Haïti
Tchad
Sénégal Burkina Faso
Vietnam
Rwanda Burundi
Côte d’Ivoire Togo Bénin Gabon
Maurice Madagascar
Seuls les États fondateurs de l’OIF en 1970 sont nommés
La francophonie « réelle » PART DES FRANCOPHONES, en % de la population en 2018 absence de données
80 et plus de 50 à 79 de 20 à 49 de 5 à 19 de 1 à 4 moins de 1
Andorre
Monaco
Tunisie Québec St-Pierreet-Miquelon
Guadeloupe Martinique
Djibouti
Guyane française
Gabon Congo Rép. dém. du Congo
Polynésie française
Seychelles
Wallis-et-Futuna
Mayotte Maurice Réunion
FRANCOPHONIE À LA TRAÎNE EN EUROPE ❙ LA
NouvelleCalédonie
Seuls les États ou territoires ayant plus de 50 % de locuteurs francophones sont nommés
2 Les « poids lourds » de la francophonie en millions de francophones en 2018
en % de la population totale du pays
100
100
80 60
80 66,1
60 42,5
40 20
40 13,8
12,7
12,2
11,0
11,5
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La croissance francophone est limitée en Europe. Si le français est la deuxième langue la plus apprise au début du secondaire et la première en Grande-Bretagne, son enseignement a reculé. Dans une carte explicite tirée de L’Atlas de la francophonie, on s’aperçoit que les effectifs de français langue étrangère ont tous diminué en Europe centrale et de l’Est (sauf en Ukraine, Roumanie et Grèce). Alexandre Wolff nuance le phénomène : « Entre 2010 et 2014, on a constaté une baisse de son apprentissage autour de 8 %, puis, quatre ans plus tard, autour de 1 % à 2 %. Cette stabilisation préfigure peut-être un redémarrage ? » On le sait, la première langue étudiée au sein de l’Union européenne est à une majorité écrasante l’anglais (96,2 %, contre 26,1 % pour le français, 16,8 % pour l’allemand et 12,6 % pour l’espagnol, selon L’Atlas). La situation du français est intimement liée au maintien de l’étude d’une deuxième langue. « La clé de l’avenir du français en Europe est là », argue Wolff. L’Espagne, pays qui totalise plus d’un million d’élèves apprenant le français, en est un exemple concret. « Jusqu’aux années 2000, le français était la LV2, mais il a été remplacé par l’anglais, indique Valérie Servissolle, proviseur du lycée français Molière de Madrid. En 2020, le gouvernement régional de Madrid a réduit à une heure au lieu de deux les matières optionnelles, dont le français. Apprendre une langue ainsi est un défi quasi impossible à relever pour les professeurs. » Comment croire à un retour de la croissance du français alors que l’UE nage dans ses contradictions ? Au sein de ses plus hautes instances, le français, langue officielle avec l’allemand et l’anglais, est une chimère. La diversité linguistique, pourtant inscrite dans le traité sur l’Union européenne (TUE), n’est pas respectée puisque l’anglais est roi. D’après des chiffres de la direction générale de la traduction de la Commission, en 1970, 60 % des documents pour lesquels une traduction était demandée étaient originellement rédigés en français. Près de cinquante ans plus tard, ils ne sont plus de 2,58 %. Cette tendance ne devrait pas changer avec le Brexit, alors que, comme le regrettait Louise Mushikiwabo dans une tribune au Monde, l’anglais se classe désormais à la 17e place des langues maternelles les plus parlées dans l’UE… ■
Féd. Wallonie-Bruxelles Luxembourg Suisse
France
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Selon les prévisions, à l’horizon 2050, les francophones seront entre 477 et 747 millions dans le monde et 80 % d’entre eux seront alors Africains. « Le français sera toujours loin derrière l’anglais, mais il pourrait devenir la troisième langue du monde », explique Imma Tor, conseillère langue française et diversité linguistique au cabinet de Louise Mushikiwabo, la secrétaire générale de la Francophonie. Cela étant, il y a des objectifs à atteindre pour que ces tendances se vérifient. Car, dans un espace qui concentre 16 % des richesses mondiales, 24 États font partie des pays les moins avancés (PMA). Ce qui limite la prospérité et le rayonnement de la francophonie. Avec une population qui comptera 90 % de francophones âgés de 15 à 29 ans se pose donc la question de l’éducation. « Il y a eu des progrès ces dernières années, mais il y en a encore à faire pour ce qui est de la qualité de l’enseignement du français et en français », précise Imma Tor. Il faudra ainsi former quelque six millions de professeurs d’ici à 2030. Ifadem, Elan, FIJ, Paire… Nombre de dispositifs ont été mis en place par l’OIF. Sans compter les Alliances françaises, l’AUF, les MLF, les médias et projets culturels, la francophonie, forte de sa présence mondiale, sait se mobiliser. Mais, plus encore que le défi éducatif à relever, se pose la question du numérique. « Beaucoup de pays ont des progrès à faire pour améliorer leurs infrastructures et donner accès internet à leurs populations », continue Imma Tor. Étonnamment, là où on aurait pu s’attendre à ce que le Covid-19 paralyse ces efforts, le virus a été « un accélérateur des nouvelles technologies et un catalyseur de l’innovation. La crise a créé une urgence, on s’est donc donné les moyens de multiplier les formations à distance, afin que même les régions les plus reculées y aient accès. » Ces projets serontils suffisants sur la durée ?
1990
France
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Troisième langue des affaires, quatrième langue sur internet par son nombre d’utilisateurs, cinquième langue du monde, le français bénéficie d’un très grand rayonnement. « La francophonie est en croissance continue depuis une dizaine d’années, rapporte Alexandre Wolff, responsable de l’Observatoire de la langue française. Cela se confirme grâce à une dynamique démographique assez forte en Afrique, subsaharienne notamment. » On dénombre 60 % de locuteurs quotidiens de français sur ce continent contre 33,4 % en Europe, comme on peut le lire dans l’excellent Atlas de la francophonie d’Ariane Poissonnier. Cette croissance est également portée par les progrès effectués en matière d’éducation. En Afrique, plus de 81 millions d’élèves sont scolarisés en français, dont 19 millions rien qu’en RDC. De fait, la langue française n’appartient plus aux Français de France mais aux francophones. « Elle est d’autant, voire davantage africaine », comme l’a souligné Emmanuel Macron. Langue d’étude, le français ne s’arrête pas aux frontières de l’école. Si au Sénégal, il est surtout parlé entre amis, en Côte d’Ivoire par exemple, il est également employé dans le sérail familial. La langue est vivace, parce qu’elle a prouvé son utilité. « Elle est langue seconde au Maghreb, avance Alexandre Wolff. Le français permet une plus-value, notamment dans le milieu professionnel. » Ainsi, à Abidjan, selon des enquêtes Kantar-TNS, 98 % des Abdijanais pensent qu’être francophone est essentiel pour obtenir un travail. Même son de cloche au Kenya et au Nigeria, terres pourtant anglophones, où le français arrive à la première place des compétences linguistiques requises dans les offres d’emploi. Bien sûr, cet avantage de parler français dans le milieu professionnel se ressent dans l’économie. « Il y a une dynamique assez forte en Afrique comme aux Caraïbes, rapporte Wolff. Des unions régionales et douanières se créent grâce à cette langue commune. Son partage favorise les échanges commerciaux à hauteur de 22 % entre une trentaine de pays francophones. » Ainsi, la langue peut servir de levier à la croissance et au rayonnement des pays, au point d’en attirer d’autres, y compris non francophones. « Dans l’Afrique dite anglophone (Ghana, Rwanda, Nigeria) est favorisé l’apprentissage du français pour s’ouvrir aux marchés francophones ».
UNE TROISIÈME PLACE MONDIALE ❙ VERS DU FRANÇAIS EN 2050 ?
1980
membres (54) membres associés (7) observateurs (27)
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COMMENT SE PORTE LA FRANCOPHONIE ?
Parlé par plus de 300 millions de personnes dans les 88 pays membres de l’OIF, le français, porté par la croissance démographique en Afrique, pourrait devenir la troisième langue du monde à l’horizon 2050.
Dates d’adhésion 1971
Alg ér
GÉOPOLITIQUE La francophonie ne s’accommode ni des cartes ni des territoires. Ses frontières sont floues, son périmètre indistinct. Depuis l’invention de son nom en 1880, sa définition n’a cessé d’évoluer. Mais peut-être peut-on se référer à la formule de Léopold Sédar Senghor, qui lui donna son acception moderne en 1962 : « Il est d’un mot, question de nous servir de ce merveilleux outil, trouvé dans les décombres du régime colonial. De cet outil qu’est la langue française. La francophonie, c’est cet humanisme intégral qui se tisse autour de la terre, cette symbiose des énergies dormantes de tous les continents… » Présente sur les cinq continents, la francophonie peut vulgairement se décliner sous deux formes. La francophonie « vécue », qui permet le partage d’une langue, le français, dans des espaces souvent plurilingues mais aussi d’une culture, d’une histoire, de valeurs, et la francophonie institutionnelle, avec un « F » capital, soit l’Organisation internationale de la Francophonie, qui regroupe 88 États. Selon les dernières données, plus de 300 millions de francophones se répartissent sur le globe. Un chiffre en augmentation de 10 % entre 2014 et 2018. Cette croissance se confirme-t-elle trois ans plus tard ?
États et gouvernements
Fra nc e D. Co ng o
£@AliceDeveley
croissance du français. Ainsi, au Canada, la francophonie est menacée. Si la langue reste vivace – grâce, entre autres, aux efforts de l’Office québécois de la langue française - hormis le Québec, qui résiste encore et toujours à l’envahisseur anglais, le français… tire la langue. « La vraie minorité linguistique dans un pays dit bilingue, ce sont les francophones », remarque Wolff. Par leur proximité géographique avec les États-Unis, l’Alberta, la Colombie-Britannique et l’Ontario concentrent moins de 4 % d’habitants dont le français est la langue maternelle (voir « Le Figaro » du 2 mars). Et cela ne va pas aller en s’arrangeant, avec le Covid car l’immigration, qui faisait croître la population francophone, est en baisse depuis un an. La proposition de loi de Mélanie Joly, ministre canadienne de la Francophonie, visant à mieux protéger le français sera-t-elle suffisante pour enrayer ce déclin ? L’anglais cannibalise la croissance francophone d’Ouest en Est, jusqu’au Vietnam. Depuis 2010 et le lancement du « Plan 2025 », l’anglais y est la seule langue obligatoire dans le secondaire, peut-on lire dans La Langue française dans le monde 2015-2018 (Gallimard). Ce changement a eu des répercussions sur l’enseignement et la place du français, première langue étrangère et en option, qui est en fort recul, « voire en voie de disparition ». On assiste ici à une déperdition du nombre d’établissements (119 en 2009, 31 en 2016) comme de ses effectifs (près de 29 000 élèves en 2009, 2 400 en 2016). Plus globalement, « l’Asie-Océanie accuse une baisse de 34 % du nombre de ses apprenants en FLE ».
ORGANISATION INTERNATIONALE DE LA FRANCOPHONIE
R.
Alice Develey
1 Le monde francophone
La francophonie « officielle »
*Fédération Wallonie-Bruxelles
3 L’Afrique, avenir de la francophonie ? PART DE CHAQUE ZONE GÉOGRAPHIQUE PARMI LES LOCUTEURS QUOTIDIENS DU FRANÇAIS, en %
44,4
33,4
Afrique subsaharienne et océan Indien
Europe
14,9
7
Afrique du Nord et Moyen-Orient Amérique 0,3 Asie* et Océanie
*y compris Russie et Caucase
4 81,6 millions d’élèves dans 36 pays ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS seule ou principale dès l’entrée à l’école avec une ou plusieurs autres langues, entièrement ou partiellement selon les niveaux
Belgique France
ÉLÈVES SCOLARISÉS EN FRANÇAIS PAR ZONE EN 2018 nombre d’élèves (en millions)
Andorre
Féd. Wallonie-Bruxelles Luxembourg Suisse romande Monaco
(%) part de chaque zone géographique Maroc Canada
Québec NouveauBrunswick
Algérie Tunisie
EUROPE 16,7 (20,45 %)
St-Pierreet-Miquelon
AMÉRIQUE 5,2 (6,4 %)
Égypte
Haïti Guadeloupe Mauritanie 1 2 Sénégal 3 Guinée 4 6 5 Guyane française Cameroun Gabon Congo Polynésie française Rép. dém. du Congo Martinique
Tchad
AFRIQUE DU NORD ET MOYEN-ORIENT 0,16 (0,2 %) Djibouti
Burundi Comores Mayotte Madagascar
1. Mali 2. Niger 3. Burkina Faso 4. Côte d’Ivoire 5. Togo 6. Bénin
ASIE ET OCÉANIE 0,12
(0,15 %)
Wallis-et-Futuna Vanuatu
Réunion
NouvelleCalédonie
59,4
(72,8 %)
AFRIQUE SUBSAHARIENNE ET OCEAN INDIEN Source : Ariane Poissonnier, Atlas de la francophonie. Le français, plus qu’une langue, Autrement
Liban
A
La francophonie gagne-t-elle du terrain ?
Infographie
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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CHAMPS LIBRES DÉBATS
La loi confortant les principes républicains ne menace en rien la liberté des religions
L
FABIEN CLAIREFOND
e 16 février 2020, le projet de loi confortant le respect des principes de la République était très largement adopté par l’Assemblée nationale. Il poursuit actuellement son parcours législatif au Sénat, dont les membres, je l’espère, continueront de l’enrichir. Car ce texte voulu par le président de la République et le premier ministre est l’une des pierres angulaires de la lutte que nous menons contre le séparatisme, lequel est d’abord le fruit depuis plusieurs années d’une idéologie dangereuse, l’islamisme. Ce texte a été mûrement réfléchi, longuement pensé, soigneusement pesé. Il fait l’objet d’une concertation de grande ampleur, au cours de laquelle ont été entendus intellectuels, universitaires, représentants du monde associatif, ainsi que les responsables de tous les cultes. Cependant, depuis quelques semaines, les cultes chrétiens manifestent leur inquiétude. Le projet de loi porterait gravement atteinte aux libertés fondamentales, comme la liberté de culte, la liberté d’association, la liberté d’enseignement ou la liberté d’opinion, si l’on en croit la tribune parue le 10 mars dans Le Figaro, cosignée par les présidents de la Fédération protestante, de la Conférence des évêques et de l’Association des évêques orthodoxes. Dans ce document, Le ministre de l’Intérieur, en charge des Cultes, les signataires répond aux présidents de la Conférence des évêques en appellent aux mânes de la loi du de France, de la Fédération protestante de France et de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France, 9 décembre 1905 concernant la qui ont exprimé leurs inquiétudes envers le projet séparation des de loi contre le séparatisme dans une tribune Églises et de l’État, commune parue dans Le Figaro le 10 mars. que le projet de loi
GÉRALD DARMANIN
LES CINQ SENS À L’ÉPREUVE DU COVID
A 2021-03-15T09:27:32+01:00
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de se contenter d’affirmations floues. Ces dernières semaines, certains « spécialistes » se sont crus autorisés à proclamer des contre-vérités dont les conséquences sont lourdes sur le débat public : non, l’article 27 de ce projet de loi ne permet pas au préfet de dissoudre une association qui n’aurait pas déclaré sa qualité cultuelle ; non, l’article 26 ne soumet pas la nomination d’un ministre du culte à l’approbation de l’État ; non, les obligations de transparence de l’exercice du culte n’ont pas été créées par le projet de loi ; non, l’État ne peut pas obliger qui que ce soit à adhérer à une charte pour exercer son culte. Nous nous plaçons dans la droite ligne d’Aristide Briand, rapporteur de la loi de séparation, qui constatait, lors de son discours final devant la Chambre, le 3 juillet 1905, que la convocation des grands principes devait s’appuyer sur l’étude scrupuleuse des textes : « Trouvez dans cette loi une disposition qui justifie vos griefs (…), montrez un seul article qui vous permette de dire demain aux électeurs : “Vous voyez ! Nous avions raison de vous mettre en garde. C’en est fini de la liberté de conscience, c’en est fini du libre exercice du culte dans ce pays.” Non, vous ne pouvez plus dire cela, car manifestement ce ne serait pas vrai. » La société française a été bouleversée par les attaques terroristes que nous avons vécues. Elle est inquiète de l’émergence d’un séparatisme identitaire qui se cache derrière le religieux. Cette loi nous donne les moyens d’y faire face, dans le respect de ce qui fait notre identité républicaine. Cela suppose une mobilisation de toutes les forces vives du pays, cultes compris. Le dialogue avec les institutions religieuses doit donc se poursuivre : même si des désaccords peuvent parfois se faire jour, il est toujours fructueux.
Martin Steffens : « Le confinement nous a placés devant l’ambiguïté du silence » PROPOS RECUEILLIS PAR
LAURENCE DE CHARETTE
Depuis une année, l’obsession du coronavirus et les restrictions de vie semblent avoir fait de nous des êtres unidimensionnels perdus dans un monde vidé du sensible. L’homme se rêvait « augmenté » pour décupler ses facultés ? Le voici confiné, privé du plus simple usage de ses sens, prêt à sacrifier ce qui fait son humanité : toucher, voir, sentir, écouter, goûter… Marie de Hennezel, Olivier Rey, Fabrice Hadjadj, Martin Steffens* et Jean-Robert Pitte se sont penchés sur ces sens dont ils explorent les mouvements intimes. Il apparaît à leur lecture que l’heure de la « déclaration de guerre » - cette drôle de guerre vécue enfermés, distanciés, masqués fut, aussi, celle d’une capitulation, de renoncements successifs dont nous n’avons peut-être pas immédiatement saisi la portée. Ils nous montrent qu’il serait vain de croire que la privation que nous vivons n’est pas, en profondeur, une mutation. Car cette souffrance diffuse qui s’est glissée dans notre société, c’est celle de cet homme de chair, de sang, de terre, cet être de relation dont la véritable nature est aujourd’hui mise à mal. L. de C.
Depuis l’origine, ce type d’association est soumis à des contraintes plus fortes que les structures de droit commun (objet restreint, obligations de transparence) et bénéficie d’avantages supérieurs (aides fiscales, immobilières, capacité de recevoir des dons et des legs). Le projet de loi creuse exactement ce même sillon : il confère aux associations cultuelles de nouveaux avantages (détention d’immeubles de rapport acquis à titre gratuit), consolide leur gouvernance (clause « anti-putsch » empêchant les prises de contrôle inopinées), Nous confortons le fonctionnement renforce leurs des associations cultuelles, forme obligations juridique spécifique créée en 1905. de bonne gestion financière et Depuis l’origine, ce type d’association modernise la police est soumis à des contraintes plus fortes des cultes pour éviter, comme et bénéficie d’avantages supérieurs pour la mosquée Cette 24e modification, apportée de Pantin, que les lieux de culte ne se transforment en relais d’idéologies par le projet de loi, serait-elle liberticide ? haineuses ou violentes. Non. Est-elle bienvenue ? Oui. Certes, une disposition inédite est créée Si le texte propose ces modifications, par le texte : la transparence des c’est que le paysage cultuel a évolué financements étrangers. Mais qui peut dire depuis un siècle. La sociologie des Français que l’État n’aurait pas le droit d’avoir a changé, le rapport au religieux aussi. Les connaissance de ceux qui, sur son propre conditions d’administration des structures territoire, s’intéressent à cette activité religieuses n’ont aujourd’hui plus rien si sensible qu’est le culte ? La souveraineté à voir avec les pratiques d’il y a cent ans. l’exige ; c’est de cette même logique En outre, un nouveau culte a émergé : que procède la décision du président de la le culte musulman. Actuellement, 92 % République de mettre fin au dispositif des des mosquées sont gérées sous le statut imams détachés par des États étrangers. associatif de droit commun, celui de 1901. Le droit des cultes est une matière Il s’ensuit des ennuis fréquents de gestion complexe, fruit de notre histoire. et une confusion des genres entre C’est une matière sensible, qui touche les activités cultuelles et les autres. au for intérieur des croyants. Mais elle C’est pourquoi le projet de loi a pour concerne aussi quelque chose d’essentiel ambition de conforter le fonctionnement pour la République : l’exercice des associations cultuelles, cette forme d’une liberté publique fondamentale. juridique spécifique créée en 1905 et qui a Pour cette raison, il n’est pas raisonnable permis l’épanouissement du pluralisme.
LE FIGARO. - Vous appelez l’ouïe « sens de la profondeur ». Pourquoi cela ? Martin STEFFENS. - La vue et le toucher restent à la surface des choses ; l’ouïe, c’est le sens qui veut vérifier comment sonnent les choses. Si nous faisons de la musique, si nous creusons des objets pour les faire sonner, c’est pour trouver à l’extérieur de nous cette intériorité qui nous est propre. L’ouïe nous permet d’accéder à notre intériorité spirituelle, de recueillir le monde sans le dévorer, de l’avoir en nous sans le manger. En quoi ce sens a-t-il été affecté par la période que nous venons de vivre, et plus particulièrement par le confinement ? Nous avons été placés devant l’ambiguïté du silence. Il y a eu deux types de silence :
celui de l’appartement vide, un silence terrible, et puis le silence habité - une qualité de silence que certains ont redécouverte pendant le premier confinement. Il s’agit de la même absence d’onde, mais, dans un cas, elle exprime notre angoisse ; dans l’autre, c’est un silence qui nous oblige, nous rassemble. Car l’ouïe est ce sens capable d’une présence qui n’est pas manifeste comme elle l’est pour le toucher ou la vue. L’ouïe va recevoir ce silence, qui peut être présence des absents ou au contraire absence de toute présence. Vous évoquez là un silence qui a pu par certains aspects être salutaire. Mais la vie n’est-elle pas toujours bruyante ? Une maison, ou bien une terrasse où les gens discutent, par exemple, peuvent émettre des sons, oui, car c’est de la vie. Mais ce ne sont pas des « bruits ». Sophocle dit : « Tout est bruit pour qui a peur. » Nous vivons aujourd’hui une extension du domaine du bruit. Par exemple, ces incessants rappels à la distanciation. La crise a bouleversé en profondeur notre mode de relation à l’autre, dites-vous. Notre sens de l’« écoute » de l’autre serait en quelque sorte atteint ? La première chose que nous faisons en venant au monde, c’est de crier, c’est-àdire de nous confier à l’autre, à son ouïe, à sa capacité de se sentir obligé par notre cri. Simone Weil disait que le cri, c’est la technique la plus pauvre qui soit ; c’est dire simplement « au secours ». La première chose que l’on n’a pas entendue, c’est le cri des morts – et cela continue ! Or l’ouïe doit se faire d’autant plus fine qu’il s’agit d’une personne qui ne peut même plus crier pour dire « prenez soin de moi ! ». Si l’humanité a commencé par la toilette des morts, c’est que l’homme était devenu capable d’entendre le cri de celui qui ne criait plus. De la même façon, un ado qui va mal, c’est un ado qui est rongé par son cri, et il n’ira mieux que si un adulte FABIEN CLAIREFOND
SÉRIE (4/5)
viendrait trahir. L’argument totémique est commode, mais c’est vite oublier que le régime administratif des cultes en France n’a cessé d’évoluer sur tout le siècle. Vingt-trois modifications de la loi de séparation sont intervenues depuis 1905. Ce qui, en revanche, n’a jamais varié, ce sont les grands principes : liberté de conscience, liberté d’exercice public du culte, forme associative de l’exercice du culte, qui tous trouvent leurs limites dans le respect de l’ordre public. Ces principes sont là comme des « masses de granit ».
entend ce cri silencieux. Mais nous n’avons entendu que tardivement, à chaque fois, toutes ces souffrances. Parlant sans cesse « des plus fragiles » pour justifier les mesures sanitaires, nous nous sommes rendus inaptes aux défunts et aux enfants, et jusqu’à l’appel des enfants à naître, si l’on en croit la baisse importante de la natalité. Il y a pourtant un appel silencieux dans le cœur des hommes et des femmes, il y a en nous un cri pour que la vie, parce qu’elle est bonne, soit donnée. Ce cri n’est plus entendu. Car la vie aujourd’hui n’est plus vue d’abord comme un beau risque à prendre. À quoi tenonsnous ? À un fil, celui de la relation, et c’est ce fil que nous sommes en train de détruire avec les névroses de la peur.
Cette rupture que vous évoquez est-elle selon vous durable ? Oui, car l’oreille est le sens du temps, et notre temps est altéré. Les philosophes de la musique comme Nietzsche ou Ernst Bloch montrent que la musique nous libère du régime de l’image. L’image se donne d’un coup à nous ; la musique, elle, ne se donne que dans le temps. Écouter quelqu’un signifie que l’on accepte de perdre du temps, car on ne prend son temps que si on a par avance accepté de le perdre. Il faut donc offrir son attention pour recevoir, c’est un cadeau. Il s’agit d’une situation où je ne peux recevoir que ce que j’ai déjà offert. Lors du premier confinement, beaucoup se sont réjouis de pouvoir prendre leur temps, mais, aujourd’hui, je n’entends parler que d’un épuisement général, dû au manque de L’ouïe est ce sens capable d’une temps. Le travail s’est installé dans la maison, l’école présence qui n’est pas manifeste se fait dans la maison, et la comme elle l’est pour le toucher famille qui était un îlot avec ou la vue. L’ouie est l’organe du temps sa temporalité propre est entrée dans ce « temps de La chrétienté était cette découverte inl’accélération du capitalisme » si bien décroyable d’un Dieu qui crie. Le premier crit par Hartmut Rosa. Dans le beau texte geste du Dieu incarné, c’est le cri du Il faut apprendre à aimer, Nietzsche parle bébé, et le dernier, c’est le cri sur la de l’expérience d’une mélodie qui d’abord croix, le cri de l’homme qui meurt. Or, nous est étrangère et qui, si on lui offre noavec la crise sanitaire, nous assistons à tre hospitalité, nous récompense en retour une inversion de toutes les valeurs chréde ce cadeau premier en devenant celle tiennes. Nous avons quitté le régime de dont nous tomberons profondément la relation à l’autre qui était celui de la amoureux. Mais voilà, dans le temps de chrétienté. l’accélération, cette disponibilité n’existe plus. L’ouïe est l’organe du temps. Rappelons-nous ces trois mots de saint Augustin Pourquoi liez-vous si intimement sur la prière : « Tace et clama » (« tais-toi et la relation à l’ouïe ? crie »). Faire silence pour laisser monter en Ce n’est pas un hasard si nous avons deux soi le cri pour plus de justice, plus d’amour. oreilles. Lorsqu’on écoute quelqu’un, il y Il faut écouter ce cri, sans quoi l’on est coua une oreille qui reste près de nous, et qui pé de sa vie. ■ écoute ce que nous comprenons de ce qu’il nous dit - avec notre prisme. * Philosophe, Martin Seffens est l’auteur ou L’autre oreille, elle, va se poser sur la le coauteur d’une vingtaine d’ouvrages. Il a bouche de l’autre, sans préjuger de ce notamment publié « Nietzsche » (Ellipses, qu’il va dire ; elle va essayer de se laisser 2008), « Petit traité de la joie. Consentir à la surprendre par l’inouï, le jamais entenvie » (Éditions Salvator, 2011) et « Marcher du. Dans l’écoute véritable on doit donc la nuit. Textes de patience et de résistance » « prêter l’oreille » - qui se dit justement (Desclée de Brouwer, 2020). au singulier. Il faut entendre même ce que l’autre ne nous a pas dit, et parfois » Retrouvez la version intégrale même ce qu’il ignorait vouloir nous dire. de l’entretien avec Martin Steffens sur FigaroVox Premium L’ouïe, c’est le sens de la relation, de la réciprocité en soi. www.lefigaro.fr/vox
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lundi 15 mars 2021
CHAMPS LIBRES LE FIGARO
OPINIONS CHRONIQUE Nicolas Baverez £@NicolasBaverez
La revanche d’Arthur de Gobineau
A
rthur de Gobineau publia son Essai sur l’inégalité des races humaines entre 1853 et 1855. Sa thèse consistait à affirmer que l’histoire se confond avec celle des races, qui obéissent à une classification et un ordre stricts et immuables : « L’humanité est divisée en races selon une hiérarchie logique, permanente et indélébile. » Il en déduisait trois conclusions : la critique radicale de la démocratie fondée sur l’égalité entre les individus ; le bien-fondé de la colonisation qui assurait la domination de la race blanche censément supérieure ; la course inévitable des sociétés et des civilisations vers le néant du fait du métissage de la population.
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Bien plus que Darwin, Gobineau est donc l’inventeur du racisme érigé en doctrine politique, à partir de postulats faussement scientifiques. Ses idées, restées marginales en France, ont prospéré en Allemagne, notamment à travers son amitié avec Wagner, et aux États-Unis, où elles furent utilisées par les partisans de l’esclavage. Elles contribuèrent à la violente crise de la démocratie de la fin du XIXe siècle, marquée par une double poussée populiste et antisémite, puis à l’émergence du totalitarisme nazi fondé sur l’idolâtrie de la race. Alexis de Tocqueville, dont Gobineau fut le collaborateur, avait d’emblée dénoncé sa « philosophie de directeur de haras » en défendant le caractère
ENTRE GUILLEMETS 15 mars 1738 : naissance de l’italien Cesare Beccaria, homme des Lumières et théoricien du droit pénal. COSTA/LEEMAGE
« Des délits et des peines » (1764)
La peine doit absolument être publique, prompte, nécessaire (…), proportionnée au délit et déterminée par la loi»
universel des droits de l’homme, en soulignant que la généralisation des inégalités ne pouvait conduire qu’à une spirale de haine et de violence, en refusant tout déterminisme de la race pour réaffirmer la dignité de tous les hommes et leur liberté de décider de leur destin. C’est grâce à ces valeurs et ces principes que la démocratie a résisté puis vaincu au cours du XXe siècle les idéologies de la race et de la classe, qui se revendiquaient d’un sens de l’histoire et s’appuyaient sur un mélange de terreur et de mensonges adossés à une fausse science. L’ironie veut que les idées de Gobineau reviennent aujourd’hui en force sous le masque du racialisme et du décolonialisme, dont les tenants donnent raison à Pascal, qui rappelait que « qui veut faire l’ange fait la bête ». Certes, la hiérarchie des races, des sexes, des cultures ou des civilisations se trouve inversée : les Noirs, les métis, les femmes, les anciennes colonies, les pays du Sud ou l’islam sont érigés en modèles politiques et moraux ; les Blancs, les hommes, les Églises et l’Occident sont voués aux gémonies comme autant de figures de domination. Mais sous cette inversion des pôles pointe un raisonnement identique : les races et la colonisation seraient des structures permanentes et intangibles qui constitueraient le véritable moteur de l’histoire. Les conséquences intellectuelles et politiques de cet antiracisme radical sont tout aussi nihilistes que les vaticinations de Gobineau. Dès lors que le racisme et le colonialisme sont présumés systémiques, les libertés fondamentales - à commencer par la liberté d’expression - sont formelles et se réduisent à un masque de l’oppression, comme chez Marx : ceci justifie de poursuivre la mort
sociale et intellectuelle - voire physique de ceux qui ne partagent pas ces idées à travers les mobilisations de la « woke culture », qui entend régir toutes les facettes de la vie intellectuelle, mais aussi économique, sociale et politique. La déracisation et le décolonialisme passent dès lors par la réécriture de l’histoire, par la censure de la littérature, mais aussi par la construction d’un homme nouveau, assigné à résidence par sa race, son ethnie, sa religion ou son sexe. L’idolâtrie des identités dissout l’idée d’humanité partageant une nature et des valeurs communes. L’humanité étant déchirée en races et en communautés irréductiblement opposées, l’histoire des hommes obéit à une guerre inexpiable et illimitée des races, des ethnies, des religions et des sexes. Ces théories sont incompatibles avec la démocratie car elles récusent non seulement l’État de droit, le pluralisme des opinions, la modération dans l’exercice du pouvoir, mais le principe même d’une communauté de citoyens, la nation étant réduite à une agrégation d’individus et de tribus. C’est la raison d’être et l’honneur de la démocratie d’accepter le développement et la confrontation des idées et des points de vue, y compris liberticides. Ceci n’implique en rien qu’il faille, au nom d’un lâche soulagement, les ériger en vérité, les mettre au cœur de l’enseignement et de la recherche, ou leur reconnaître force de loi. Il est plus que temps de mobiliser pour défendre contre les émules de Gobineau l’universalisme des droits de l’homme. Il ne faut pas rééditer l’erreur tragique des pacifistes des années 1930 ou des compagnons de route des années 1950 qui accablaient les nations libres en faisant le jeu des totalitarismes.
Meghan et Harry : la royauté britannique est-elle soluble dans la modernité ?
T
CLAIREFOND
elle est la vraie question que pose l’entretien choc accordé par Meghan et Harry, duchesse et duc de Sussex, à Oprah Winfrey – une question à laquelle, à la fin du XIXe siècle, l’essayiste Maurice Spronck croyait déjà pouvoir répondre par l’affirmative : « L’impression qui se dégage, c’est que la royauté s’en va. Et elle s’en va, non seulement parce que les institutions et les sentiments monarchiques n’existent plus chez les peuples, mais aussi par ce qu’ils ne semblent plus guère exister chez les monarques eux-mêmes. » Que le sentiment monarchique « n’exist(e) plus chez les peuples », c’est à voir : si tel était le cas, l’interview du petit-fils de la reine et de son épouse n’eût pas été un événement mondial – et, à un niveau comparable, on peut supposer que l’entretien du fils (imaginaire) de Mme Merkel annonçant à grand fracas qu’il quitte la CDU pour s’installer au Portugal n’aurait peut-être pas eu le même succès planétaire. Mais ce qui importe ici, c’est l’impact de la modernité sur les monarques et leurs familles et la disparition supposée, chez eux, du « sentiment monarchique ». Car, de fait, les « royals » sont aussi des gens « comme les autres » : ils ont, dans une certaine mesure, les mêmes goûts, les mêmes aspirations, les mêmes désirs que leurs contemporains. Voilà pourquoi, dans Meghan Markle entreprend de cumuler l’univers numérisé les deux figures chéries de l’époque, la victime qui est le nôtre et et la star. Mais son attitude ne fait que conforter, que nous partageons par contraste, le prestige d’Elizabeth II. Et il en faudrait avec eux, le fait davantage pour menacer la pérennité de la Couronne, d’appartenir à une dynastie remontant juge l’universitaire et écrivain*.
FRÉDÉRIC ROUVILLOIS
envie qu’on les rapproche : deux femmes libérées, modernes, prêtes à claquer les portes vermoulues de Buckingham pour satisfaire leurs désirs, et à les claquer d’autant plus fort qu’elles estiment n’avoir pas bénéficié de tous les égards auxquels elles avaient droit. Meghan rêve de devenir, comme sa défunte belle-mère, la combinaison idéale de la victime et de la star, les deux icônes du monde contemporain. Victime, Meghan, parce que (faute d’avoir été trompée par son époux) elle aurait subi des propos racistes de la part d’une personne qu’elle ne Faut-il en conclure que la royauté désigne pas, mais dont s’en va, dissoute dans l’acide de le crime retomberait sur la famille Windsor, l’individualisme moderne, dès lors coupable d’avoir que le sentiment monarchique n’existe couvert le criminel, puis sur l’institution même plus dans les familles royales ? monarchique dans Une image, une seule, suffit à balayer son ensemble. Victime cette affirmation d’être restée dans l’ombre, contrainte à la discrétion, condamné à vie à renoncer Or, en ce qui concerne Meghan Markle, à la première marche du podium acquise les choses paraissaient d’emblée assez mal par droit de naissance à William et Kate, engagées. Habituée dès son plus jeune âge puis à leurs enfants, sans qu’ils aient eu à à faire et à obtenir ce qu’elle voulait, travailler, eux, pour monter les échelons traitée en princesse, mais façon un à un. Victime, du coup, d’une Hollywood, par un père en pâmoison, sans intolérable injustice : « Je m’voyais déjà en doute Meghan, devenue princesse pour haut de l’affiche », chantait Aznavour. La de vrai, fut-elle fort déçue de constater moindre des choses était donc que Meghan que ce n’était pas la même chose. Que se révolte contre un système qui ne faisait le fait d’être princesse ne signifie pas que pas droit à son mérite, et qui lui interdisait l’on a tous les droits, et que cela implique à tout jamais d’y être, elle, en haut en outre un ensemble de devoirs auxquels, de l’affiche. Victime et star, star parce en petite fille gâtée, elle n’avait aucune que victime, en mesure désormais envie de se soumettre. Pas besoin dès de faire pleurer sur son sort des millions lors d’être grand sorcier pour comprendre de spectateurs qui regardaient jadis les causes de sa dépression, longuement d’un œil sec les séries télévisées évoquée lors de l’entretien télévisé. où elle exerçait ses talents d’actrice. À ce propos, on a pu comparer Meghan Faut-il en conclure que la royauté à Lady Di, et elle-même semble avoir très à la nuit des temps n’empêche pas d’être soumis à la tentation : celle d’un individualisme narcissique qui entend faire prévaloir le droit d’« être heureux à sa manière », de « mener sa vie comme on l’entend », de s’épanouir sans être contraint par un carcan d’obligations, de devoirs, d’usages et de traditions imposés de l’extérieur - mais qui sont indissociables de l’appartenance à une famille royale, surtout régnante. Toute la question est alors de savoir si l’on cédera ou non à cette tentation…
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s’en va, dissoute dans l’acide de l’individualisme moderne, dès lors que le sentiment monarchique n’existe même plus dans les familles royales ? Une image, une seule, suffit à balayer cette affirmation, datant du même jour que l’entretien : celle de la reine Elizabeth II s’avançant entre deux rangées de drapeaux, toute droite malgré son grand âge, la santé chancelante de son mari et le chagrin, sans doute, d’être ainsi lâchée par son petit-fils préféré : puis s’asseyant à une table austère pour y prononcer, une fois de plus et comme si de rien n’était, son discours annuel sur le Commonwealth, regardant droit devant elle et saluant au passage les « exemples de courage, de détermination, de dévouement désintéressé et de sens du devoir ». L’image renvoie irrésistiblement à celle de son aïeule, la reine Victoria. C’est vers la fin de son règne que certains ont cru pouvoir dresser l’acte de décès de la monarchie britannique depuis périodiquement ressorti de la naphtaline, en l’honneur de Wallis Simpson en 1936, de Lady Diana en 1997, de Meghan Markle aujourd’hui – avant d’être rangé au placard que l’on referme en se disant que la Couronne britannique en a vu d’autres, qu’elle en verra d’autres, mais qu’elle a encore de beaux jours devant elle. * Délégué général de la Fondation du Pont-Neuf (think-tank). Auteur de nombreux ouvrages remarqués, Frédéric Rouvillois a notamment publié « Histoire de la politesse de la Révolution à nos jours » (Flammarion, 2006), « Histoire du snobisme » (Flammarion, 2008), « L’Invention du Progrès, 1680-1730. Aux origines de la pensée totalitaire » (Éditions du CNRS, 2011) et « Liquidation. Emmanuel Macron et le saint-simonisme » (Éditions du Cerf, 2020).
“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais
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lundi 15 mars 2021 LE FIGARO - N° 23 814 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr
> FOCUS lefigaro.fr/economie
NÉGOCIATIONS AU SOMMET SUR LA SORTIE DE CRISE
FORD MEDIA CENTER, , SIMON LUETHI/FORD MEDIA CENTER, , MANDEL NGAN/AFP, FLORENT BARDOS/ABACA
Jean Castex, premier ministre
AUDIOVISUEL
LES FEMMES PRENNENT LE POUVOIR DE L’INFO PAGE 28
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économie
Le plan Biden, une locomotive pour la croissance mondiale
Le programme de 1 900 milliards adopté aux États-Unis aura un impact chez leurs grands partenaires. Mais il risque aussi de creuser l’écart avec l’Europe. PAGES 24 ET 25
Danone : Gilles Schnepp remplace Emmanuel Faber C’est l’épilogue de plusieurs mois de crise de gouvernance chez Danone. Réuni ce dimanche à partir de 18 heures, le conseil d’administration du groupe a acté le départ de son PDG, Emmanuel Faber. Ce dernier était sur la sellette depuis des mois. Une partie des administrateurs lui reprochaient son mode de management solitaire et autoritaire, tandis que des actionnaires activistes, à commencer par le fonds Artisan Partners (3 % du capital), récla-
le PLUS du FIGARO ÉCO BLOC-NOTES
Réconcilions nucléaire et énergies vertes PAR JACQUES-OLIVIER MARTIN PAGE 27
LIBRES ÉCHANGES
Pourquoi la bureaucratie atteint son paroxysme sous le quinquennat PAR JEAN-PIERRE ROBIN PAGE 27
ÉNERGIE
Les valorisations des entreprises d’énergies renouvelables s’envolent et font craindre une bulle financière
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maient publiquement son départ. Le 1er mars dernier, Emmanuel Faber avait accepté d’enclencher la dissociation des fonctions de président et de directeur général. Cette nouvelle gouvernance était censée entrer en vigueur lors de la prise de fonction du futur patron opérationnel, Emmanuel Faber se concentrant alors sur les seules fonctions de président. Mais le retard pris dans le lancement du processus de sélection du futur directeur général, et
la volonté de l’actuel PDG de peser sur le choix de son successeur, ont convaincu le board de reprendre les choses en main. Le conseil d’administration a élu à sa présidence Gilles Schnepp. Cet ancien PDG de Legrand, âgé de 62 ans, avait été coopté midécembre, avec vocation à devenir l’administrateur référent de Danone à l’issue de l’assemblée générale, le 29 avril prochain. Mais le 1er mars, Emmanuel Faber avait réussi à imposer la nomina-
tion d’un de ses proches, JeanMichel Severino, comme administrateur référent. Le nouveau président du conseil d’administration devra accélérer le processus de recrutement du futur directeur général. L’incertitude sur le rôle à venir d’Emmanuel Faber étant levée, la chasse de têtes pourra être menée dans des conditions plus sereines. Le conseil a déjà identifié plusieurs candidats. OLIVIA DÉTROYAT ET IVAN LETESSIER
L'HISTOIRE
La cinquième génération des Ford au conseil du constructeur américain
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es racines et des ailes » pourrait être le slogan de Ford. Alors que le 5e constructeur mondial accélère sa transformation, vers l’électrique notamment, sous la houlette d’un nouveau boss et d’un nouveau designer, la famille du fondateur, Henry Ford, se renforce au conseil d’administration avec la montée de deux représentants de la 5e génération. À l’occasion de l’assemblée générale du 13 mai, les actionnaires se prononceront sur les nominations d’Alexandra Ford English (à gauche), 33 ans, et de Henry Ford III (à droite), 40 ans, tous deux arrière-arrièrepetits-enfants de Henry Ford. Les Ford font partie des grandes dynasties de l’automobile à l’instar des Peugeot (PSA), Toyoda (Toyota), Agnelli (Fiat) et Quandt (BMW). Actionnaire minoritaire mais bénéficiant de droits de vote renforcés, la famille a toujours été représentée à la
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Le coup est rude. Le laboratoire AstraZeneca, qui promettait encore en début de semaine dernière de tenir son objectif de livrer 40 millions de doses à l’Union européenne au premier trimestre, a révisé vendredi ce chiffre à la baisse d’une dizaine de millions de doses. Au deuxième trimestre, il estime désormais qu’il en livrera 70 millions, contre 180 millions initialement prévues. Ces retards - qui interviennent alors que plusieurs pays ont suspendu l’utilisation du vaccin AstraZeneca le temps de lever les doutes sur ses effets secondaires - sont d’abord le résultat de problèmes de fabrication en Belgique et de rythme dans le contrôle qualité (testing) des lots. Et AstraZeneca se révèle incapable de combler la différence en approvisionnant l’Europe en vaccins produits ailleurs. Selon la presse américaine, l’Administration Biden aurait refusé d’accepter l’exportation de doses déjà produites alors que les États-Unis n’ont pas autorisé la mise sur le marché de ce vaccin. Selon le commissaire européen Thierry Breton, ce nouveau retard d’AstraZeneca n’aura pas de conséquence sur le programme de vaccination de l’Union européenne, car le duo Pfizer/BioNTech devrait, lui, « produire beaucoup plus » que ce qui était initialement envisagé, a-t-il expliqué sur Europe 1 dimanche. Mais le torchon brûle. Jeudi soir, en un court tweet, Thierry Breton a interpellé le conseil d’administration d’AstraZeneca, le renvoyant à ses « obligations fiduciaires ». Dimanche, il a enfoncé le clou, en rappelant que le directeur général du groupe anglo-suédois, le Français Pascal Soriot, dirigeait l’entreprise depuis l’Australie, où il est confiné. « Dans des situations comme celles-ci, il est important que les conseils veillent à ce que les directeurs généraux soient sur les sites », a-t-il glissé. Sur Radio J, la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès PannierRunacher, a également haussé le ton, précisant que la responsabilité de l’entreprise, de ses dirigeants et de ses administrateurs était engagée. B. B.
tête de la firme de Detroit en ses 118 ans d’existence. Son conseil d’administration est présidé depuis 2006 par l’ex-PDG Bill Ford, père d’Alexandra Ford English, et compte parmi ses membres le père de Henry Ford III, Edsel Ford II. Ce dernier, âgé de 72 ans, quittera le conseil en mai, en même temps que John Lechleiter, l’ex-patron du laboratoire Eli Lilly. Avec ces recrues, la haute instance stratégique comptera donc un Ford de plus. Les futurs administrateurs connaissent intimement le groupe. Alexandra Ford English dirige la stratégie et siège au conseil de Rivian, une start-up de véhicules électriques dont Ford est devenu actionnaire en 2019. Et, de son côté, Henry Ford III dirige les relations avec les investisseurs. Bill Ford a beaucoup œuvré pour renforcer l’implication de la famille dans l’entreprise. Un gage de sécurité pour les clients, actionnaires, collaborateurs et partenaires, aux yeux du président. « Le nom de notre famille est en jeu chaque jour. » ■ CAROLE BELLEMARE
L’exécutif veut pérenniser l’objectif de 25 % de HLM Pas question de remiser au placard la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain) comme il était prévu de le faire en 2025. « L’obligation d’avoir 25 % de logements sociaux ne s’arrêtera pas en 2025 ; elle deviendra permanente », affirme dans Le Journal du dimanche Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement. Une prise de position qui ne constitue pas une surprise : mercredi dernier, la Cour des comptes constatait dans un rapport que l’objectif de 25 % de HLM d’ici à 2025 ne serait pas atteint dans un certain nombre de communes. Sur la période 2017-2019, seulement 47 % des villes de plus de 3 500 habitants ont tenu leurs engagements de construction de logements sociaux, beaucoup de maires préférant payer une amende. La situation s’est encore dégradée l’année dernière, où la crise sanitaire a freiné la construction de logements. Seulement 90 000 nouveaux
HLM ont obtenu l’autorisation de sortir de terre alors que les prévisions tablaient sur 118 000 unités. Parallèlement, les attributions de logements sociaux qui avaient atteint 450 000 en 2019 ont reculé de 30 000 unités l’année dernière : des commissions d’attribution n’ont pas pu se tenir à cause de la pandémie, et le nombre d’appartements disponibles a chuté car, avec la crise, très peu de ménages ont quitté un HLM. Concrètement, Emmanuelle Wargon compte inscrire la pérennisation de la loi SRU dans le projet de loi 4D (décentralisation, différenciation, déconcentration, décomplexification). Ce texte devrait être présenté au printemps en Conseil des ministres et examiné au Parlement - d’abord au Sénat - à partir de juillet. Reste à savoir si cette loi aura le temps d’être adoptée avant la campagne présidentielle de 2022. J.-Y. G.
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SOCIAL
RETARD CHEZ ASTRAZENECA : L’EUROPE FULMINE
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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ÉCONOMIE
La sortie de crise au menu de la troisième grand-messe du dialogue social Le premier ministre devrait dévoiler plusieurs arbitrages, notamment sur l’emploi des jeunes. WILLIAM PLUMMER £@PlummerWilliam
SOCIAL Et de trois ! Ce lundi aprèsmidi, le premier ministre, Jean Castex, va tenir sa troisième grand-messe du dialogue social. En réunissant en visioconférence les représentants des huit organisations syndicales (CFDT, CGT, FO, CFTC et CFE-CGC) et patronales (Medef, CPME, U2P) représentatives et plusieurs ministres, le chef du gouvernement entend bien passer à une nouvelle étape face à cette crise du Covid qui dure maintenant depuis plus d’un an. Car, même si la situation sanitaire reste particulièrement préoccupante du fait de la prolifération des variants et d’une pression grandissante sur les établissements hospitaliers, le ton et la position de l’exécutif ont désormais bien changé depuis les précédents rounds de discussions en juillet et octobre dernier. La phase de vaccination étant bien lancée, il s’agit désormais de « discuter de la sortie de crise », d’après l’invitation envoyée aux partenaires sociaux, et de se projeter sur les prochains mois en adaptant au mieux les différents dispositifs d’aide.
« Cette conférence sociale marquera le point de retournement entre la stratégie défensive qui était mise en place jusque-là par le gouvernement et la stratégie offensive de sortie de crise », constate l’un des participants à la visioconférence de lundi. Et comme depuis le début de l’épidémie, l’exécutif souhaite au maximum associer syndicats et patronat dans sa prise de décision. Même si le passage en force de l’assurance-chômage a provoqué d’importants remous début mars, le dialogue social sort tout de même de cette crise renforcé. Preuve en est, deux accords nationaux interprofessionnels (ANI) – l’un sur le télétravail, l’autre sur la santé au travail – ont été conclus et plus d’une dizaine de chantiers sont toujours en cours. De surcroît, le patronat devrait présenter lundi un agenda de travail parallèle à celui du gouvernement pour travailler sur des thèmes transversaux avec les syndicats. « Les organisations syndicales et patronales ont fait preuve d’un grand sens des responsabilités depuis le premier jour de la crise et joué un rôle déterminant dans les réponses apportées pour protéger les emplois et
Jean Castex réunit, ce lundi, les représentants des huit organisations syndicales et patronales représentatives. FLORENT BARDOS/ABACA
les salariés. Leur rôle sera tout aussi important pour préparer la sortie de crise», assure la ministre du Travail. Testée positive au Covid-19 avec « quelques symptômes », Élisabeth Borne, ne sera finalement pas présente ce lundi aux côtés du premier ministre mais suivra les discussions à distance.
Prime à la deuxième ligne
«
On va voir comment on fait évoluer des dispositifs de crise en des dispositifs de rebond avec la levée progressive des restrictions sanitaires
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L’ENTOURAGE DU PREMIER MINISTRE
Le programme des réjouissances est chargé… Il s’agit avant tout de fixer une méthode de travail et un calendrier pour la sortie de crise. « On va voir comment on fait évoluer des dispositifs de crise en des dispositifs de rebond avec la levée progressive des restrictions sanitaires », explique l’entourage du premier ministre. Du côté des syndicats et du patronat les attentes sont grandes, puisque cette phase de débranchement des aides est cruciale pour le tissu économique. Une fermeture des vannes trop brutale pourrait provoquer une cascade de faillites et pousser des millions de Français aux portes
de Pôle emploi. « Il faut prolonger les mesures qui ont été mises en œuvre. C’est le fameux quoi qu’il en coûte du président, et l’économie en a encore besoin », plaide le président de la CFTC, Cyril Chabanier. L’un des plus gros enjeux est celui des aides à l’embauche destinées aux jeunes. Élisabeth Borne a présenté mardi dernier plusieurs hypothèses. Pour ce qui est de l’aide à l’embauche de 4 000 euros pour le recrutement d’un jeune en CDI ou en CDD de plus de 3 mois, le ministère du Travail envisage deux scénarios : un prolongement jusqu’à fin mai pour un coût de 150 millions d’euros ou une prolongation de six mois, afin d’enjamber la rentrée scolaire, mais une facture de 700 millions d’euros. Concernant l’aide à l’apprentissage d’un montant de 5 000 à 8 000 euros, le gouvernement songe soit à prolonger l’accompagnement jusqu’à fin mai, soit à maintenir l’aide jusqu’à la fin de l’année en réduisant toutefois légèrement
la voilure. Le premier scénario est estimé à 70 millions d’euros, quand le second avoisine 1,7 milliard d’euros. « Le delta est énorme et entre ces deux sommes, il y a peut-être un entre-deux », estime le viceprésident de la CPME, Éric Chevée. Au cours de cette conférence, le premier ministre pourrait également acter l’idée d’une prime à l’attention des travailleurs de la seconde ligne. Si un coup de pouce de ce type avait été écarté par le ministère du Travail, il est réapparu la semaine dernière durant les échanges avec les partenaires sociaux. Cette prime exonérée de cotisations sociales reprendrait le modèle de la « prime Macron ». Enfin, le gouvernement souhaite également remobiliser les partenaires sociaux, et principalement le patronat, pour faire en sorte que les entreprises s’emparent plus massivement du dispositif d’activité partielle de longue durée encore trop délaissé par rapport à l’activité partielle classique. ■
Afterpay, géant du paiement en 3 ou 4 fois, arrive en France L’australien débarque sur un marché très concurrentiel et en pleine ébullition.
400 % Croissance estimée du marché du paiement différé dans le monde d’ici à 2025
JORGE CARASSO £@JorgeCarasso
E-COMMERCE La pandémie a dynamisé le commerce en ligne comme jamais. Et dans son sillon, les règlements en trois ou quatre fois. Les pépites de la tech qui proposent les solutions de paiement sur le principe du « buy now pay later » - littéralement « achetez maintenant, payez plus tard »- se livrent une concurrence féroce pour se faire leur place dans ce marché en plein boom. C’est au tour de l’australien Afterpay de débarquer en France, sous la marque Clearpay, déjà présente au Royaume-Uni. La fintech, qui pèse près de 32 milliards de dollars australiens (20,7 milliards d’euros) à la Bourse de Sydney - son
cours a été multiplié par dix en un an - lance ce lundi son système de facilité de caisse en France, en Espagne et en Italie. Afterpay paye d’abord le commerçant partenaire - moyennant une commission puis se charge de récupérer la somme auprès de l’acheteur. « C’est un mode de paiement flexible, sans frais pour les consommateurs, et qui leur permet de s’offrir ce qu’ils veulent sans se tourner vers des crédits conso et des cartes revolving qui génèrent des intérêts et des coûts élevés », explique Nick Molnar, cofondateur et co-PDG d’Afterpay. La fintech, née en 2014, est peu connue en France, mais elle affiche une croissance folle ailleurs. Son chiffre d’affaires double chaque année. Aux États-Unis, où l’entre-
prise spécialisée dans la beauté et la mode réalise la moitié de son chiffre d’affaires, elle gère les règlements en plusieurs fois en ligne pour Adidas, Estée Lauder, YSL cosmétiques. Au Royaume-Uni, pour Marks & Spencer.
10 % des achats L’australien arrive dans un secteur hautement concurrentiel. En France, Floa (Banque Casino) représente déjà une vente sur trois en ligne. Et nombre de pépites poussent pour croquer une part du gâteau. La fintech française Alma a levé en janvier 49 millions d’euros pour poursuivre sa croissance. Elle vise un milliard d’euros de volume d’affaires d’ici à deux ans. Pledg, autre pépite nationale du paiement
différé, s’apprête aussi à annoncer une levée de fonds. Et que dire du géant suédois Klarna, plus grosse fintech européenne, dont on attend l’arrivée dans l’Hexagone et qui pèse aujourd’hui près de 31 milliards de dollars américains. « Quand on voit que sa capitalisation arrive à la moitié de celle de BNP Paribas, ça laisse rêveur. Cela veut dire que tout le monde parie sur une croissance continue et accélérée de la vente », souligne Jean-Michel Chanavas, délégué général du syndicat Mercatel. Si la production de crédits à la consommation a souffert de la fermeture des magasins au printemps et à l’automne (-8,5 %, selon l’Association des sociétés financières, ASF), les règlements en trois ou
quatre fois ont à l’inverse profité à plein de l’essor de l’e-commerce (+ 8,5 % en 2020 selon la Fédération de la vente à distance (Fevad). « On estime qu’un achat sur 10 est payé en plusieurs fois. Et ce marché grandit de plus en plus vite, car le nombre de commerçants équipés grossit de mois en mois », estime Rémi Gitzinger, directeur adjoint du cabinet spécialisé PW. Le paiement différé ne concerne d’ailleurs pas uniquement les achats en ligne: de plus en plus de boutiques physiques s’équipent car cela augmente les ventes. Les espoirs de croissance du secteur sont énormes. Le cabinet de conseil londonien Kaleido Intelligence voit le marché du « buy now pay later » grossir de près de 400 % dans le monde d’ici à 2025. ■
Mars mise sur l’amour des Français pour leurs animaux Les portions, la montée en gamme et les compléments alimentaires portent la croissance du géant américain.
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OLIVIA DÉTROYAT £@Oliviader
AGROALIMENTAIRE « Les gens qui cherchent aujourd’hui des chats et des chiens à adopter ont du mal à en trouver. » Alors que les demandes d’adoption des animaux de compagnie préférés des Français ont bondi entre 15 % et 30 % depuis le début de la crise, Romain Dumas, à la tête en France des marques de nutrition animale de Mars (Pedigree, César, Sheba, Whiskas…) en est persuadé : la très bonne santé du marché est faite pour durer. Bien plus attentifs au bien-être de leurs compagnons à quatre pattes depuis qu’ils sont confinés ou en télétravail, les Français ont ouvert grand leur portefeuille. Et davantage adopté. De quoi faire passer la croissance
du marché de la nourriture pour chiens et chats en grandes surfaces de 2 % à 4 % en 2020, à 2,2 milliards d’euros. En incluant les ventes chez les vétérinaires, le secteur pèse 3,7 milliards selon Euromonitor. Si tous les acteurs en ont profité, Mars Petcare (hors Royal Canin), qui s’arroge 25 % des ventes dans les hypers et supermarchés à côté d’un autre géant (Nestlé 40 % de part de marché) a tiré cette croissance en 2020. Après un passage à vide ces dernières années, son chiffre d’affaires a bondi de 6,7 % en 2020, et le groupe gagne à nouveau des parts de marché. « C’est à la fois grâce à notre capacité à servir nos clients, malgré la présence de nos usines dans des zones très touchées par le virus, appuie le dirigeant. Mais surtout grâce à nos
Romain Dumas, PDG de Mars Petcare et Food France. MARS PETCARE
efforts sur les innovations, sur des produits mieux valorisés, comme les portions individuelles ou les compléments à l’alimentation, comme les récompenses ou les bâtonnets à mâcher. » Ce dernier segment a bondi de 5 % pour les chiens, et de 12 % pour les chats. Sur les aliments en petites portions, que le groupe a d’abord développés sur sa marque Whiskas puis en 2020 sur Sheba, les ventes ont grimpé de 10 %. Idem enfin sur les croquettes haut de gamme de sa marque Perfect Fit, en hausse de 7,5 %. Pour financer ces innovations et leur publicité, le groupe a coupé de 30 % ses promos en 2019, sans impact négatif sur les ventes. « Cette année, nous capitaliserons sur ces succès avec des extensions de gamme et de nouvelles recettes, ex-
plique Romain Dumas. Et toujours en privilégiant la naturalité et la science au service de la nutrition. » Comme, toujours sur les croquettes Perfect Fit, la gamme Natural Vitality lancée cette année. « D’ici à 2025, la croissance sera portée par les friandises et les produits de soins, les menus plaisir et l’alimentation équilibrée et naturelle. »
Anthropomorphisme En effet, les 50 % de Français propriétaires de chats et de chiens adoptent pour leurs compagnons les mêmes réflexes que pour eux : des recettes plus simples et saines, répondant de façon plus ciblée aux besoins nutritionnels de leur animal, et avec un meilleur impact environnemental. Dans la guerre qui
les oppose dans les gamelles des chiens et des chats, les géants du petfood ont fait de ces axes les piliers de leur valorisation. Cette stratégie vaut en grandes surfaces comme chez les prescripteurs que sont les vétérinaires. Sur l’ensemble de ces débouchés, Nestlé (Purina, Friskies, Félix…) et ses 28,8 % de part de marché selon Euromonitor, maintient en France sa longueur d’avance sur Mars (21,7 %). Le géant suisse a ainsi misé – avec Pro Plan et Purina One — sur l’expertise nutritionnelle et plus récemment avec Purina Beyond — sur la naturalité. Dernier axe de la bataille : la nutrition très spécialisée. En 2018, la maison mère de Purina a mis la main sur Tails.com, qui vend des aliments personnalisés en ligne. ■
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L'ÉVÉNEMENT
Le plan Biden va doper la reprise mondiale Il pourrait augmenter la croissance de la planète de 1 point en 2021 tout en creusant l’écart entre les États-Unis ARMELLE BOHINEUST £@armelella
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du PIB américain
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asiatique pourrait par ailleurs continuer à pâtir de ses rapports difficiles avec les États-Unis, et du contrôle accru des échanges mis en place par le prédécesseur de Joe Biden. « L’impact du plan sur l’économie mondiale dépendra de la vitesse à laquelle ces 1 900 milliards seront débloqués », relativise Christopher Dembik, directeur associé de Berenberg. « Toutefois, contrairement à 2008, la relance américaine a déjà un impact sur le marché des changes », ajoute-t-il. Lors de la crise financière, il avait fallu attendre quatre ans pour que le dollar augmente significativement, en raison des inquiétudes, notamment sur les banques américaines. Aujourd’hui, la première devise mondiale s’est largement renforcée en quelques mois alors que les marchés anticipaient le plan Biden. Mais, « un dollar fort implique des difficultés de refinancement pour les pays émergents dont une
Le doublement du salaire minimum, promesse de campagne, attendra PIERRE-YVES DUGUA £@PDugua
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CORRESPONDANT À WASHINGTON
Joe Biden l’a promis. Mais pour l’instant, l’engagement n’a pas pu être tenu : le combat du président démocrate pour doubler le plancher fédéral du salaire horaire est reporté. « Le plus tôt sera le mieux », clame la gauche, outrée que depuis dix ans le salaire minimum soit inchangé à 7,25 dollars de l’heure. Les règles du Sénat relatives à l’adoption de dispositions qui entraînent une augmentation durable des dépenses publiques, ont empêché l’inclusion de la promesse dans l’énorme paquet législatif de relance, voté la semaine dernière en urgence. Pour revaloriser le salaire minimum fédéral, la Maison-Blanche devra composer avec une poignée de sénateurs centristes des deux partis dans le cadre d’une procédure normale. Le problème est à bien des égards moins dramatique que le proclame Joe Biden : sur quelque 80 millions d’Américains payés à l’heure, moins de deux millions touchent le salaire minimum fédéral. La plupart des grands employeurs privés comme Amazon et Target, rémunèrent depuis longtemps leur personnel au-dessus du minimum fédéral, à 15 dollars de l’heure. Walmart, numéro un de la distribution, a fixé son minimum à 11 dollars.
En outre, 29 États ont déjà fixé des seuils supérieurs au minimum fédéral. En Californie, le salaire minimum est désormais de 13 dollars, dans le Massachusetts il est de 13,50 dollars, dans le Maryland de 11,75 dollars. S’y ajoutent des normes municipales : à Seattle, Washington DC ou à San Francisco, le minimum est déjà de 15 dollars.
Menaces pour l’emploi Il y a un an, avant la pandémie, le plein-emploi régnait aux ÉtatsUnis. Dans les grandes métropoles, où la pénurie de main-d’œuvre de qualité prévalait, les minima dépassaient nettement 7,25 dollars. D’une manière générale, plus un État est rural, plus le coût de la vie est bas. En revanche dans des zones urbaines et les banlieues, le niveau de vie d’un salaire minimum fédéral est clairement insuffisant. Pour autant, même en Caroline du Sud, seulement 5,4 % des salariés horaires perçoivent encore le salaire minimum fédéral. En Californie, ils sont moins de 1 %. Plus encore que la région, l’âge est déterminant : au-delà de 34 ans, moins de 2 % des salariés horaires dépendent du salaire minimum fédéral. C’est un des arguments clés des républicains : dans leur esprit, le salaire minimum doit être bas, mais limité aux plus jeunes sans expérience afin d’inciter à l’embauche, de récompenser la loyauté et
de valoriser l’expérience. Pour eux, la revalorisation du salaire minimum tue l’emploi des jeunes, handicape les petites entreprises et revient à limiter les hausses de salaires des plus âgés. Joe Biden proposait de doubler le minimum fédéral d’ici à septembre 2025. Pour la US Chamber of Commerce, qui représente de nombreuses PME, cette majoration va trop loin, trop vite. Pour autant, le puissant lobby reconnaît que les 7,25 dollars actuels sont insuffisants pour vivre décemment. Selon le Bureau du budget du Congrès (CBO), organisme non-partisan, si le plan Biden était adopté, 17 millions d’employés verraient en 2025 leurs revenus grimper à 15 dollars de l’heure. En revanche, 1,4 million d’emplois disparaîtraient - surtout les jeunes et les moins qualifiés, pointe le CBO -, soit parce que les entreprises n’auraient pas les moyens d’augmenter les salaires, soit parce qu’elles préféreraient automatiser les tâches. Un autre débat va-t-il s’ouvrir bientôt? Dimanche, la secrétaire au Trésor Janet Yellen a gardé la porte ouverte à un impôt sur la fortune. «C’est quelque chose que nous n’avons pas encore décidé et que nous pouvons examiner», a-t-elle dit sur ABC, soulignant que «le président, au cours de la campagne, a proposé (...) des alternatives qui ont un impact similaire». ■
grande part de la dette est en dollars, ce qui peut induire des difficultés au niveau mondial », souligne Christopher Dembik.
Risques Le rôle de locomotive mondiale que les États-Unis s’apprêtent à jouer cette année, en affichant peut-être une vitesse de croisière supérieure à celle de la Chine qui ne vise officiellement qu’une croissance de 6 %, n’est pas sans danger. Si les déséquilibres des balances commerciales n’inquiètent pas particulièrement les économistes, certains redoutent par exemple une surchauffe de l’économie américaine, Gerry Rice, porte-parole du FMI, souligne ainsi que « la plupart des pays devraient bénéficier d’une demande américaine plus forte tant pour les matières premières que pour les importations de biens et services ». Mais il s’inquiète « des risques liés à l’injection massive d’argent dans la première économie du
85 % des foyers américains, quelle que soit leur situation professionnelle, recevront 1 400 dollars par personne.
EVGENIA PARAJANIAN/GETTY IMAGES/ISTOCKPHOTO
CONJONCTURE Cinquante-deux jours après l’arrivée au pouvoir de Joe Biden, son gigantesque plan de soutien à l’économie est devenu réalité. Les destinataires des chèques et des virements « commenceront à les recevoir dès ce weekend », a annoncé vendredi le Trésor. En jeu, 1 400 dollars pour chaque Américain gagnant moins de 75 000 dollars par an et pour chacun de ses enfants. Mais le montant de ces aides, environ 400 milliards, n’est qu’une petite part du plan de 1 900 milliards de dollars adopté mercredi par le Congrès. Ce programme vertigineux, qui s’ajoute aux énormes plans antiCovid déjà mis en place en 2020 (3 100 milliards de dollars en plusieurs tranches), représente à lui seul plus de 10 % du PIB attendu en 2021 aux États-Unis. Soit environ 3 % du PIB mondial. Le plan Biden est donc une locomotive puissante. L’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), juge qu’il devrait entraîner un bond supplémentaire de 3 à 4 points et porter à 6,5 % la croissance du PIB américain en 2021. D’autres observateurs, plus optimistes, parient Le programme de Joe tionaux et en biens et services intermême sur une croissance de 8 % à Biden (ci-contre) nationaux », assure l’expert. 10 % de l’économie des États-Unis représente à lui seul plus Les partenaires traditionnels des Ce plan, qui doit notamment de 10 % du PIB attendu États-Unis profiteront de cette créer 7 millions d’emplois et réduire en 2021 aux États-Unis, manne. Ses voisins proches, liés la pauvreté de millions d’enfants soit environ 3 % du PIB par l’accord Canada – États-Unis – américains, aura « des retombées mondial. Une locomotive Mexique, en seront les premiers positives pour la croissance mondiapuissante pour le pays bénéficiaires avec un gain de croisle », prévoit le Fonds monétaire in(ici, la ville sance de leur PIB de respectivement ternational (FMI). Il ajoutera plus de Philadelphie). 1,2 et 0,8 point, pronostique d’un point de croissance au PIB SAUL LOEB/AFP, l’OCDE. L’impact devrait être mondial, lequel devrait augmenter STOCK.ADOBE.COM moins élevé, à seulement 0,5 point, de 5,6 % en 2021, calcule l’OCDE. en Chine et dans la zone euro, où le « Ce programme veut maintenir le poids des échanges avec les Étatspouvoir d’achat alors que près de Unis est moins important. Le géant 10 millions d’Américains n’ont pas retrouvé leur niveau d’emploi et de revenus d’avant la crise. Il stimulera la consommation, qui représente une part substantielle du PIB américain », explique Samy Chaar, chef économiste de Lombard Odier. Et même si ces aides seront aussi utilisées pour (900 mds du plan Trump (91 000 milliards en épargner ou investir en (18 300 md$ en 2021, + 1 900 du plan 2021, selon le FMI) Bourse, « la plus grande partie selon le FMI) Biden) sera consommée, en services na-
Les chèques d’Oncle Sam dépensés en Bourse « Les chèques arrivent » répète Joe Biden, pendant que les télévisions montrent les images des rotatives du Trésor américain imprimant des millions de chèques ornés de la statue de la Liberté. Des millions d’Américains qui payent déjà leurs impôts de manière électronique vont recevoir un virement. Au total, 85 % des foyers américains, quelle que soit leur situation professionnelle, recevront 1 400 dollars par personne. Au-delà de 75 000 dollars de revenus annuels par personne, le montant diminue.
Un sondage de Bank of America révèle que 36 % des récipiendaires ont l’intention d’épargner cette manne : soit en réduisant leur endettement, soit en le plaçant en banque, soit en l’investissant en Bourse. Les courtiers s’en réjouissent : voilà une source de liquidité de plus pour alimenter l’euphorie de Wall Street. Les économistes et les élus républicains y voient surtout la confirmation d’un certain gaspillage des 400 milliards de dollars empruntés par l’Oncle Sam pour cette opération : plus
d’un tiers ne sera pas dépensé en biens et services. Deutsche Bank, dans un autre sondage, constate que les boursicoteurs, entre 18 et 34 ans, ont l’intention de dépenser 40 % de leur chèque en actions. Environ 170 milliards de dollars vont ainsi se reporter dès la semaine prochaine sur des actions. Les deux précédents chèques de soutien avaient ainsi été en partie dépensés à la Bourse, qui profite de cette manne, de la chute des frais de courtage et du confinement des petits porteurs. P.-Y. D.
LE FIGARO
ECONOMIE 1 900 mds $ pour l’économie américaine
et l’UE.
PRINCIPALES ENVELOPPES ADOPTÉES PAR LE CONGRÈS LA SEMAINE DERNIERE, en milliards de dollars
400
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170
163 109 monde, y compris un éventuel resserrement financier ». Une augmentation brutale des taux d’intérêt compromettrait la capacité de refinancement de la dette de certains pays émergents. Le gigantesque plan américain, qui sera bientôt suivi d’un autre grand programme d’investissement dans les infrastructures, risque par ailleurs de creuser l’écart entre la première puissance mondiale et l’Union européenne. Les États-Unis s’efforcent de tirer parti des erreurs réalisées après la crise de 2008 et le gouvernement démocrate « expérimente une nouvelle approche, ambitieuse. Il a le pied sur l’accélérateur. À l’inverse, Bruxelles, dont le plan de 750 milliards d’euros n’est pas encore en action et comporte une part trop faible d’investissements pour l’avenir, a plutôt le pied sur le frein », s’inquiète Samy Chaar. De quoi accroître un peu plus le retard de l’Union européenne dans la course mondiale. ■
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Versés directement aux ménages
Collectivités locales
Éducation Assurance chômage Santé publique Enfance PME, restaurants, associations, cinémas et institutions culturelles Logement
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Aide alimentaire
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Autres programmes*
* Une grande partie du montant restant sera consacrée aux crédits d’impôts pour les familles avec enfants
Une grosse enveloppe pour les États qui divise
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Aucun élu républicain du Congrès, ni au Sénat ni à la Chambre des représentants, n’a voté pour l’American Rescue Plan Act. De toutes les dispositions du texte de 628 pages, les plus intolérables à leurs yeux sont les 350 milliards de dollars de crédits aux États et collectivités locales. Deux grands reproches sont adressés à ces sommes massives promises aux États. Le premier : ces derniers n’en ont pas besoin car leurs recettes fiscales dans l’ensemble ont été nettement moins affectées qu’on le pensait il y a encore six mois. Second reproche : ces fonds vont aller de manière disproportionnée soutenir des États et métropoles largement démocrates, mal gérées, où les syndicats puissants, financent le parti de Joe Biden. Sur le premier point, l’argument est assez juste : 43 États et le District of Columbia, capitale fédérale, ont publié leurs comptes pour l’année calendaire 2020. Or leurs recettes sont en hausse collectivement de 3,2 milliards de dollars. Plusieurs explications à ce paradoxe en pleine crise : les recettes étatiques et municipales proviennent très largement des riches. Or ces derniers, grâce au télétravail, ont été financièrement peu affectés par le confinement. En outre les taxes sur la propriété, grande ressource fiscale locale, ont davantage rapporté en raison de la hausse des prix immobiliers. La Californie et l’État de New York qui
taxent les plus-values mobiliaires ont également bien tiré leur épingle du jeu grâce aux rebonds de Wall Street. Enfin, les collectivités ont déjà bénéficié de 212 milliards d’aides fédérales directes en 2020, par exemple pour compenser le coût des soins, sans compter 150 milliards de plus au titre des aides fédérales aux salaires des employés du secteur de la santé.
L'ÉVÉNEMENT
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Les énergies renouvelables, une nouvelle bulle boursière ? Les sociétés du secteur ont vu leur cours s’envoler en 2020. Certains craignent une baisse de la rentabilité des projets solaires et éoliens. GUILLAUME GUICHARD £@guillaume_gui
ÉNERGIE Le vent soufflerait-il trop fort en faveur des énergies renouvelables ? Les marchés et certains acteurs du secteur commencent à s’inquiéter de l’apparition d’une bulle autour des valeurs spécialisées dans l’éolien et le solaire. C’est le patron de Total, Patrick Pouyanné, qui a relancé le débat sur le sujet récemment. « Il y a une bulle », a-t-il asséné dans le Financial Times fin février. Cette sortie trouve un écho sur les marchés. Les investisseurs et les analystes s’interrogent maintenant sur les valorisations des entreprises qu’ils ont portées aux nues en pleine crise du Covid-19. Les actions du danois Orsted, leader de l’éolien en mer, du géant espagnol Iberdrola ou du français Neoen, plus modeste pure-player du renouvelable, sont en baisse depuis le début de l’année. Cependant, ce repli est très loin d’effacer l’envolée de 2020, année où Orsted ou Neoen ont par exemple vu leur valorisation plus que doubler. À tel point que le ratio « cours de Bourse sur bénéfice » des valeurs liées à la transition énergétique a bondi en moyenne de 24 points l’année dernière, selon Morgan Stanley. Plusieurs raisons expliquent cet engouement boursier. D’abord, ces valeurs bénéficient d’un effet de rareté. Les investisseurs qui veulent verdir leur portefeuille ont peu de choix sur les marchés. Ensuite, ces utilities sont des valeurs refuges prisées en temps de crise. Et pour cause : alors que les compagnies pétrolières ont affiché des milliards de dollars de pertes au titre de 2020, les sociétés de l’énergie « verte » ont très bien résisté grâce à des revenus stables et à une forte croissance, à peine entamée par le Covid-19. « Les financiers poussent dans le superlatif car ils ont beaucoup de liquidités à placer, ajoute un dirigeant du secteur. D’autant plus que, maintenant, les technologies éoliennes et solaires sont matures et représentent des risques marginaux. » Il n’en reste pas moins que la sortie de Patrick Pouyanné en a énervé plus d’un. Pour les électriciens, qui pratiquent les renouvelables depuis près d’une décennie, c’est justement l’arrivée dans l’énergie décarbonée des pétro-
liers, en quête de reconversion à cause de la baisse annoncée de la demande de pétrole à un horizon de dix ou quinze ans, qui crée quelques perturbations. Dotés de moyens colossaux générés par leurs belles marges dans les hydrocarbures, les majors européennes sont soupçonnées de casser les prix lors des appels d’offres pour développer des parcs éoliens ou solaires. Ou de les faire grimper lors des enchères qui permettent de décrocher, en amont, des droits d’implantation de parcs éoliens ou solaires.
Concurrence accrue Compressés par une concurrence plus forte entre plus d’acteurs, les rendements des projets pourraient baisser. De là viennent les craintes de bulles boursières. Les dernières enchères pour des droits de développer et gérer pendant soixante ans de gigantesques parcs éoliens offshore au large du Royaume-Uni ont réactivé cette peur. Arrivés premiers dans cette compétition, BP et son allié l’électricien allemand EnBW ont fait une offre jugée démesurée par certains analystes. Le consortium a accepté de payer 231 millions de livres (269 millions d’euros) par an, jusqu’à la prochaine étape d’attribution des zonages. C’est 65 % plus élevé que l’offre du vainqueur en second. Le rendement du projet s’en ressentira. « En misant gros pour signifier qu’elles veulent elles aussi jouer la carte des renouvelables, les majors pétrolières semblent mettre en danger leurs propres retours sur investissement comme ceux des leaders du marché », prévient le responsable de la stratégie durable de BNP Paribas AM, Mark Lewis, dans une tribune publiée par le Financial Times. « Cela ne fait aucun sens de payer, comme le font les pétroliers, très cher pour remporter des droits de développer des parcs éoliens offshore aux enchères, puis de se plaindre quelques jours après qu’il y a une bulle dans le secteur bulle qu’ils sont probablement euxmêmes en train de gonfler », a résumé le patron de l’électricien espagnol Iberdrola, Ignacio Galan, lors de la présentation de ses résultats, fin février. Les investisseurs sont toutefois divisés. « Les inquiétudes du marché sont surfaites et la rentabilité des projets futurs ne s’évaporera pas », tranchent les analystes de
Morgan Stanley dans une note publiée le 11 mars. Pour la simple raison que le marché des renouvelables, en très forte expansion, est immense, expliquent-ils. Les objectifs de capacités de production renouvelables des électriciens et des pétroliers ne représentent à ce jour que 30 % des appels d’offres et enchères à venir d’ici à 2030, calcule Morgan Stanley. Si les énergéticiens n’en font pas plus que ce qu’ils ont prévu à ce jour, il restera encore 84 gigawatts de capacités à construire (l’équivalent de 50 EPR). En résumé, il y a de la place pour tout le monde. Bulle ou pas bulle, les milliards d’euros fléchés actuellement vers le secteur sont utilisés pour décarboner le mix énergétique mondial. Et, contrairement aux bulles immobilières, où des logements peuvent être construits dans la frénésie puis laissés à l’abandon faute d’occupant, les éoliennes et les panneaux solaires installés serviront toujours à produire de l’électricité n’émettant pas de CO2. Il s’agirait donc, au pire, d’une « bonne frénésie », selon l’expression de l’investisseur Ruchir Sharma, qui décrit ces moments de folie des marchés laissant derrière eux, même après leur éclatement, des actifs productifs. ■
Certaines valeurs spécialisées dans l’éolien et le solaire sont en baisse depuis le début de l’année. Cependant, ce repli est très loin d’effacer l’envolée de 2020. REGIS DUVIGNAU/REUTERS
Eurazeo mise sur la ville du futur La société compte lever 200 millions d’euros pour son nouveau fonds. EMMANUEL EGLOFF £@eegloff
Recettes en baisse Certes, des États sont plus frappés que d’autres : surtout ceux dépendants de recettes, en baisse, liées au secteur pétrolier, comme l’Alaska, le Texas ou le tourisme comme Hawaï et la Floride. L’accusation de favoritisme lancée à Joe Biden et Nancy Pelosi privilégiant les « États bleus », est plus délicate à prouver. Des États très républicains, mais peu peuplés, comme les Dakota et le Wyoming, vont ainsi obtenir plus par tête d’habitant (de 3 800 à 4 600 dollars) que la Californie ou le Massachusetts (de 3 000 à 3 200 dollars), solidement démocrates. Les gouverneurs républicains de l’Iowa, de l’Arkansas et du Nebraska, fulminent. Ils reprochent à Biden de pénaliser des États qui ont moins confiné et donc pris plus de risques pour « inciter les gens à travailler et favoriser la croissance » que des États de gauche jugés mal gérés, où syndicats et fonctionnaires auraient abusé du confinement. ■
lundi 15 mars 2021
On voit 1 000 sociétés par an, pour en sélectionner 4 ou 5. Investir chez nous leur permet d’accéder à ce flux très important
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MATTHIEU BONAMY, ASSOCIÉ CHEZ IDINVEST, FILIALE D’EURAZEO
INFRASTRUCTURE Les villes changent. Leurs habitants également. Et la pandémie mondiale accélère le mouvement. « Nous n’habitons plus, ne nous déplaçons plus et ne travaillons plus comme par le passé », analyse Matthieu Bonamy, partner chez IDInvest, filiale d’Eurazeo. La société vient de lancer un nouveau fonds d’investissement, Smart City II. Deux, car un premier fonds sur ce thème a déjà été lancé il y a cinq ans, preuve que le changement a été perçu en amont. Cette première mouture a réalisé 25 investissements depuis sa création, et la nouvelle entend tirer profit de ce succès. Le nouveau fonds a déjà levé 80 millions d’euros, et vise 200 millions en clôture finale. Les investisseurs intéressés sont d’abord des industriels. « Ils perçoivent les changements, veulent comprendre les nouveaux modèles et même, éventuellement, monter des
partenariats avec les start-up que nous repérons », explique Matthieu Bonamy. Des grands noms français, EDF, Total, RATP ou Stellantis, ont investi. De même que des groupes internationaux comme l’énergéticien allemand Mainova ou le promoteur immobilier thaïlandais Sansiri. « On voit 1 000 sociétés par an, pour en sélectionner 4 ou 5, précise Matthieu Bonamy. Investir chez nous leur permet d’accéder à ce flux très important ».
Recherche de technologie Ces investisseurs industriels regardent moins que les investisseurs financiers la performance des start-up. Ils sont attirés notamment par la compétence sur l’Asie du fonds, qui possède une équipe sur place. C’est ainsi que le premier Smart City a investi dans le chinois WeRide, une start-up qui teste la conduite autonome sur route ouverte. Le champ d’investissement est large. Le fonds a déjà misé sur quelques start-up françaises comme
WeMaintain, qui met en relation des techniciens d’ascenseur et des copropriétés en se passant des grandes sociétés d’ascenseurs, Comet Meeting, qui révolutionne les séminaires d’entreprise, ou encore Spacefill, qui a pour ambition de rendre plus flexible le secteur de la logistique. Il a également pris une participation dans le service de livraison à domicile Glovo, une start-up espagnole devenue une licorne, c’est-à-dire que sa valorisation dépasse le milliard d’euros. « Nous recherchons d’abord de la technologie, comme l’utilisation de l’internet des objets (IoT) ou l’intelligence artificielle (IA), puis nous tentons de comprendre le modèle économique », détaille Matthieu Bonamy. Ce qui ne signifie pas que les jeunes entreprises doivent déjà gagner de l’argent. En revanche, elles doivent avoir un modèle économique qui permet de l’envisager. « Nous déterminons des unités économiques, et évaluons à partir de quel moment il est possible d’envisager une rentabilité », explique encore le gérant. ■
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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DÉCIDEURS
AVEC
PROPOS RECUEILLIS PAR
FRÉDÉRIC DE MONICAULT fdemonicaultlefigaro.fr
Olivier Duha « La personnalité est un élément clé du recrutement »
MANAGEMENT En 2000, Olivier Duha et Frédéric Jousset fondaient Webhelp, devenu le leader européen de l’externalisation de la relation client avec 1,6 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Sur la seule année 2020, le groupe, qui emploie 74 000 personnes, en a recruté 10 000. De quoi faire de l’entreprise un spécialiste de l’intégration. LE FIGARO. - L’année dernière, Webhelp a recruté plus de 10 000 personnes dans le monde, dont 1 800 en France. Comment vous y êtes-vous pris ? Olivier DUHA. - En très peu de temps, nous avons dû repenser aussi bien les procédures de recrutement que les modules de formation. L’apport technologique joue un rôle considérable mais il ne suffit pas. Les qualités d’adaptabilité et de créativité sont essentielles. J’ai l’habitude de dire que Webhelp est restée une grosse start-up : compter 74 000 collaborateurs répartis dans 50 pays et 170 centres de relation client n’empêche ni l’audace ni l’agilité. Depuis vingt ans, cette culture infuse en permanence. Au-delà du recrutement, le mode de fonctionnement de l’entreprise a-t-il changé ? Avoir un modèle organisé, c’est la base : le nôtre est coordonné mais décentralisé. Ces fondamentaux sont inchangés. Nos activités de conseil et de SSII, complémentaires de la relation client, continuent de se développer. La volonté des grandes marques de travailler avec des outsourcers comme nous est ancrée de longue date. En revanche, nous n’avions pas imaginé pouvoir signer autant de nouveaux contrats à distance. Nous avons même décroché des gros clients que nous n’avons toujours pas vus ! Vous étoffez vos équipes avec une population qui n’est pas visée en priorité par les recruteurs : les jeunes non qualifiés. Pourquoi ? L’éventail de nos métiers – assistance technique, commerciale… les rend ouverts à tous types de profils. Jim Collins, l’un des gourous du management, explique que le who (qui) est plus important que le what (quoi). Nous expérimentons cette maxime au quotidien : la personnalité du candidat est un élément clé du recrutement. L’intelligence émotionnelle n’est pas quelque chose que l’on
Pour le cofondateur de Webhelp, le salarié doit se sentir utile et avoir du plaisir à travailler.
acquiert au fil du temps. Nous nous appuyons sur des gens qui manifestent très tôt un sens du relationnel et du service. Cela vaut beaucoup de diplômes. Ces métiers des centres de contact, au sens large, sont-ils déconsidérés ? Les chiffres sont parlants. Entre 300 000 et 350 000 personnes en France sont affectées à la relation client, soit 1 % de la population active. Dans d’autres pays, cela grimpe jusqu’à 2 %. Le secteur n’est pas négligeable : il renvoie à de vrais métiers dont une frange, l’hospitalité, est en plein essor. Un discours condescendant est un non-sens. Les jeunes sont nombreux chez Webhelp. Sont-ils plus difficiles à fidéliser ? La moyenne d’âge des personnes recrutées tourne autour de 25 ans. Mais la notion de fidélisation n’est pas une question d’âge. On se situe sur la culture d’entreprise. Deux choses rentrent en ligne de compte : le salarié doit se sentir utile, donc obtenir des résultats ; il doit aussi avoir du plaisir à travailler. Si l’une ou l’autre fait défaut, le pacte d’engagement est fragilisé : être performant sans bien-être fait courir le risque de s’essouffler. Être heureux sans satisfaire aux objectifs n’est pas tenable sur le long terme.
« Être performant sans bien-être fait courir le risque de s’essouffler. Être heureux sans satisfaire aux objectifs n’est pas tenable sur le long terme », explique Olivier Duha. WEBHELP
Peut-on continuer à prendre du plaisir à travailler en pleine crise sanitaire ? Plusieurs phases se sont enchaînées. Le premier confinement a généré de l’angoisse et un phénomène de résilience s’est enclenché. Le télétravail s’est ensuite imposé, au point de générer la satisfaction de pouvoir travailler à distance. Maintenant que la peur s’évacue peu à peu, les gens ont envie de sortir de chez eux. Plus on coupe le lien social, plus la désocialisation menace. Chez Webhelp, nous prenons des initiatives pour atténuer l’éloignement. Comme les Christmas Part
CONFIDENCES QUELLES QUALITÉS APPRÉCIEZ-VOUS CHEZ UN COLLABORATEUR ? La créativité dans la réflexion, la fiabilité dans l’exécution.
virtuelles organisées à la fin de l’année. Démarrer jeune et sans diplôme, n’est-ce pas un frein à une progression rapide ? Je me fonde sur la trajectoire de Webhelp : 80 % de nos encadrants, ceux qui pilotent une équipe ou un service, ont fait l’objet d’une promotion interne. Les formations sont prépondérantes dans ce circuit. La gestion des carrières exige la même intensité : dès l’instant où la personne rentre dans l’entreprise, elle doit pouvoir se sentir accompagnée. Trois des seize membres de notre comité exécutif ont démarré au plus près du terrain. Ces statistiques sont éloquentes. Mais elles ne doivent pas faire oublier que, sans croissance, la promotion interne est vite entravée : plus l’entreprise se développe, plus elle ouvre des opportunités. Dans quelle mesure le Covid a-t-il influé sur votre façon de manager ? Doit-on parler du fond ou de la forme ? S’il s’agit de la stratégie, des axes aussi importants que tracer un cap, avoir une vision ou fixer des ambitions sont des constantes du chef d’entreprise à creuser encore davantage. Sur la forme, je me suis retrouvé, par exemple, à animer une réunion virtuelle devant plus de 1 000 per-
QUELLES SONT LES QUALITÉS INDISPENSABLES POUR UN DIRIGEANT ? L’énergie, l’optimisme, l’humilité. AVEZ-VOUS UNE DEVISE ? Il vaut mieux agir trop rapidement que d’attendre trop longtemps.
TOP
MANAGEMENT PAR Carole Bellemare
RATP
Jean Agulhon
Catherine Guillouard
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Christian Galivel
Les décisions du gouvernement vous donnent-elles le sentiment d’être plongé dans une lessiveuse administrative ? Cela ne sert à rien de se plaindre sans arrêt. Ni de donner son avis sur tout, comme le font certains. Chacun peut mesurer combien la situation est compliquée et difficile à traiter par les gouvernants. La sortie de crise s’inscrit sur le temps long : la solidarité doit jouer encore plus aujourd’hui. C’est une valeur aussi importante pour notre société que l’agilité pour les entreprises. Espérez-vous que tout revienne comme avant ? « Les gens ne changent que par nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise », disait Jean Monnet. Le monde a changé, par nécessité, il en sortira plus éduqué, donc plus résilient. ■
Retrouvez du lundi au vendredi, LE « TALK DÉCIDEURS ». Aujourd’hui : Vitalie Taittinger, présidente de la maison de champagne Taittinger
En vidéo sur lefigaro.fr/decideurs
www.decideurs.lefigaro.fr
Laurence Batle
Marie-Claude Dupuis
Hiba Farès
Anaïs Lançon
Jean-Yves Leclercq
Jérôme Harnois
DÉCIDEURS du groupe RATP
Leader historique du transport urbain en Îlede-France, pionnier des automatismes, le groupe RATP est à un moment charnière de son histoire avec l’ouverture progressive du réseau historique : fin 2024 pour le bus, fin 2029 pour le tramway et fin 2039 pour le 1997 métro et RER. Sur tous les fronts, sa PDG, Après le Trésor, Catherine Guillouard, nommée par Emmal’énarque intègre nuel Macron en 2017 et reconduite deux ans Air France. plus tard, a lancé un plan de transformation 2007 majeur et inédit, « Défis 2025 ». Sa volonté : Dirige les finances poursuivre le développement en France et à d’Eutelsat. l’international pour devenir un acteur 2013 majeur de la mobilité et de la ville durable, en Rejoint Rexel. Devient DG déléguée. mettant l’accent sur l’empreinte environnementale et la RSE. La PDG met aussi le pied 2017 sur l’accélérateur en matière de diversificaEst nommée par tion (énergie, immobilier, télécoms) afin le président de la d’ancrer la RATP comme un leader du serviRépublique PDG ce urbain, ainsi qu’en matière d’amélioration de la RATP. Rempile en juillet 2019. de l’excellence opérationnelle pour « passer
DATES CLÉS
Demain
Philippe Martin
sonnes. Parallèlement, j’ai renoncé à cette habitude de sauter dans un avion pour honorer un bref rendez-vous. Ce sont des changements de perspectives !
de monopole à opérateur choisi. » Un défi de taille pour l’énarque, ancienne argentière d’Air France, Eutelsat et de Rexel qui avec ses 64 000 salariés, assure chaque jour 16 millions de voyages dans 43 pays via les différents modes de transport maison (métro, tramway, bus…). Pour conduire les chantiers du quatrième opérateur mondial de transports urbains et accompagner les équipes, l’ancienne du Trésor doit adapter la gouvernance et le modèle économique sur fond de marchés en pleine évolution. Auprès d’elle, œuvre aujourd’hui un comité exécutif de neuf dirigeants. Avec la casquette de DGA, Jean Agulhon dirige les ressources humaines depuis 2016. DESS de droit et pratiques des relations de travail, il a voué sa carrière à la filière au sein du groupe Renault, puis dans un cabinet spécialisé dans la conduite du changement. Plus que jamais homme de la situation donc aujourd’hui.
DGA également, Philippe Martin pilote depuis 2009 toutes les opérations de transport et de maintenance. Ce centralien connaît le groupe comme sa poche pour y être entré en 1983 comme cadre d’exploitation du métro. Il vice-préside aussi l’Union internationale des transports publics et préside l’assemblée des métros depuis 2017. Troisième DGA auprès de Catherine Guillouard, Christian Galivel, Supélec, 38 ans de maison, coiffe depuis 2009 projets, ingénierie et investissements du groupe RATP. Il dirigeait auparavant le département du matériel roulant ferroviaire. De son côté, Laurence Batle a pris du galon à l’arrivée de la PDG comme présidente du directoire RATP Dev, dont elle était déjà membre. Ex-Price et Atos, la diplômée d’Harvard a dirigé les finances de la filiale avant de chapeauter la BU Amérique-Afrique et les nouvelles activités de bus touristiques Sightseeing.
Visage féminin encore, l’X-Mines MarieClaude Dupuis, ancienne de l’Industrie et de l’Environnement et ex-patronne de l’Andra, arrivée en 2014, est depuis trois ans « Mme Stratégie, Innovation et Développement ». Ancienne d’Harvard aussi, l’HEC et ancienne d’Air France et d’Accor, Hiba Farès a rallié la RATP en 2018 comme directrice, expérience clients, marketing et service, tandis qu’Anaïs Lançon, ex-conseillère communication du président de l’Assemblée nationale dirige la communication, l’engagement et la marque du groupe. Enfin le normalien Jean-Yves Leclercq est arrivé de la SNCF en 2018 pour diriger les finances alors que le juriste Jérôme Harnois, Institut de criminologie de Paris et ancien de la préfectorale, œuvre depuis 2017 comme directeur chargé de la préparation aux crises, des enjeux de sûreté, de conformité et des affaires institutionnelles. C. B.
LE FIGARO
CHRONIQUES
lundi 15 mars 2021
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BLOC NOTES
Pourquoi la bureaucratie atteint son paroxysme sous le quinquennat Macron
Réconcilions nucléaire et énergies vertes
Plus dur de sortir du tout-administratif que de l’aquarium pour un poisson.
JACQUES-OLIVIER MARTIN
La décennie passée aurait pu être celle du début de la fin du nucléaire. Les centrales japonaises à l’arrêt après la catastrophe de Fukushima, l’Allemagne, la Suisse, la Belgique et bien d’autres pays qui annoncent la sortie d’un atome civil qui n’a jamais suscité les passions auprès des populations. La part du nucléaire a pourtant peu baissé et représente un dixième de la production mondiale d’électricité. Des centrales se construisent en Europe, au Moyen-Orient, au RoyaumeUni, en France, en Chine et ailleurs. Le crépuscule du nucléaire envisageable au lendemain de la catastrophe n’a pas eu lieu, et autant s’en féliciter. À l’heure où notre planète étouffe sous les émissions de carbone, les sources d’énergie propres et fiables sont les bienvenues. La décennie passée n’en restera pas moins révolutionnaire. L’après-Fukushima, c’est aussi l’explosion du renouvelable. Jamais depuis l’après-guerre une ressource énergétique ne s’était développée si vite. En dix ans, donc, la production des éoliennes et des panneaux photovoltaïques a été multipliée par trois et devance désormais le nucléaire. Voici venu le temps des années vertes. Les engagements de tous les États de la planète en matière de lutte contre les émissions de CO2 conduit à accélérer encore les investissements dans les énergies renouvelables. Jusqu’où ? La réponse dépendra avant tout de la résolution d’une équation technologique et économique complexe : la capacité à stocker l’électricité verte à prix compétitif pour pouvoir la fournir en quantité suffisante la nuit et les jours sans vent. Aux chercheurs de trouver une solution technologique rentable et propre. La grande marche de l’innovation, devenue une véritable course depuis quelques décennies, peut nous rendre optimistes.
LA FÉE VERTE AU SOUFFLE COURT
La décennie à venir sera-t-elle enfin celle de la réconciliation entre les pronucléaire et les ardents défenseurs des énergies vertes ? Il faut l’espérer et œuvrer pour y parvenir. Une telle opposition n’a pas lieu d’être. Tout au contraire,
£ @jocjom
même. Aujourd’hui, l’électricité représente 25 % de l’énergie consommée en Europe dans tous les domaines. Or, pour arriver à la neutralité carbone en 2050 comme l’Europe s’y est engagée, cela suppose une réduction drastique du charbon, du pétrole et du gaz au profit d’une électricité propre qui représentera 60 % du mix énergétique européen dans trente ans. Soyons lucides, les champs de panneaux photovoltaïques et les éoliennes terrestres ou en mer ne suffiront pas à assurer cette incroyable montée en puissance. En réalité, toutes les ressources énergétiques propres seront nécessaires avec leurs spécificités. Ainsi, le nucléaire n’est pas sans risque - Fukushima est dans toutes les têtes -, produit des déchets radioactifs, mais a deux atouts précieux : il n’émet pas de CO2 et garantit une production d’électricité en continu. L’atome civil (bien plus discret que ces moulins à vent qui défigurent nos campagnes) est l’une des meilleures solutions pour épauler le solaire et l’éolien dont le défaut, et non des moindres, est de ne produire de l’électricité que par intermittence.
SORTIR DU NUCLÉAIRE HONTEUX
Cette grande réconciliation devrait être défendue au plus haut niveau. Une tâche guère aisée alors que nos politiques prennent un malin plaisir à les opposer au gré de leurs ambitions électorales. Souvenons-nous du candidat François Hollande monnayant le soutien des écolos lors de la présidentielle de 2012 en sacrifiant le nucléaire. Et que dire d’Emmanuel Macron ? Beaucoup d’ambiguïté, d’« en même temps »… D’un côté les déclarations fortes du Creusot en décembre dernier : « Notre avenir énergétique et écologique passe par le nucléaire. » De l’autre, quelques mois plus tôt, la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim, véritable trophée livré aux écologistes et à tous les antinucléaire. La prochaine campagne présidentielle sera-t-elle l’occasion de changer de discours et de promouvoir l’électricité zéro carbone sous toutes ses formes ? À un an du scrutin, il n’est pas interdit de rêver… ■
C
onfronté à une catastrophe, il est naturel de mobiliser ce qu’on croit être ses meilleurs atouts. Dans les deux adresses aux Français du 12 mars (« quoi qu’il en coûte ») et du 16 mars 2020 (« nous sommes en guerre »), Emmanuel Macron avait invoqué « l’État protecteur » face à la crise sanitaire. Celui-ci est constitutif de la nation française et l’administration en est la sève. Que le président de la République fasse vibrer cette spécificité dont les racines se perdent dans l’Ancien Régime allait de soi : « Un oiseau chante d’autant mieux qu’il chante dans son arbre généalogique », disait Jean Cocteau. Alors que les plus libéraux comme les États-Unis et la Grande-Bretagne célèbrent sans honte bue « le retour de l’État » et de la dépense publique, la France, d’où il n’est jamais parti, n’aurait-elle pas un avantage déterminant ? Sans préjuger du bilan sanitaire, économique et social, encore prématuré, une certitude émerge : les Français savent qu’ils vivent dans « un Absurdistan autoritaire » pour reprendre le terme de la correspondante à Paris de Die Zeit, l’hebdomadaire de l’intelligentsia allemande, que nos réglementations stupéfient. Ubuesque, kafkaïen, administration en folie : nous-mêmes nous nous gargarisons de mots pour dénoncer l’inflation de circulaires, les attestations croquignolesques, les protocoles sanitaires abscons… Chacun a ses propres « choses vues ». Exemple : pourquoi fermer la cour Carrée du Louvre, passage essentiel au centre de Paris, sous prétexte que le Musée lui-même ne reçoit plus de public ? Aussi spontané soit-il, notre effarement collectif n’en est pas moins hypocrite et le constat que nous faisons est d’une effrayante banalité . « Arrêtez donc d’emmerder (sic) les Français, il y a trop de lois, trop de textes, trop de règlements dans ce pays », confiait en 1966 Georges Pompidou, premier ministre, à Jacques Chirac, alors conseiller de son cabinet. Cette bureaucratie que nous faisons mine de honnir, n’en sommesnous pas les complices complaisants ? À la fin des années 1970, et avant même l’alternance socialiste de 1981, Alain Peyrefitte publiait son best-seller sur Le Mal français. Il y démontrait comment la défiance généralisée et le pessimisme de la population se renforcent mutuellement pour faire le lit de l’étatisme le plus étouffant : faute de nous entendre, nous nous inclinons devant ce maître. Il faut également relire Le Phénomène bureaucratique du
LIVRES
LIBRES ÉCHANGES
JEAN-PIERRE ROBIN
grand sociologue Michel Crozier, où il explique : « La fonction profonde de la rigidité bureaucratique peut s’analyser finalement comme une fonction de protection. Elle assure le minimum de sécurité indispensable à l’individu dans ses rapports avec ses semblables. » Ces rigidités sont implicitement au cœur de notre contrat social, avec pour corollaire une Société bloquée (autre livre fameux de Crozier). Nous croyons secouer périodiquement le cocotier par de pseudo-révolutions (Mai 68, union de la gauche, 1981, dégagisme d’En marche ! 2017, « gilets jaunes » 2018, etc). Loin de ces prurits, Crozier n’a eu de cesse de stigmatiser, jusque dans les années 2000, « les trois grands maux, l’étatisme, l’élitisme hiérarchique et l’égalitarisme », les responsables de notre mal-être.
Réflexe protecteur Voilà la véritable explication des contre-performances et du chômage de masse qui ont succédé aux Trente Glorieuses (1945-1975). La reconstruction de l’après-guerre s’était faite sous la houlette de l’État. Elle a dû céder le pas à de nouveaux paradigmes : la libération des échanges au sein de l’Europe et la mondialisation ont alors favorisé – et même exigé - les initiatives des entreprises et des individus. Devant ces évolutions de fond valorisant l’ouverture et l’innovation, notre réflexe a été d’ériger des protections. L’euro a été créé pour se protéger du dollar et de la concurrence allemande. Et en instituant les 35 heures, nous avons cru réagir à la compétition des pays émergents.
La fonction profonde de la rigidité « bureaucratique peut s’analyser
finalement comme une fonction de protection. Elle assure une sécurité MICHEL CROZIER
».
« Dans le domaine économique, notre administration est la fille du gouvernement de Vichy… La rage du contrôle était née de la pénurie des années 1940-1944 », notait déjà Pompidou, dans son livre testament Le Nœud gordien (1974). Pénurie de masques, de tests, de vaccins d’un côté, contrôle tatillon des dizaines de milliards d’euros d’aides distribuées de l’autre : Bercy s’en donne aujourd’hui à cœur joie, apposant son cachet sur tout, faisant le tri entre les activités « essentielles » et les autres. Avec des ratés coûteux : les retards dans la définition des protocoles sanitaires professionnels ont mis à l’arrêt la filière du BTP au printemps 2020. C’est la principale explication de la récession deux fois pire en France qu’en Allemagne au premier semestre 2020. La verticalité du pouvoir revendiquée par le chef de l’État donne sa pleine mesure en état d’urgence. Le Conseil de défense où l’exécutif décide, le Conseil scientifique chargé de le conseiller en matière médicale, le tout nouveau Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, voilà autant d’instances et de cautions scientifiques pour le pouvoir qui pense agir en technocrate éclairé. Le macronisme s’imagine qu’il suffit de « bien administrer », conformément au dogme du saint-simonisme : « Substituer au gouvernement des hommes, l’administration des choses ». Cette doctrine, qui remonte au début du XIXe siècle, est d’ailleurs une tentation récurrente en France. Or c’est bien sûr un leurre : « On ne change pas la société par décret », selon la célèbre formule de Crozier. Mais, en même temps, ce type de gouvernance et d’administration omniprésentes ont fini par devenir une seconde nature pour les Français aussi râleurs que résignés. Voilà pourquoi il leur est aussi difficile de se délivrer de la prison bureaucratique que pour un poisson de sortir de son aquarium. ■
Les Français eux-mêmes se gargarisent de mots pour dénoncer l’inflation de circulaires, les attestations croquignolesques, les protocoles sanitaires abscons. STOCK.ADOBE.COM
IDÉES
Caroline de Malet
£@demaletcaroline
2021-03-15T09:39:58+01:00
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la philosophie originale qui règne au sein de l’entreprise. Les salariés y jouissent d’une très grande liberté : celle de prendre autant de congés qu’ils le souhaitent, de gérer
Reed Hastings.
REED HASTINGS ET ERIN MEYER LA RÈGLE ? PAS DE RÈGLES ! Éditions Buchet-Chastel
JEAN-CHRISTOPHE MARMARA/LE FIGARO
MANAGEMENT Netflix fait partie des entreprises stars américaines qui séduisent les consommateurs autant qu’elles fascinent. L’entreprise de la Silicon Valley, dont la capitalisation boursière a dépassé celle de Disney pendant le premier confinement, en avril 2020, est de celles qui renouvellent le mythe américain. Non content d’avoir révolutionné l’industrie de l’audiovisuel, son patron, Reed Hastings, se distingue aussi par ses méthodes de management. Sa bible en la matière, publiée en anglais en septembre dernier, vient de paraître en français, sous le titre La Règle ? Pas de règles ! et sous-titrée Netflix ou la culture de la réinvention. Ce que propose le cofondateur et PDG du géant du streaming, sous la forme d’un dialogue avec Erin Meyer, enseignante à l’Insead, est un opus sur
leurs horaires ou leurs notes de frais comme ils l’entendent. Ils sont considérés comme des adultes responsables auxquels une confiance totale est accordée. Car pour recruter les meilleurs éléments de la Silicon Valley, il faut une culture particulièrement attractive. Mais cette liberté va de pair avec une totale transparence en interne; qu’il s’agisse des données financières avant qu’elles ne soient rendues publiques ou même d’annoncer une probable réorganisation, y compris si elle n’est qu’à l’étude. « Il y aura peut-être un peu de casse, certains auront peut-être du mal à encaisser le choc, mais c’est normal. Une fois que les choses auront décanté, votre personnel vous fera d’autant plus confiance », justifie le patron atypique sur la base de son expérience. Mais celui qui se rend coupable de la moindre fuite
est avisé de l’implacable sentence: la porte. La franchise entre collaborateurs est aussi érigée en valeur suprême: après chaque entretien, chacun est invité à formuler son avis sur son interlocuteur, sans risquer d’en subir les conséquences. Y compris Reed Hastings lui-même, qui parle d’« évaluation à 360 degrés ».
Culture de l’exigence Au sein de Netflix, il est celui qui fait l’objet de plus de critiques, auxquelles il répond parfois en public, toujours en manifestant à l’égard de son auteur un signe d’appartenance (comme une tape sur l’épaule ou une réponse), de nature à rassurer l’intéressé. La médiocrité n’a par ailleurs pas sa place chez Netflix. Le manager qui considère qu’une de ses ouailles ne mérite pas qu’on se batte pour la garder si elle envisage de partir doit s’en séparer.
Cette logique s’accompagne d’un dévouement sans pareil à l’entreprise de la part de ses salariés grassement rémunérés, que Reed Hastings compare à une équipe de sportifs de haut niveau. Ce dernier considère en revanche que les bonus ne sont pas adaptés aux métiers créatifs. Ce management en apparence très permissif masque donc en réalité une culture de l’exigence : c’est l’excellence ou la porte, avec en lot de consolation de généreuses indemnités de départ. Ce modèle qui donne un coup de pied dans la fourmilière des organisations pyramidales permet de mieux comprendre le processus disruptif de la plateforme aux 200 millions d’abonnés. Après s’être parfois heurté aux cultures locales - notamment au Japon et à Amsterdam - il est aujourd’hui confronté à un nouveau défi, à l’épreuve du télétravail. ■
A
Comment le patron de Netflix révolutionne (aussi) le management
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MÉDIAS et TECH
CAROLINE SALLÉ £@carolinesalle ET ENGUÉRAND RENAULT £@erenault
AUDIOVISUEL Elles portent désormais la culotte. Au royaume de l’information, impossible de passer à côté de ses « femmes puissantes », comme les a décrites Léa Salamé. Elle-même tous les matins au micro de France Inter, Anne-Claire Coudray aux manettes du JT de TF1 le weekend, Marie-Sophie Lacarrau, chaque midi sur la Une, Caroline Roux, l’animatrice de « C dans l’air » et AnneElisabeth Lemoine, celle de « C à vous », deux rendez-vous influents de France 5, Anne-Sophie Lapix, à la tête du « 20 Heures » de France 2 ou encore Élisabeth Quin, chef d’orchestre du magazine « 28 Minutes » en début de soirée sur Arte ? Individuellement, chacune, à sa manière et à son horaire, s’est hissée au rang de poids lourd du PAF. Surtout, ces « big boss » de l’info cumulent une audience colossale, regardées ou écoutées par près de 27 millions de Français. Inédit dans l’histoire du PAF. Elles ne sont certes pas les premières journalistes influentes de la sphère médiatique. Anne Sinclair, Claire Chazal, Christine Ockrent ou Arlette Chabot sont autant de pionnières qui ont balisé le chemin. Mais elles constituaient plutôt des exceptions culturelles éparpillées dans un monde d’hommes. Plus maintenant. « C’est la première fois qu’il y a autant de femmes à l’antenne à des postes clés et des carrefours d’audience importants », relève Caroline Roux, l’animatrice de « C dans l’air » sur France 5, suivie par 1,5 million de téléspectateurs le soir. « Les femmes, on leur confiait surtout les divertissements, rappelle Anne-Elisabeth Lemoine. Maintenant elles informent beaucoup. Elles font débattre des experts, elles recueillent des témoignages, elles mènent des inter-
Les « nouvelles patronnes » de l’info en tête des audiences Elles présentent les JT les plus suivis, les interviews politiques qui comptent, les magazines qui font réfléchir.
Ci-dessus, de gauche à droite : Anne-Claire Coudray, Marie-Sophie Lacarrau, Anne-Sophie Lapix, Anne-Élisabeth Lemoine, Élisabeth Quin, Caroline Roux et Léa Salamé. C. CHEVALIN/TF1, D. GHOSAROSSIAN/FTV, N. GUYON/FTV, P.-E. RASTOIN/ARTE
views politiques… » Il n’y a pas si longtemps, au début des années 1960, cela relevait de la franche incongruité, à en croire le livre de Marlène Coulomb-Gully, Huit femmes pour un plateau. L’ouvrage relate ainsi l’entretien de la journaliste politique Danièle Breem à Télé Magazine. « Journaliste politique ? Curieuse spécialité pour une femme, non ? », interroge l’intervieweur. Je pensais que les femmes s’orientaient plutôt vers un journalisme disons… plus frivole. La mode, quoi ! Les spectacles à la rigueur… Mais la politique, tout de même ! » Plusieurs décennies se sont écoulées avant que l’impensable finisse par entrer dans les mœurs radiophoniques et télévisuelles. « Il faut rendre hommage à Laurence Bloch, qui, il y a cinq ans, a pris le risque de confier à une jeune femme la prestigieuse interview politique du matin. Quand j’ai pris ce poste, il n’y avait que des hommes dans les autres médias pour ce rendez-vous. Maintenant, il n’y a pratiquement que des femmes. Delphine Ernotte n’a pas non plus hésité à me confier les rênes de l’émission politique de France 2 », se réjouit Léa Salamé.
Car s’il y a des femmes à l’écran, il y en aussi beaucoup derrière. Delphine Ernotte, à la tête de France Télévisions, Laurence Bloch patronne de France Inter, Catherine Nayl, expatronne de l’info de TF1 puis de France Inter, Elsa Pallot, rédactrice en chef du JT de 20 heures de France 2… « Ce qui me frappe, c’est l’évolution de niveau de responsabilité des femmes. Elles sont désormais à des postes clés » souligne Anne-Sophie Lapix. « La mixité est un combat ancien, Ce qui compte aujourd’hui, c’est le combat pour la qualité des postes » ajoute Léa Salamé.
Maîtrise de l’antenne «Il y a un moment femme, et c’est tant mieux » insiste-t-elle. « Je ne dirai pas qu’il y a un ton ou une touche féminine. Simplement, j’ai la volonté de trouver des angles précis, des explications concrètes, des pas de côté. Quand s’ouvre le “20 Heures”, tout le monde connaît déjà les actualités », explique Anne-Sophie Lapix. Mais cette percée n’a pas été un long fleuve tranquille. « Toutes celles qui sont là aujourd’hui ont gagné leurs galons de haute lutte. Ce n’est pas juste un effet de mode. C’est une longue route », insiste Caroline Roux. Anne-Claire Coudray, reine incontestée des JT du week-end sur TF1, regardée par 7,3 millions de Français, a longtemps été sur le terrain, en tant que grand reporter. Sur la Une toujours, Marie-Sophie Lacarrau, qui a réussi la prouesse de
faire mieux que Jean-Pierre Pernaut au JT de 13 heures, en séduisant 5,6 millions de téléspectateurs tous les midis, a réalisé une grande partie de sa carrière sur les antennes régionales de France 3. « Les femmes, remarque-t-elle, n’attendent plus comme autrefois qu’on leur fasse de la place. Elles sont volontaires, déterminées. Et ça en motive d’autres. » Pour s’imposer dans un monde conjugué essentiellement au masculin, « je menais mes interviews comme un homme », confiait récemment Anne Sinclair. La relève, avec un grand F, préfère cultiver son style. « Lorsque j’étais plus jeune, j’essayais de ressembler à Jean-Pierre Elkabbach, se souvient Caroline Roux. Mais j’ai rapidement compris que l’on pouvait être crédible sans avoir à singer les autres. » La femme journaliste n’est plus un homme comme les autres. Elle valorise sa différence. « J’ai passé l’âge d’avoir les dents qui raient le parquet. J’ai des cheveux gris et il est désormais admis que l’on peut mettre fin à la dictature des blondes ou des brunes », s’amuse Élisabeth Quin, qui pilote avec humour la bande du « 28 Minutes » d’Arte. « Je suis quelqu’un de très rond, toujours dans l’empathie. J’écoute beaucoup », assume Marie-Sophie Lacarrau. « L’image de la femme dans nos sociétés étant associée à la douceur et à la maternité, la moindre pugnacité est davantage interprétée comme une forme d’agressivité, remarque AnneClaire Coudray. On nous pardonne
Bpifrance va investir davantage dans la deeptech Deux milliards d’euros financeront d’ici à 2023 des sociétés dans les innovations de rupture.
500 start-up
deeptech en 2025. C’est l’objectif fixé par la loi de programmation de recherche
INGRID VERGARA £@Vergara_i
TECHNOLOGIE La pandémie de Covid-19 et l’absence de vaccin français ont rappelé que la recherche et l’innovation de rupture sont indispensables à la compétitivité d’un État. Deux ans après le lancement du plan deeptech, destiné à accélérer le développement de l’écosystème tricolore sur ces technologies de rupture, Bpifrance en constate les premiers effets. En 2020, 200 start-up deeptech ont été créées, quand l’ambition fixée par la loi de programmation de recherche est d’atteindre 500 en 2025. Les laboratoires de recherche fondamentale s’ouvrent davantage à la création d’entreprises, et 44 % des jeunes chercheurs sont prêts à envisager une carrière entrepreneuriale
après leur thèse, selon une étude menée par Bpifrance. Mais les mondes de la recherche et du capital-risque ont parfois du mal à se comprendre, faute d’une grammaire commune. Pour accélérer et faciliter les transferts de technologies et d’innovation, Bpifrance va lancer à l’été 2021 une plateforme financée par l’État, qui réunira un réseau de 23 acteurs : universités, centres de recherche, professionnels de la valorisation de la recherche, du transfert de technologie et de l’innovation du réseau C.U.R.I.E, sociétés d’accélération du transfert des technologies (Satt). La plateforme devra faciliter la vie des futurs créateurs d’entreprises (aide à la constitution d’équipes, aux levées de fonds…). L’État mobilise aussi plus de moyens. En 2020, 220 millions
d’euros ont financé 400 start-up (+30%). «Nous sommes en avance d’un an sur notre plan de marche, c’est un signal que l’écosystème répond et que le financement est là », souligne Paul-François Fournier, directeur exécutif innovation de Bpifrance.
Un écosystème rentable La banque publique rehausse ses objectifs et investira 2 milliards d’euros en fonds propres sur deux ans. « Avec l’effet de levier, cela représentera un investissement de 7 milliards à horizon 2023 », souligne Paul-François Fournier. Avec deux axes prioritaires : la greentech (énergie, protéines alternatives, agriculture de précision…) et la healthtech. L’objectif est d’identifier les technologies les plus prometteuses pour répondre aux défis du ré-
chauffement climatique et améliorer notre santé. Condition de sa durabilité, l’écosystème deeptech se défend aussi en termes de rentabilité. « Avec un multiple de 1,3, les rendements des fonds deeptech souscrits par le Fonds national d’amorçage, sont proches de la moyenne des rendements des autres fonds de notre portefeuille, ce qui démontre la solidité du modèle », souligne Bpifrance, alors que la deeptech est réputée plus gourmande en capitaux et en temps de maturation. L’ambition est désormais d’avoir une ou deux start-up de la French Tech dans le CAC 40 à horizon 2025. De nombreux obstacles restent à lever en matière de financement. « C’est un challenge, mais nous avons tous les éléments pour y parvenir », assure PaulFrançois Fournier. ■
moins qu’aux hommes cette pugnacité. J’ai décidé de m’en débarrasser, car ce n’était pas forcément productif. Une interview n’a pas besoin d’être agressive pour être intéressante. » Décomplexées sur la forme, les femmes impriment aussi une patte singulière, sur le fond. Quand Mariesophie Lacarrau prône un « journalisme de solution et de construction », Caroline Roux met en avant une « approche journalistique anti-buzz, antioutrance, fondée sur la réflexion », et Anne-Claire Coudray une « écriture très directe, très concrète ». Alors que l’actualité s’accélère, que les débats d’opinion s’enveniment et que les propos se radicalisent, les patronnes de l’info maîtrisent leur antenne. « Le plus grand poison et danger est cette injonction de l’époque à choisir son camp et s’y maintenir. J’ai toujours refusé cette injonction. Nous ne somme pas là pour dire : voilà ce qu’il faut penser, mais pour dire voilà comment les gens pensent, en faisant vivre le pluralisme », précise Léa Salamé. « Je me dis qu’on n’est pas obligé de répondre à la radicalité. Notre JT est résolument tourné vers l’explication, le décryptage. Je m’adresse au plus grand nombre je ne réponds pas à chaque individu qui polémique », insiste Anne-Sophie Lapix, qui regrette que le temps de l’info soit rythmé par les réseaux sociaux. Le succès du « 28 Minutes » d’Arte démontre ce besoin des Français de s’échapper de la frénésie du temps présent. « Ma manière d’aborder l’info est plus oblique. Nous parlons plus de sujets internationaux que de la dernière polémique sur le Covid », explique Élisabeth Quin, qui revendique une approche plus culturelle et apaisée de l’actualité. Elle travaille sur une déclinaison prochaine du « 28 Minutes » le dimanche sur la chaîne franco-allemande. ■
EN BREF DÉCÈS DE L’HOMME D’AFFAIRES JEAN FRYDMAN £ L’homme d’affaires francoisraélien, ancien résistant et protagoniste d’une affaire retentissante l’opposant à L'Oréal dans les années 1980-1990, est décédé en Israël à l’âge de 95 ans. Il avait participé au lancement d’Europe 1, dirigé sa régie publicitaire, puis Télé-MonteCarlo, et présidé la régie publicitaire Médiavision.
SUPPRESSIONS D’EMPLOIS CHEZ VW £ Volkswagen a annoncé un plan de suppressions d’emplois non chiffré mais qui pourrait concerner jusqu’à 5 000 postes d’ici à fin 2023, dans le cadre d’une réduction des coûts destinée à financer la transition vers l’électrique.
Nous sommes la GÉNÉRATION 2021
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Soirée spéciale consacrée aux 18-25 ans face à la crise
Présentée par Élise Lucet et Samuel Étienne, avec Émilie Tran Nguyen et Djamel Mazi Le 18 mars à 21.05 sur #Génération2021
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lundi 15 mars 2021 LE FIGARO - N° 23 814 - Cahier N° 4 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr
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Corinne Masiero, venue remettre le César du costume, et la maîtresse de cérémonie, Marina Foïs.
LES CÉSAR DU RIDICULE MERT AND MARCUS ; MARSCHALL ; DOMINIQUE CHARRIAU/AFP ; PUBLIC DOMAIN/WIKIMEDIA COMMONS
NOMBRILISTE, VULGAIRE, ULTRAPOLITISÉE, LA CÉRÉMONIE A DONNÉ UNE IMAGE DÉPLORABLE DU CINÉMA FRANÇAIS. PAGES 38 ET 39
QUAND L’EUROPE FAISAIT LA COURSE AU MUSÉE ESSAI L’HISTORIEN ET PHILOSOPHE KRZYSZTOF POMIAN PUBLIE LE DEUXIÈME TOME D’UNE HISTOIRE ENCYCLOPÉDIQUE PLEINE DE RIVALITÉS ET DE FUREUR. ●
ÉRIC BIÉTRY-RIVIERRE [email protected]
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es musées sont des êtres vivants. Ils naissent, grandissent, parfois meurent ou muent. Krzysztof Pomian le rappelle à bon escient, en cette période de fermeture qui s’éternise pour les 1 200 musées de France. Quand sont nés ces établissements, immenses et imposantes machines aux trésors et documents plus ou moins convenablement rangés mais au moins entretenus pour tous, et même propriété de chaque citoyen ? Pourquoi galeries des beaux-arts, d’histoire, muséums, centres archéologiques ou ethnographiques et autres conservatoires des techniques et des métiers ont-ils soudain poussé comme des champignons dans le sillon des Lumières, de la Révolution et des premières guerres de masse ? Cela d’abord à Paris, puis en Europe avant le Nouveau Monde ? Dans le deuxième tome, sorti depuis le 11 mars, d’une histoire mondiale des musées qui est à la fois politique, sociale
et culturelle (trois tomes à terme !), l’historien et philosophe de 87 ans puise dans sa très vaste érudition pour brosser, avec un style clair et synthétique, un tableau de cette première moitié du XIXe siècle accoucheuse du musée moderne. Celui à la fois national et universel. Pomian remonte aux principes fondateurs, soulignant ce qu’ils peuvent avoir de contradictoire, mettant au jour des tensions toujours actives aujourd’hui. Car le musée idéal se doit d’être à la fois savant et amusant, éducatif et récréatif, dogmatique et démocratique, élitiste et populaire, stable et en évolution.
sous-jacentes aux muséographies s’avère passionnant. Dès les premiers jours du Louvre de Vivant Denon et de Napoléon, puis un peu plus tard du Prado au British Museum ou des musées de la Prusse aux pi-
nacothèques de Munich, l’ambition encyclopédique a été autant commune que l’hégémonique. Et les rivalités entre musées furent tout de suite intenses, tant dans le domaine scientifique que sur le marché de l’art.
Gigantesques spoliations D’emblée est posée la question de ce qu’on doit retenir dans les innombrables objets du monde, et celle de leur classement. Comment organiser ? Par espèces, écoles, styles, ou bien par qualité ? À moins d’opter pour des rapprochements thématiques. Faut-il respecter la chronologie, la géographie, ou plutôt privilégier l’esthétique ? Les réponses varient selon les lieux et les époques. À vrai dire tous les choix ont leurs arguments et le récit exhaustif des idéologies
Projet d’aménagement de la Grande Galerie du Louvre, par Hubert Robert, vers 1796.
Une nation se doit d’avoir ses temples du beau, du bon et du bien. Ils lui sont indispensables pour créer et asseoir sa puissance. Au reste, la gloire de ces temples laïques brille souvent d’un éclat violent. Le récit détaillé par Pomian des gigantesques spoliations perpétrées à chaque invasion est édifiant lui aussi. On y croise par exemple le maréchal Soult. En Espagne de 1808 à 1813, il s’est taillé à coups de sabre une énorme collection de peinture dont plusieurs institutions recueilleront les dépouilles après sa mort. Soult n’est pas ici sans faire penser au Goering prédateur en chef durant la Seconde Guerre mondiale. L’éclosion des principaux musées modernes d’Europe repose ainsi sur ces années sanglantes de 1790 à 1815. Elles constituèrent, comme le rappelle l’auteur, « la période de la plus grande redistribution d’art à l’échelle de l’Europe entière, depuis les guerres de religion et jusqu’à nos jours ». ■ Krzysztof Pomian, Le Musée, une histoire mondiale, tome II : L’ancrage européen, 1789-1850, Gallimard, 560 p., 35 €. Présentation par l’auteur, suivie d’un débat, aujourd’hui de 12 h 30 à 14 heures sur la chaîne YouTube du Louvre.
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UNE CÉRÉMONIE DES CÉSAR D’UNE INDIGENCE ÉRIC NEUHOFF [email protected]
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a pire ? Il n’est pas impossible qu’on ait assisté à la soirée la plus calamiteuse depuis la création des César. Le record était pourtant difficile à battre, surtout après le fiasco de l’année dernière. Le Guinness Book va être obligé d’ajouter un chapitre à sa prochaine édition. Il aurait fallu marcher sur des œufs. Ça n’était pas le genre de la maison. On a pataugé dans une omelette qu’on hésitera à qualifier de baveuse. Marina Foïs, les yeux écarquillés comme un lapin dans les phares d’une voiture, éblouie par son prompteur, commença par ramasser une crotte de chien. Le ton était donné. Il y eut une allusion à George Floyd. C’était inattendu. On entendit les mots bite, couilles, caca, merde, putain. C’était rafraîchissant. Marina Foïs feignit de confondre film de cul avec film docu, ce qui aurait désolé des élèves de CM1 pendant la récréation. Deux intermittents venaient de l’Odéon occupé pour lire leur texte qu’ils ânonnaient. Quelqu’un parla de la loi de sécurité globale. Il importait aussi d’alerter le public sur les dangers des pesticides aux Antilles. Jean-Pascal Zadi, César du meilleur espoir masculin pour Tout simplement noir, s’en chargea. Après avoir arboré la tenue de Peau d’Âne et la robe ensanglantée de Carrie, Corinne Masiero se mit toute nue : elle portait - délicate attention - des tampons hygiéniques usagés en guise de boucles d’oreilles et des messages sur la peau : « No culture no futur » au recto, « Rend nous l’art Jean » au verso (faute d’orthographe incluse). L’instant était solennel. Il s’agissait par-là de protester contre le régime de l’assurance-chômage. On demanda à Nathalie Baye si elle était « une mère de… ». Prononcer « merde » ou « merdeux », au choix. La chose fut répétée à l’envi. La professeur Jeanne Balibar délivra son message politique en Chanel. Elle calcula que les rôles pour les femmes de plus de 40 ans étaient trop rares. Ces gens ont le don de tirer la couverture à eux. Ils étaient là pour récompenser les autres et ne pouvaient s’empêcher de ramener la conversation sur leur cas personnel. Marina Foïs, en robe à paillettes, rappela qu’elle avait eu plusieurs nominations et zéro récompense. Quelle injustice ! Comment ce petit
monde se débrouille-t-il pour se rendre aussi antipathique ? À son époque, Sartre refusait de désespérer Billancourt. Ils ont peur de décourager l’avance sur recettes du CNC. Cela nous valut un éloge des différences poussée jusqu’à l’écartèlement. La caméra ne filmait pas la ministre de la Culture, reléguée dans une autre salle, mais les piques sur Roselyne Bachelot furent nombreuses à l’Olympia. Jean-Pascal Zadi cita Frantz Fanon et Adama Traoré. Fary prévint l’assistance : « Il est possible que mon discours soit un petit peu islamo-gauchiste. » Après ça, le comique noir eut un long blanc. Son numéro de stand-up à base de blagues balbutiées ne se remit jamais de ce trou de mémoire. Il aurait dû être question de cinéma, d’invention, de larmes et de fous rires. Ce fut une litanie de lieux communs, de clichés bienpensants. Où était la légèreté ? Qu’était devenue la passion ? Proposer au monteur Yann Dedet (Pialat, Truffaut, Maïwenn) et au chef opérateur Philippe Rousselot (Boorman, Burton, Cavalier) de remettre une compression était une bonne idée. Ils n’eurent pas l’occasion de parler de leur métier. Pensez, ils auraient évoqué des souvenirs de tournage, livré quelques détails techniques, fourni des anecdotes. On n’était pas là pour ça, n’est-ce pas ? Prout.
Plaintes continuelles Les textes étaient d’une faiblesse insigne. À propos du court-métrage, la maîtresse de cérémonie lança plusieurs fois : « Est-ce que la taille, ça compte ? » Elle enchaîna avec « N’oublions pas que sans la lumière la coloscopie ne serait qu’un trou noir » et se permit un « J’appelle Xavier Dupont de Ligonnès » du meilleur goût. Mamma mia ! Qu’ont-ils fait, oui, du cinéma français ? Que vontils faire au cinéma français ? Ils l’ont enterré en trois heures et demie de nullité et d’ennui. Ces plaintes continuelles frisaient l’indécence. Cette banalité, cet amateurisme, cette prétention dont nous étions les témoins oculaires joignait le déshonneur au ridicule. On espérait du feu, de la vie, des fêlures, du ciel et de la poésie. Ce fut un défilé de sectaires, de juges, bientôt de tyrans. Un abominable forfait a été commis contre le septième art. Quelle voix, parmi les acteurs ou les metteurs en scène, s’élèvera pour protester, clamer haut et fort « Je ne mange
LIEUX COMMUNS, CLICHÉS BIENPENSANTS, BLAGUES SCATOLOGIQUES, NOMBRILISME ET REVENDICATIONS TOUS AZIMUTS : LA SOIRÉE DE VENDREDI A ABÎMÉ LE CINÉMA FRANÇAIS.
pas de ce pain-là» ? Le pensum s’achevait sur une image des 400 Coups, Antoine Doinel contemplant la mer en noir et blanc, détournement de mineur, manière d’enrôler malgré lui Truffaut dans ce festival d’autosatisfaction et de scatologie. En plus, l’âne d’Antoinette dans les Cévennes n’a rien eu. À l’Olympia, de ce côté-là, la concurrence était trop rude. Heureusement, Benjamin Biolay était au piano, considérant les événements avec un regard vaguement désolé. Souchon chanta Quand j’serai KO et Catherine Ringer Je reviens te chercher. Fanny Ardant osa dire du bien des hommes. Sami Bouajila, César du meilleur acteur pour Un fils, un des seuls lauréats à afficher un peu de dignité, l’embrassa. Isabelle Huppert était très chic en noir. Vincent Dedienne fit une blague sur Hitler pour se moquer de la « cancel culture ». Le Splendid au complet, invité pour recevoir un César d’anniversaire, se retrouva devant le micro. Thierry Lhermitte avait ressorti son costume
maronnasse du Père Noël est une ordure et Christian Clavier avait évité d’enfiler à nouveau son maillot des Bronzés. Gérard Jugnot, le lendemain au micro de RTL, constatait avec dépit : « C’est dommage parce que ce n’est pas ça qui va donner envie aux gens de retourner au cinéma. »
Laure Calamy émouvante Louis Garrel salua Jean-Claude Carrière en évoquant son plat préféré, la brouillade aux asperges sauvages. Son discours contenait la juste dose d’émotion et de modestie, ce qui faisait presque tache dans ce désordre narcissique. Adieu les cons rafla toutes les médailles. Albert Dupontel, fidèle à son habitude et pionnier de la distanciation physique, avait choisi la politique de la chaise vide, laissant à sa productrice la charge de ramener la brouette pleine de trophées. Le mufle. Emmanuel Mouret, en tête des nominations (13) pour Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait, repartit quasi-
LE CINÉMA A BÉNÉFICIÉ DE 1,2 MILLIARD D’AIDES ENGUÉRAND RENAULT £@erenault
À entendre les cris de désespoir poussés lors de la cérémonie des César, le public a pu être saisi d’effroi : c’est le cinéma qu’on assassine ! Mais qu’il se rassure, l’ensemble de la profession - techniciens, artistes, producteurs, distributeurs et même exploitants de salle -, n’a pas trop souffert financièrement de la crise. Contrairement à de nombreux secteurs qui ne disposent pas de vitrine médiatique pour se plaindre, le monde du cinéma a été très soutenu par les pouvoirs publics. Juste avant la cérémonie, Roselyne Bachelot a rappelé au micro de Canal+, que l’État avait apporté 1,2 milliard d’euros d’aides au cinéma ! Dans le détail, en mai 2020, l’État a annoncé la prolongation des droits à indemnisation chômage pour tous les intermittents du spectacle (cinéma, audiovisuel, spectacle vivant…) jusqu’en août 2021. Une année blanche qui coûte un milliard d’euros aux finances de l’État. Par ailleurs, le gouvernement et le Centre national de la cinématographie (CNC)
ont été attentifs à soutenir tous les rouages du cinéma dès le début de la crise. Au total, entre aides d’urgence et plan de relance, le gouvernement a remis plus de 270 millions d’euros dans la machinerie. Il a fallu tout d’abord combler le manque à gagner des taxes perçues par le CNC pour financer la production de films. Le système de l’exception culturelle repose sur un ensemble de taxes perçues sur les entrées en salle, les recettes publicitaires des chaînes de télé et enfin sur le chiffre d’affaires des opérateurs télécoms. Avec la crise, ces taxes ont baissé de 160 millions d’euros. Pour éviter que ce reflux ne vienne perturber la production de films, l’État a débloqué une aide de 165 millions, dont 60 millions pour renflouer le CNC et 105 millions pour un plan de relance de la filière cinéma. Loin de souffrir, la production a pu continuer de fonctionner comme si de rien n’était. Alors que les salles obscures sont fermées, la France a encore produit 200 films en 2020. Une absurdité, car entre les films reportés en 2020 et ceux qui doivent sortir en 2021, il va y avoir un sacré embouteillage sur les écrans lorsque les salles rouvriront. Un
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CORINNE MASIERO, MAUVAIS SANG FRANÇOIS AUBEL £@francoisaubel
Séparer la femme de l’artiste ?
ment bredouille – Émilie Dequenne sauvait l’honneur avec un César de la meilleure actrice dans un second rôle. Laure Calamy, l’Antoinette des Cévennes, nous rappela le bon vieux temps des actrices primées émues et bafouillantes. Il manquait décidément une Rosalie à ces César. Romy Schneider se retourne dans sa tombe. Jean Rochefort s’éloigne au galop. Philippe Noiret écrase son cigare et s’en va. Belmondo continue à ne pas mettre les pieds dans ce pétrin. Delon hausse les épaules. Des extraits de films rendirent hommage à Michel Piccoli, Claude Brasseur et Jean-Loup Dabadie. La nostalgie respirait la santé, en comparaison. Si les salles devaient rouvrir, ça serait pour projeter uniquement des Yves Robert ou des Claude Sautet. L’envie était grande de paraphraser la célèbre colère de Piccoli devant un gigot dans Vincent, François, Paul et les autres et de lancer : « Je vous emmerde tous, avec votre vendredi et vos César à la con ! » ■
Arrivée sous un costume de Peau d’Âne et une robe ensanglantée, Corinne Masiero s’est déshabillée, dévoilant des messages revendicatifs inscrits sur son corps. pos de l’actrice qui réclame des rôles d’homme et revendique « le droit d’être moche ». Dans Effacer l’historique, la satire sociale de Gustave Kervern et Benoît Delépine, nommée une seule fois aux César, elle est peu convaincante en chauffeur Uber obsédée par la notation de ses clients. L’an passé, nous l’avions suivie sur un tournage de Marleau. Certains de ces techniciens, dont elle défend la cause aujourd’hui, avaient remarqué chez elle un changement d’attitude. Comme si elle était devenue la caricature d’elle-
La suite de son happening ? On la connaît, l’image de sa nudité a fait le tour du monde. C’était le dernier avatar de Corinne Masiero, apparue plus tôt au Théâtre de l’Odéon, auprès des occupants de la CGT-spectacle, avant de fouler le tapis rouge des César, dans son gilet jaune, rappel de son ralliement au mouvement contestataire. En 2017, elle avait apporté son soutien à l’Insoumis François Ruffin pour les législatives. Le 5 mai 2018, elle participait à « la fête à Macron », rassemblement contre la politique du président de la République. Elle avait tout de même été conviée à l’Élysée avec l’équipe des Invisibles, film dans lequel elle incarne la directrice d’un centre pour sans-abri. Mais avait décliné l’invitation. Et l’avait fait savoir, comme à son habitude, bruyamment. La transparence de ses idées politiques enferme peu à peu Corinne Masiero dans son rôle. Celui de l’actrice qui dit pister sans cesse les « crimes sociaux ». Doit-on encore dissocier la femme de l’artiste ? Dans Capitaine Marleau, qui, preuve de son succès (entre 6 et 7 millions de téléspectateurs par épisode), quitte France 3 pour France 2, elle cosigne désormais les dialogues pour faire vibrer, dixit Isabelle Adjani, qui lui a donné la réplique, « sa fibre révolutionnaire ». Quitte à les transformer en tracts. « Elle peut aller très loin dans le politiquement incorrect », poursuit la star. Trop loin ? Même Josée Dayan, qui lui a offert ce rôle d’enquêtrice rebelle, s’en lasse. « À certains moments, je lui dis : “Écoutez on est dans un personnage, ce n’est pas vous qui parlez” », a confié la réalisatrice au micro de Sud Radio à pro-
même. Ils regrettaient qu’elle ne leur adresse plus la parole. La camarade aurait-elle pris la grosse tête ? Sous son militantisme disparaît en tout cas peu à peu l’actrice talentueuse découverte dans Louise Wimmer, l’histoire d’une femme cabossée qui vit dans sa voiture. Pas vraiment un rôle de composition pour Corinne Masiero qui a connu la rue, la drogue et la prostitution avant que le théâtre ne devienne sa planche de salut. Une interprétation pour laquelle, en 2013, elle avait été nommée aux César… ■
C’est dommage parce que ce n’est pas ça qui va donner envie aux gens de retourner au cinéma
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GÉRARD JUGNOT, LE LENDEMAIN, AU MICRO DE RTL
©GettyImages
RECORD
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de spectateurs, soit la plus faible audience depuis 2010
POOL/REUTERS
Elle n’a pas montré le meilleur profil du cinéma français. Corinne Masiero n’est certes pas la seule à avoir confondu la 46e édition des César avec un meeting politique, tendance « convergence des luttes », mais la comédienne de 57 ans est allée jusqu’à offrir le piètre spectacle de sa nudité aux 150 représentants du septième art français présents à l’Olympia et au 1,6 million de téléspectateurs (la plus mauvaise audience depuis dix ans), abasourdis de découvrir ce qui se cache donc sous la chapka du Capitaine Marleau. La gendarmette la plus célèbre de la télé n’est pas arrivée d’emblée dans le plus simple appareil comme l’avait osé, avant elle, le dramaturge Sébastien Thiéry, en 2015, lors de la 27e cérémonie des Molières. Elle s’est avancée sous un costume de Peau d’Âne ensanglanté. Avec des tampons usagés en guise de pendants d’oreilles. « On ne va pas se mentir, qui financerait Peau d’Âne aujourd’hui ? L’histoire d’un père qui veut se marier avec sa fille ? Le CNC, peut-être ? C’est pas de moi, la blague », lance-t-elle en référence à Dominique Boutonnat, patron du Centre national du cinéma, mis en examen pour agression sexuelle sur son filleul. La réconciliation de la « grande famille » du cinéma attendra. La native de Douai, qui a grandi au sein d’une fratrie de sept enfants, en fait-elle partie d’ailleurs, elle qui joue de son accent du Nord, rempart, dit-elle, contre la « prolophobie » des milieux culturels ?
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LES CONCERTS NOUS MANQUENT ! Du 15 au 19 mars à 20h
BACK TO LIVE !
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Écoutez tous les artistes en live dans l’émission d’Emilie Mazoyer
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La question qui se pose actuellement est : l’État va-t-il renouveler en 2021, les efforts consentis en 2020 ? Le gouvernement et le CNC se réservent encore du temps pour répondre à la question. Car tout dépendra de trois paramètres. Le premier est de savoir à quelle date rouvriront les salles. Le CNC tablait sur le deuxième semestre 2021 mais il faut composer avec la pandémie. Le deuxième est tout aussi incertain. Canal+ continuera-t-il de soutenir le cinéma ? Aujourd’hui, le groupe est soumis à des obligations et injecte 160 millions d’euros par an dans le pré-achat de films. Mais s’il décide d’abandonner son statut actuel
ALICE ET MOI – BÉNABAR – CALI - CAMÉLIA JORDANA CASCADEUR - CHARLOTTE CARDIN - EDDY DE PRETTO EHLA – HERVÉ – IMANY - JULIEN CLERC - KEREN ANN MAUVAIS ŒIL - NOÉ PRESZOW - RAPHAËL - ROSE VIANNEY - YAROL POUPAUD - YELLE À retrouver aussi en Facebook Live A
L’arrivée des plateformes
pour celui d’une plateforme comme Netflix, son engagement financier risque d’être divisé par trois ou quatre. Or le rôle de Canal+ est crucial dans la vie d’un film. Car sans sa participation, un film n’a aucune chance d’obtenir de financement des autres partenaires comme les chaînes gratuites, les collectivités locales et les distributeurs. Troisième inconnue, quelle place les plateformes Netflix ou Disney+ vontelles prendre dans le financement du cinéma ? Netflix, Amazon Prime devraient consacrer 4 % de leur chiffre d’affaires français au financement du cinéma. Pour Disney +, plus orienté septième art, ce pourcentage pourrait être plus élevé. Le CNC estime que les plateformes pourraient injecter en 2021 entre 40 et 50 millions d’euros. Au final, il est aujourd’hui impossible de savoir quel sera le manque à gagner de la profession en 2021. Mais la volonté d’aider le cinéma « coûte que coûte » est une décision politique. Et si le cinéma se montre toujours aussi arrogant, l’État pourrait être moins enclin à lui venir en aide. ■
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problème que devront résoudre les distributeurs. Ils ont avancé beaucoup d’argent pour des films non sortis et ne peuvent plus en mettre dans les films à sortir. Eux aussi ont été soutenus, via l’aide d’urgence de 75 millions débloquée cet été. Enfin, les exploitants de salles bénéficient de 50 millions d’euros via un fonds pour la billetterie et 34 millions via le plan de relance.
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PARIS HILTON : « J’AI TOUJOURS ÉTÉ EN AVANCE SUR MON TEMPS »
PREMIÈRE FEMME À AVOIR FONDÉ UN EMPIRE À PARTIR DE SA PROPRE IMAGE, LA BLONDE HÉRITIÈRE REVIENT, MÉCONNAISSABLE, EN ÉGÉRIE DE LANVIN, LA PLUS ANCIENNE MAISON DE COUTURE FRANÇAISE. ENTRETIEN EXCLUSIF. PROPOS RECUEILLIS PAR
VALÉRIE GUÉDON [email protected]
C’
est l’influenceuse originelle. Celle qui a inspiré toutes les autres. Paris Hilton, 40 ans le mois dernier, a créé le fameux « famous for
being famous » (« célèbre pour être célèbre » dans la langue de Molière). Bien avant Kim Kardashian… qui était, d’ailleurs, son assistante à l’époque, l’inconnue portant les sacs derrière la blonde peroxydée sur les photos people. Quand, au début des années 2000, Miss Hilton entre dans la lumière, elle est « seulement » l’héritière délurée des hôtels de luxe. À force de selfies et de téléréalité, la Barbie en jogging fluo Juicy Couture et robes à paillettes riquiqui va monétiser pour des millions de dollars son « style de vie » extravagant. Vingt ans plus tard, ce n’est pas en une des tabloïds qu’elle réapparaît (encore qu’elle vienne d’annoncer ses fiançailles) mais en égérie ultrachic de Lanvin. « Je suis né en 1987, raconte Bruno Sialelli, le directeur artistique de la maison parisienne. Quand elle a percé, j’avais une quinzaine d’années. Cette fille tout en jambe avec ses
l’opportunité de montrer la vraie Paris. En quoi est-il important de dévoiler cette autre image de vous-même ? Je vis sous l’œil du public depuis mon adolescence. Si cette exposition a parfois été pesante, ce dont je suis le plus fière est ma résilience et l’empire que j’ai créé. C’est pour cette raison que j’ai accepté de participer au documentaire This is Paris. Je suis heureuse et fière que le monde ait pu voir ce film et me comprendre un peu mieux. J’ai vécu pas mal de choses difficiles qui ont fait de moi la femme forte que je suis aujourd’hui. À ce stade de ma vie, je préfère regarder vers l’avant plutôt qu’en arrière. Et je n’ai jamais été aussi heureuse. Je me suis fiancée la semaine dernière à mon âme sœur. Je travaille sur différents projets comme le podcast « This is Paris », ou encore ma nouvelle marque de produits dérivés qui s’appelle Paris et non pas Paris Hilton. Pour le prochain chapitre de ma vie, je veux continuer de montrer aux gens une image plus authentique.
Paris Hilton, héroïne de la dernière campagne publicitaire de Lanvin, signée du duo de photographes Mert Alas & Marcus Piggott, lancée aujourd’hui. MERT AND MARCUS
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petits chiens sous le bras et son look pas possible m’a toujours fasciné. » Nommé directeur artistique en 2019, ce natif de Marseille distille, au fil des saisons, la juste dose de pop culture dans les collections de la plus vieille maison de couture française. « J’ai tout de suite senti derrière son personnage de ravissante idiote photogénique une vulnérabilité. » En effet, l’an dernier, la bimbo révélait dans le documentaire This is Paris, vu des millions de fois sur YouTube, les traumas d’une adolescence passée dans un pensionnat pour enfants riches à la dérive aux méthodes controversées. « Je réfléchis depuis longtemps à la capacité du vêtement à nous transformer, reprend M. Sialelli. Quand est venu le moment de travailler sur cette campagne, j’ai tout de suite pensé à Paris Hilton. Un peu comme une révélation. Elle est l’incarnation parfaite de cette métamorphose possible à travers le luxe. Et puis, je suis fasciné par les swans, ces femmes incroyables des années 1960, dans l’entourage de Truman Capote, le Black and White Ball, etc. C’est peut-être parce que je viens de province mais j’ai toujours idéalisé ces milieux. En y réfléchissant, Paris est une swan des temps modernes. » En exclusivité pour Le Figaro, Paris Hilton se prête de bonne guerre au jeu des questions-réponses. Au téléphone, de sa voix nasillarde aussi légendaire que ses chihuahuas, elle revient sur sa carrière, ses nouveaux projets et son amour pour Lanvin depuis que, petite, elle accompagnait sa mère faire du shopping dans la boutique de Rodeo Drive. LE FIGARO. - C’est la première fois que vous êtes égérie d’une maison de luxe française. Que représente pour vous cette campagne ? Paris HILTON. - J’ai toujours adoré la mode parisienne, élégante, iconique et intemporelle. Petite, j’allais avec ma mère dans la boutique Lanvin de Beverly Hills, sur Rodeo Drive (Los Angeles). Elle collectionnait les robes et les bijoux signés à l’époque par Alber Elbaz. Je me souviens des exquises ballerines qu’elle m’avait achetées. J’ai grandi en aimant Lanvin. Être leur égérie est un grand honneur. L’histoire de cette maison lancée par une femme forte et puissante, il y a cent trente ans, résonne en moi. J’ai fait la connaissance de Bruno début 2020. Il m’a parlé de son idée de campagne publicitaire et j’ai adoré. Il voulait montrer ma capacité à changer, à me transformer dans des images que le public n’attend pas de Paris Hilton. Je savais que Lanvin, Bruno et Mert et Marcus (les photographes de cette campagne, NDLR) étaient les meilleurs pour construire cette image naturelle, puissante et élégante. J’ai tout de suite vu dans ce projet
Les swans, ces mondaines des années 1960, sont l’inspiration de la campagne. Pour Bruno Sialelli, vous êtes la nouvelle mondaine. Êtes-vous d’accord ? Oui, je suis une socialite. Mais je suis aussi beaucoup plus que cela. J’ai toujours été consciente que ma célébrité a d’abord été liée à mon nom de famille. Mais comme il est dit dans le documentaire qui m’est consacré, j’ai été l’une des premières personnes à comprendre le pouvoir de l’image, à avoir capitalisé dessus pour construire un empire commercial mondial qui compte aujourd’hui dix-neuf lignes de produits et a généré plus de 4 milliards de dollars. Désormais, l’influence tient un rôle capital dans l’industrie de la mode. Quel est votre avis sur ce phénomène ? J’avais pressenti ce changement avant même que le mot influenceur existe. J’ai toujours été en avance sur mon temps, je me suis toujours projetée dans l’avenir. Très tôt, j’ai su que le personal branding aurait un impact sur la mode. À travers les réseaux sociaux, tout le monde peut « influencer » les autres. Les influenceurs ont cette capacité unique de conduire les tendances justement parce que n’importe qui peut avoir accès à eux. La convergence du luxe avec les réseaux sociaux ne va faire qu’augmenter. Je suis extrêmement fière d’avoir été une pionnière dans ce domaine. En 2006, vous avez dit au LA Times : « Chaque décennie a son icône blonde. Comme Marilyn Monroe et Lady Diana en leur temps, je suis celle des années 2000. » Qu’est-ce qui fait de vous cette icône ? Je l’ai dit parce que tout le monde le disait à l’époque et le pense encore aujourd’hui. J’en suis très flattée car j’ai toujours admiré Marilyn et Lady Di. Être iconique est un incroyable compliment. En tant que première star de téléréalité, première influenceuse, j’ai toujours fait les choses à ma façon, devancé les courants de mode plutôt que de les suivre. Vous dites maintenant vouloir mettre votre voix au service de vos fans. Vous considérez-vous comme la porte-parole d’une génération ? J’adore être une inspiration pour eux. Je veux leur montrer que si on travaille dur, qu’on est gentil, tout est possible. Je crois sincèrement que ce que vous mettez dans le monde vous revient toujours. À 40 ans, j’ai traversé tellement d’épreuves… Grâce à mon expérience, je peux être de bon conseil pour eux, pas seulement pour construire une entreprise ou une marque, mais aussi sur un plan plus personnel. Il ne faut pas laisser les aléas de la vie vous définir. Je voudrais exercer une influence bienveillante : transmettre l’idée que quoi qu’il vous soit arrivé, ce vécu vous rend plus fort si vous l’utilisez pour laisser une empreinte positive sur le monde. ■
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C’
est le produit vedette des derniers mois ! Toutes les marques audio ou d’électronique grand public s’y sont mises. Apparues en 2016, popularisées par les AirPods d’Apple en 2017, les oreillettes Bluetooth, appelées aussi écouteurs True Wireless, explosent sur le marché grâce à des performances en nette progression. Dénuées de fil, elles offrent une liberté totale de mouvement pour écouter la musique de son téléphone, regarder un film ou prendre des appels. Caractéristique commune à tous les modèles, les écouteurs True Wireless se rangent dans un boîtier de transport, disposant de sa propre batterie, et dans lequel ils viennent se recharger. Revendiquant une autonomie allant de 4 à 6 heures, ils bénéficient ainsi d’une réserve de 2 à 3 charges supplémentaires. De quoi tenir presque une semaine sans risquer la panne ! À condition de ne pas oublier de charger le boîtier… Attention : les oreilles de chaque personne sont différentes ! Pour bénéficier de performances optimales, il convient d’essayer les différents embouts mis à disposition pour identifier celui qui s’adaptera le mieux à son conduit auditif. Il s’agit d’une étape primordiale pour maximiser le confort mais surtout pour entendre convenablement les fréquences graves.
tent oppressées par le silence total. Ainsi, des marques comme Klipsch ou Marshall proposent de paramétrer le degré d’ambiance extérieure à filtrer. Côté ergonomie, les commandes tactiles se généralisent pour changer de piste, monter le volume ou jouer la musique en balayant simplement le côté d’une des oreillettes… À l’usage, ce système s’avère aussi efficace qu’agaçant puisque le moindre faux mouvement, notamment pour remettre en place une oreillette, peut conduire à lancer la numérotation d’une personne à qui l’on n’avait pas du tout envie de parler… Enfin la dernière tendance à la mode consiste à déclencher des actions à la voix comme on le fait avec le contrôle vocal d’un smartphone ou d’une enceinte Bluetooth. Une fonction pratique mais indiscrète… À chacun de choisir. Pour débuter, on pourrait se laisser tenter par les très abordables Mi True Wireless Earphones 2 du chinois Xiaomi (50 € sur le site de la Fnac). S’ils reprennent le design iconique des AirPods d’Apple, ils s’en écartent par une ergonomie discutable (ils tiennent mal dans les oreilles) et surtout un son déplaisant composé de basses anémiques et d’aigus agressifs. À fuir ! De meilleure facture, les Enco X de son compatriote Oppo (3, 179 €) reprennent la même architecture en la gratifiant des compétences
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Accessoire de mode Les utilisateurs en recherche d’une expérience plus stylée craqueront pour les intra-auriculaires Mode II de Marshall (2, 179 €). Fidèles à l’imagerie rock’n’roll emblématique du fabricant anglais, ils sont livrés dans un magnifique étui de chargement signé du nom de la marque, et arborent un imposant M majuscule sur leurs faces extérieures. Pour ne rien gâcher, ils résistent aux éclaboussures et affichent une autonomie totale de 25 heures À l’usage, nous avons été emballés par leur style inimitable, leur taille riquiqui et leur capacité d’isolation. Côté son, nous avons préféré employer un paramètre d’égalisation personnalisé, disponible via l’application mobile dédiée,
Au doigt et à la voix Les produits les plus récents se dotent d’innovations pour magnifier l’expérience d’écoute. En premier lieu, les systèmes de réduction active du bruit permettent d’isoler l’auditeur en éliminant les sons extérieurs (ils émettent les mêmes sons mais en opposition de phase afin de les éliminer presque totalement). Efficace pour masquer les bruits de la rue par exemple, cette technique peut cependant occulter un danger. De même, certaines personnes se sen-
acoustiques des danois de Dynaudio. Résultat : un son hi-fi rondouillard très agréable, auquel on pourra seulement reprocher un léger manque de médiums. Pour le reste, ils proposent une réduction active du bruit probante, des contrôles tactiles ainsi qu’un boîtier de rangement miniature assurant une autonomie totale de 25 heures Un choix raisonnable. Un peu plus chers, les Technics EAHAZ70W (5, 279 €) sortent du lot avec un rendu hi-fi flatteur, porté par des basses omniprésentes. Affichant une excellente autonomie ainsi qu’une isolation de bonne facture, ils pêchent par une interface tactile trop compliquée et des performances voix limites. Précisons qu’ils sont très gros et ne conviendront pas à des oreilles menues.
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afin d’amplifier les fréquences basses, car les Mode II sonnent assez médiums d’origine. Deux bémols cependant à cette expérience : des commandes tactiles complexes et difficiles à maîtriser au vu de la taille modeste du produit, et des déconnexions intempestives qui nous ont gâché le plaisir de l’écoute musicale. Un problème certainement lié à notre exemplaire de test… Dans la même veine élégante, mais plus haut de gamme, les T5 II True Wireless Sport Mclaren Racing de l’américain Klipsch (1, 279 €) allient l’exigence de la course automobile en F1 et un savoir-faire audio indéniable. Convoquant tous les superlatifs, ils mêlent étanchéité (résistants à 1 mètre d’immersion), système d’élimination de l’humidité, chargement de l’étui sans fil, mode transparence pour écouter les bruits ambiants et une autonomie extraordinaire de 32 heures, dont 8 heures pour les écouteurs. De quoi les emmener partout avec soi sur terre, sur mer ou dans le ciel… Quant à l’audio, il s’avère parfaitement équilibré, pour la musique comme pour la voix. On conseillera évidemment de télécharger l’application mobile Klipsch Connect App pour affiner l’égalisation ou gérer le mode de transparence. Terminons avec la nouvelle version du maître étalon Apple : les AirPods Pro (4, 229 €). Ultralégers, confortables, ces intra-auriculaires résistent à la transpiration et à l’eau, ce qui en fait un produit de choix pour les sportifs. Leur système de réduction des bruits environnants, avec mode transparence, est un modèle du genre et leur autonomie reste dans la moyenne avec 24 heures d’utilisation. Plus original, il suffit de rapprocher deux paires pour partager le même son. Pas mal pour regarder un film en amoureux dans le train ! À l’usage, nous avons été ébahis par leur son ample et confortable, digne des meilleurs spécialistes de l’audio. Seule limitation, ces écouteurs s’avèrent bien plus agréables à utiliser dans un écosystème Apple. On ne s’en étonnera qu’à moitié… ■
KLIPSCH, MARSCHALL, OPPO, APPLE, TECHNICS
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UN MISSILE VOLANT POUR LE GRAND PUBLIC
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ous plongeons à toute vitesse en direction du sol pour remonter entre deux arbres et continuer notre course en direction de la capitale, profitant de la vue dégagée pour admirer la silhouette paisible de la tour Eiffel surnageant au milieu des immeubles. Casque vissé sur la tête pour visualiser les images de la caméra en direct, télécommande en main, nous venons de tester le nouveau drone du spécialiste chinois DJI, le FPV. Cette petite merveille de technologie combine la vue à la première personne des drones FPV, les performances à haute vitesse des bolides de course et les mouvements cinématographiques des caméras de modèles professionnels. En mode normal, le pilotage est secondé par des aides multiples pour ralentir à l’approche d’un obstacle ou garder l’équilibre quoi qu’on lui demande. En cas de problème ou de panique, la télécommande dispose d’un bouton pour immobiliser le drone à une position fixe ou le
ramener et le faire atterrir de manière automatique à son point de départ. En désactivant ces aides, il est possible de prendre totalement le contrôle de l’appareil pour effectuer des démarrages de 0 à 100 km/h en 2 secondes et atteindre les 140 km/h ! Époustouflant ! Lors de nos essais, nous avons été surpris par la facilité de prise en main d’un produit autrefois réservé à un public averti. Après une lecture scrupuleuse du manuel afin de comprendre le maniement de l’appareil et la fonction des différentes touches de la radiocommande, notamment le retour d’urgence ou l’inclinaison de la caméra, nous nous sommes surpris à réaliser des courses de folie en seulement quelques minutes de prise en main. Les yeux rivés sur l’écran du casque, nous nous sommes envolés dans le ciel avec un sentiment de liberté absolument fantastique. On se prendrait pour un aigle ! Pour couronner le tout, il suffit d’une pression sur le bouton dédié pour déclencher la caméra et réaliser des
photos et vidéos (stabilisées 4K à 60 images par seconde) absolument sublimes de ses exploits (enregistrées sur une carte microSDXC Sandisk Extreme de 128 Go, 30 €). En revanche, nous n’avons pas osé nous aventurer dans le mode manuel qui débride tous les garde-fous et permet d’atteindre la vitesse maximum. Le fabricant préconise d’effectuer un entraînement virtuel préalable afin d’éviter un accident prématuré.
Pousse-au-crime Vendu 1 349 €, le DJI FPV est livré avec une paire de lunettes, une radiocommande et une batterie (autonomie 16 minutes). Un contrôleur à une main peut être ajouté pour 149 €. Offrant une portée de 10 km, une vitesse de 140 km/h et la possibilité de s’envoler à près de 6 000 m d’altitude, ce drone est un véritable pousse-au-crime. La réglementation française est en effet assez stricte et complexe sur le sujet. Les modifications intervenues en début d’année limitent
Le nouveau drone DJI combine la vue à la première personne des drones FPV, les performances à haute vitesse des bolides de course et les mouvements cinématographiques des caméras de modèles professionnels. DJI FPV
désormais l’expérience aux zones autorisées, la hauteur de vol à 120 m, et n’admettent le pilotage avec des lunettes d’immersion que si un observateur conserve l’appareil en vue directe pour prévenir les dangers. Ceci ne grève en rien le plaisir que nous avons eu à manier le DJI FPV. Seule nuance à apporter, cet appareil hybride reste légèrement dépassé par les drones dédiés à un usage spécifique unique (course, photo aérienne) mais qui requièrent une véritable formation de pilote. Un faux problème puisque sa cible reste le grand public. Bon, on y retourne… ■ P. G.
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RÉALISANT DES VOLS EN IMMERSION À 140 KM/H AINSI QUE LA CAPTURE DE VIDÉOS 4K ÉPOUSTOUFLANTES, LE DRONE DJI FPV BÉNÉFICIE D’UNE ASSISTANCE AU PILOTAGE POUR SÉDUIRE LES DÉBUTANTS. UNE VRAIE RÉVOLUTION.
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LE FIGARO
TÉLÉVISION
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Dans La Traque, Philippe Torreton (au centre) prête ses traits à l’ogre des Ardennes. L’acteur est parfait : diabolique à souhait et jamais caricatural.
14/20
« 6 X CONFINÉ•E•S », LUNDI 15 MARS, SUR CANAL+, À 21 HEURES
Six courts-métrages de vingt minutes sur le thème du confinement. Tel est le point de départ de la nouvelle création décalée de Canal+ (Calls, Neuf meufs). Derrière la caméra, six jeunes réalisateurs et réalisatrices et une ligne directrice, celle de l’humour. À l’arrivée, des fortunes forcément diverses. On retiendra Scorpex, de So Me, dans lequel un DJ star un peu has been (Vincent Cassel, formidable, flamboyant et pathétique à la fois) convie un jeune compositeur de musique électronique (son nègre musical) et sa petite amie à séjourner dans son appartement parisien afin de retrouver l’inspiration. Dans L’Art de vivre, d’Antoine de Bary, les retrouvailles d’une famille aisée et oisive (réjouissants Marie Bunel et Félix Moati), à la bonne conscience humaniste, vire à la farce noire avec l’arrivée d’un étranger en panne d’auto (Gilbert Melki, génialement insupportable, comme souvent). Ou encore Gina, de Marina Rollman, où un jeune médecin cède, contre rémunération, aux avances de la femme – mûre - d’un patient. Une réflexion sur la solitude et l’âge doublée d’un joli retournement de situation.
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« INNOCENT », QUATRE ÉPISODES, 13ÈME RUE, À PARTIR DU DIMANCHE 21 MARS, À 20 H 55
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Spécialiste des remakes - souvent réussis - de formats étrangers (Les Bracelets rouges, Les Innocents, Je te promets…), TF1 adapte cette fois Keeping Faith, une série galloise. Gloria, avocate, mère d’une famille unie, en congé maternité, mène une existence sereine en Bretagne. Lorsque son époux, avocat lui aussi, disparaît brutalement. Elle découvre alors l’ampleur du mensonge dans lequel elle vivait. Cécile Bois (Candice Renoir) prête sa belle sincérité à cette héroïne qui se débat pour faire éclater la vérité et ne pas sombrer. Mais elle est desservie par un scénario qui s’étire de façon poussive, des rebondissements artificiels (la scène
FRANÇOIS AUBEL, JULIA BAUDIN, CÉLINE FONTANA ET CONSTANCE JAMET
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MONNAIE AVANT L'EURO
CHEVAL AILÉ DE LÉGENDE
ACTION À LA HAUSSE
DÉCOLORÉ PAR L'EAU
GOMME À MÂCHER
CANAL D'ÉVACUATION
COUPER DES TÊTES
CHAMPIGNON DE COUCHE
COUSSIN D'AUTOMOBILISTE
ARRIVÉ SUR LA NAPPE
SÉRIE DE VICTOIRES
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ELLE A HORREUR DU VIDE
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VERTICALEMENT 1. Pestilentiel. - 2. Aquarelliste. - 3. Surcouf. Socs. - 4. Savonneuse. - 5. Atonie. Raton. - 6. Bilée. Digère. - 7. Loto. Hune. Mu. - 8. Enesco. Ester.
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HORIZONTALEMENT 1. Passable. - 2. Équation. - 3. Survolté. - 4. Taconeos. - 5. Ironie. - 6. Léune. Hô. - 7. Elfe. Dû. - 8. NL. Urine. - 9. Tissages. - 10. Isoète. - 11. Etc. Orme. - 12. Lésineur.
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Exemple
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SOLUTION DU PROBLÈME N° 5612
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« GLORIA », TF1, JEUDI 18 MARS, A 21 H 05
RONDE DES MOTS
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Une énième série policière suédoise, Commandant Backström, inspirée de la collection d’ouvrages de Leif G. W. Persson, débarque sur France 3. Son originalité ? Elle tient à bien peu de chose. Le héros, flic brillant mais arrogant, est aussi vedette du petit écran, où il participe à un programme sur les homicides. Ce sexagénaire bellâtre, séducteur invétéré, enchaîne les conquêtes, tout en traitant ses collègues, voire ses supérieurs, avec rudesse et mépris. Mais ni méchant d’envergure ni faux cynique, l’homme s’avère juste banalement antipathique et sans panache, au point d’annihiler toute envie de passer du temps en sa compagnie, en dépit d’une intrigue, certes standard, mais raisonnablement efficace.
Trouvez les mots correspondant aux définitions centrales et inscrivez-les autour de la case qui leur revient. La première lettre de chaque mot est indiquée par le triangle. Chaque mot se lit dans le sens des aiguilles d’une montre.
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« COMMANDANT BACKSTRÖM », FRANCE 3, DIMANCHE 21 MARS, À 21 H 05
SOLUTION DU NUMÉRO PRÉCÉDENT 4 5 1 7 3 9 6 2 8
3 6 9 8 5 2 4 7 1
7 8 2 6 1 4 5 9 3
9 7 6 1 8 5 2 3 4
2 4 5 9 6 3 1 8 7
1 3 8 2 4 7 9 5 6
5 1 3 4 9 8 7 6 2
6 9 7 3 2 1 8 4 5
8 2 4 5 7 6 3 1 9
5 4 8 6 3 9 2 7 1
1 6 7 8 2 4 3 9 5
3 2 9 1 5 7 6 8 4
4 3 6 9 7 1 5 2 8
8 7 5 2 4 6 9 1 3
2 9 1 3 8 5 7 4 6
6 8 2 7 1 3 4 5 9
7 5 3 4 9 8 1 6 2
9 1 4 5 6 2 8 3 7
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3 2 7 5 1 6 4 9 8
5 6 4 1 8 3 9 2 7
8 3 9 2 5 7 6 4 1
7 1 2 9 6 4 5 8 3
6 5 8 7 3 9 2 1 4
4 7 3 6 2 1 8 5 9
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LETTRES EN PLUS CACHOU - BRUTAL - CASINO - HAPPER. LETTRES EN MOINS Les mots à trouver sont : PRIME (Lisser, étiage, glacer, alaise, draper). DOUVE (Genre, tison, caser, eider, talon).
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VERTICALEMENT
1. Instrument de grande taille. - 2. De la graine de racaille selon Chevènement. - 3. Devant Gardner. Décapant. - 4. Roule régulièrement sa clientèle. Forme d’intelligence. - 5. Saillie de la hanche. Classer par ordre d’importance. - 6. Le vieux du stade. Prit une robe toute neuve. - 7. Aguiches dans les pubs. Chaînes humiliantes. - 8. Sa maison protégea l’Arioste. A la tête dans les nuages.
Par Vincent Labbé 1
5/20
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SOLUTION DU N°3573
PROBLÈME N° 5613
HORIZONTALEMENT
Une fois de plus, les fans ne sont pas contents. Voilà qu’ils assistent à nouveau, impuissants, au départ de l’un des piliers de la série. Après Ziva (Cote de Pablo) et Di Nozzo (Michael Weatherly), cette 18e saison dit au revoir à la psy de service Jacqueline Sloane (Maria Bello). Elle sera bientôt remplacée par Jessica Knight (Katrina Law, transfuge de Hawaii Five-0). Quant au fil rouge, rien de neuf. La franchise de Donald P. Bellisario commence à sentir le sapin ? Mark Harmon serait d’ailleurs sur le départ. Et le spin-off NCIS : New Orleans vient d’être définitivement annulé.
Lundi 15 mars
MOTS CROISÉS
d’ouverture introduit un faux suspense) alors que les enjeux de l’intrigue paraissent rapidement assez clairs. Le reste du casting, tout aussi séduisant sur le papier, avec Barbara Schulz, JoeyStarr, Bernard Le Coq, Malik Zidi ou Mathieu Madenian, se révèle sous-employé, sans réelle partition à jouer. Gloria manque également d’un ancrage géographique et culturel fort qui aurait pu lui offrir, comme son modèle original tourné en anglais et gallois, un supplément d’âme.
« NCIS », SAISON 18, M6, VENDREDI 19 MARS, À 21 H 05
France 3 propose une énième série policière suédoise, Commandant Backström, à l’intrigue standard.
Qui a tué Tara Collins ? La question demeure sans réponse. Le drame s’est pour-
1. Soutenait Pierre ou Paul. - 2. Ont reçu un traitement de façade. - 3. Doublât tout en douceur. - 4. Brin de chanvre. Un dixième de pascal-seconde. - 5. Pour une vente maritime ou des allocs. Il était à flot et ne manquait pas d’espèces. - 6. Dévoreur de contes. Sont dans l’erreur. - 7. Verres luisants. Petit personnel. - 8. Langue froide, en un sens. - 9. Poser un écusson. Note leitmotiv de la fanfare. - 10. Généraux sans division. - 11. Bouquets floraux. - 12. Donne du cholestérol.
10/20
tant produit il y a sept ans. L’enquête a été menée. Le mari a été inculpé. Les deux enfants ont été placés. Les familles se sont disloquées. Trois procès ont été menés. Pour aboutir finalement à un non-lieu et la réouverture du dossier. Un invraisemblable gâchis. Plus qu’un polar sur fond d’erreur judiciaire – exercice par ailleurs difficile tant son écriture exige de rigueur et de précision –, la minisérie britannique pose la question des dommages collatéraux. En soulevant tant de questions autour de l’amour, la jalousie, la rivalité ou la vengeance. L’ensemble, créé par Chris Lang (Unforgotten) et annoncé en 2018 comme le premier volet d’une collection d’anthologie, est fort bien mené. La mise en scène est certes classique, mais se repose parfaitement sur la mélancolie du littoral anglais, idéal pour ce genre d’histoire.
J. MATHEW/2020 YELLOW BIRD FILM & TV PRODUCTIONS AB.
Les acteurs sont des êtres humains comme les autres. Pour eux aussi, le confinement est une source mortelle d’ennui. Amis à la ville et à l’écran (ils jouent dans la série Good Omens d’Amazon Prime Video), Michael Sheen et David Tennant ont pris le pari de se moquer de leurs névroses d’artistes et de leurs questionnements existentiels dans cette joyeuse autofiction où ils jouent des versions égocentriques d’eux-mêmes en train de répéter par Zoom le texte de leur future pièce de théâtre. Avec un metteur en scène (en réalité, le créateur de la série), Simon Evans, passablement dépassé. Les compagnes de la star de Broadchurch et de The Queen sont également de l’aventure. École à domicile, partage des tâches domestiques, consommation d’alcool… Michael Sheen et David Tennant, qui jouent de leurs racines galloises et écossaises, abordent leur intimité avec beaucoup de facétie dans un second degré qui rappelle par moments celui de Dix pour cent. En bonus, même si la série repose sur la visioconférence, beaucoup de scènes sont quand même tournées caméra à la main dans le jardin, la cuisine ou le bureau des héros qui ont réussi à convaincre Samuel L. Jackson et Judi Dench de passer leur dire bonjour. De quoi retrouver le moral.
PHILIPPE TORRETON DANS LA PEAU DE FOURNIRET, UN COUPLE DE COMÉDIENS ANGLAIS EN RÉPÉTITION VIA ZOOM OU LES ENQUÊTES D’UN COMMANDANT DE POLICE SUÉDOIS ARROGANT… QUELLE FICTION REGARDER CETTE SEMAINE, OU PAS, SUR VOS ÉCRANS ?
SOLUTION DU N°3572
« STAGED », SAISONS 1 ET 2, QUATORZE ÉPISODES DE 22 MINUTES, MY CANAL ET CANAL+, LUNDI 15 MARS, À 23 H 10
FIGARO TOP FIGARO FLOP
SOLUTION DU N°3571
15/20
PHILIPPE WARRIN/MMXX UGC FICTION/LES FILMS DU 24/TF1/BE-FILMS/RTBF
« LA TRAQUE », LUNDI 15 MARS, SUR TF1, TÉLÉFILM EN DEUX PARTIES, À 21 H 10 ET 22 H 25
S’attaquer à l’affaire Michel Fourniret, c’est vouloir gravir l’Everest. Il faut être préparé à affronter le sommet de l’horreur. En tout cas, avoir suffisamment réfléchi à la meilleure manière de la suggérer, sans pour autant la montrer en prime time sur TF1. Yves Rénier a trouvé la voie idéale. Celle qu’il fait emprunter à deux enquêteurs obstinés (incarnés à l’écran par Mélanie Bernier et François-Xavier Demaison) confrontés à ce petit homme, bouffi de suffisance et de malignité, arrêté le 26 juin 2003 près de Namur, en Belgique, pour tentative d’enlèvement sur mineure. Que risque alors Fourniret ? Quelques mois de prison tout au plus. Les policiers ont pourtant l’intime conviction d’avoir en face d’eux un tueur en série. Il ne craquera pas. Quant à Monique Olivier, sa compagne, c’est moins sûr. Elle est le maillon faible. C’était tout le propos de l’enquête romanesque d’Harold Cobert (La Mésange et l’Ogresse, Éditions Plon) que l’ex-commissaire Moulin a décidé d’adapter. Il offre à Philippe Torreton la lourde tâche d’incarner l’ogre des Ardennes. L’acteur est parfait. Jamais caricatural. Et diabolique à souhait. Isabelle Gélinas, excelle dans la peau de sa complice machiavélique, obsédée par le pacte signé avec son époux sadique. Un contrat de carnage qu’elle finit par déchirer.
lundi 15 mars 2021
lundi 15 mars 2021 LE FIGARO
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MÉTÉO
Tous les programmes dans TV Magazine et sur l’appli TV Mag
ÉPHÉMÉRIDE Ste-Louise Soleil : Lever 07h02 - Coucher 18h56 - Premier croissant de Lune
À LA DEMANDE 21.05
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La traque
Téléfilm. Policier
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Les rivières pourpres
Secrets d’histoire
Série. Policière
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Le tournoi
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Fra. 2020. Réal. : Yves Rénier. 1h. Avec Philippe Torreton. Inédit. Le 26 juin 2003, Michel Fourniret est arrêté pour tentative d’enlèvement sur mineure. Il ne risque, au mieux, que quelques mois de prison. Pourtant les policiers sont convaincus d’avoir affaire à un tueur en série. 23.00 New York Unité Spéciale. Série.
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Téléfilm. Dramatique
Fra. 2021. Réal. : Saïd Belktibia, Antoine de Bary, Pierre Maillard, So-Me, Alice Moitié, Marina Rollman. 2h05. Avec Vincent Cassel. Six histoires du confinement, parcours personnels d’individus contraints de rester chez eux pendant de longues semaines. 23.10 Staged. Série. Humoristique.
Fra/Blg/All. 2021. Saison 3. Avec Olivier Marchal. 4 épisodes. Camille et Niémans partent à la rencontre d’Arnaud Morillon, un ancien collègue de la BRI et ami de Niémans. Ils ne trouvent que son cadavre, infecté de bubons, témoins de la peste noire.
Prés. : Stéphane Bern. 1h45. VictorEmmanuel II, le premier roi d’Italie. Retour sur l’épopée de VictorEmmanuel II, premier roi d’Italie et unificateur du pays, en explorant les résidences de la Maison de Savoie ou les paysages du Sud.
00.40 Intraitable. Téléfilm. Dramatique.Avec Fred Testot.
23.00 L’odyssée de la sandale en plastique. Documentaire.
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Du rififi chez les hommes
Mariés au premier regard
Film. Policier
Téléréalité
Fra. 1955. Réal. : Jules Dassin. 1h53. Avec Jean Servais. A peine sorti de prison, un cambrioleur génial, mais vieillissant et malade, prépare avec une poignée de complices le casse d’une bijouterie parisienne.
Fra. 2021. 1h55. Estelle Dossin et Pascal De Sutter, les deux experts, ont longuement analysé les profils des quatorze candidats, sept hommes et sept femmes, qui cherchent l’âme soeur.
22.50 De bruit et de fureur. Film. Drame. Avec Vincent Gasperitsch.
23.00 Mon admirateur secret. Divertissement. Prés. : Julia Vignali.
20.40 Touche pas à mon poste !
19.50 Les Marseillais à Dubaï
20.10 Quotidien. Divertissement.
21.19 Wolverine : le combat de l’immortel
21.05 Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal
21.15 L’arme fatale 2
Film. Action. EU/GB. 2013. Réal. : James Mangold. 2h06. Avec Hugh Jackman. Affaibli après avoir été piégé par un homme surgi de son passé, Wolverine affronte des samouraïs ultra-entraînés. 23.33 Logan. Film. Action.
Film. Aventures. EU. 2008. Réal. : Steven Spielberg. 2h02. En 1957, Indiana Jones est exclu de l’université. Un jeune homme lui propose de retrouver un crâne de cristal, au Pérou. 23.15 Indiana Jones et la dernière croisade. Film. Aventures.
20.20 Passage des arts. Magazine.
19.55 Wheeler Dealers France.
20.50 Network
21.05 Les routes de l’enfer : Australie
Film. Comédie dramatique. EU. 1976. Réal. : Sidney Lumet. 1h50. Avec Faye Dunaway. Jugé hors du coup par les responsables de sa chaîne, un présentateur menace de se suicider devant les caméras, ce qui lui vaut une immense célébrité. 22.55 C ce soir. Talk-show.
Film. Policier. EU. 1989. Réal. : Richard Donner. 1h54. Avec Mel Gibson. Deux flics, l’un casse-cou, l’autre plus calme, affrontent des trafiquants de drogue : leur chef profite de son immunité diplomatique pour son commerce illégal. 23.25 L’arme fatale. Série. Action.
19.35 Enquêtes au Moyen Age. Documentaire.
Documentaire. Aus. 2018. 0h55. 2 épisodes. Le vieux camion de Russell met sa patience et ses compétences en mécanique à l’épreuve lors de son trajet entre Alice Springs et le centre du Queensland. 23.00 Les routes de l’enfer : Australie
20.50 La guerre de 1870 – Les dernières cartouches Documentaire. Fra. 2020. Réal. : Eric Deroo. 1h20. Il y a 150 ans, le 2 septembre 1870, Napoléon III capitulait dans la honte à Sedan. 22.10 Le Brasier : 1871. Le Louvre sous le feu de la Commune. Doc.
Jeu. 1h55. Inédit. Cinq ans avant « Le Jeu de la dame », Elodie Namer choisissait pour son premier film de raconter les tourments d’un prodige des échecs. D’abord scénariste, passée par les équipes éditoriales de « Loft Story » et l’écriture de téléfilms, elle a su adopter un ton percutant pour mettre en scène les victoires et déboires de Cal, 22 ans, lors d’un tournoi organisé sur sept jours en Hongrie. Ce champion de France immature s’abandonne à son obsession pour les paris et les jeux avec sa petite amie Lou et ses trois amis, au point de ne pas tout de suite voir venir le petit génie, encore enfant, qui pourrait bien le surclasser. Sans éviter quelques clichés attendus, le film réussit parfois à surprendre malgré tout.
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➜10 h : « Le Buzz » (avec TV Magazine) – Invitées : Estelle Dossin et Mélina, psychologue et candidate dans « Mariés au premier regard » sur M6. Interviewées par Nicolas Vollaire et Sarah Lecoeuvre
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➜ 17 h : « Points de vue » – L’émission de débat du Figaro, animée par Vincent Roux. Avec Alexandre Devecchio, responsable du FigaroVox, et Nicolas Baverez, avocat et essayiste.
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Aujourd’hui lundi 15 mars sur lefigaro.fr
➜ 12 h : « Le Talk » – Invité : Pieyre-Alexandre Anglade, député (LREM) des Français établis hors de France. Interviewé par Yves Thréard
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MOTS FLÉCHÉS DU FIGARO N°2848 COUSSINETS DE VESTE EFFRAYÉ
MORCEAU DE BŒUF EXTÉNUANT
CRÊPE FOURRÉE PEU DOCILE
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CITÉ PROCHE DE LAVAL
ABÎMÉE BOISSON PÉTILLANTE
IL VA À CONFESSE
AINSI DE SUITE
INSECTE SAUTEUR ANIMAL LENT
PERSONNEL RÉFLÉCHI ÉPAIS
PRUNE ROYALE INFOS MISES EN ŒUVRE RANGER
HABITUELLE LIQUEUR D’ORIENT ATTACHE AU HARNAIS RUDESSE
PROTECTION DE VEUVE COUCHE CE N’EST QUE DU PROFIT
AJOURNEMENT PRIVÉ DE TÉTÉES ÇA Y EST, J’AI TROUVÉ ! BAC À EAU
DISTANCÉ BATELIER BIBLIQUE
CINOCHE
ENCARTA
NŒUD PEU COULANT
COURS AU TYROL
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ÉTUDIANT SOUVENT DE GARDE
D A B F L E S T T C E
BARRE DE FERMETURE ANCIENNE COLÈRE INDICE DE PELLICULE
ON NOUS Y MÈNE EN BATEAU FAÇON DE SE GARER (EN) MILLÉSIME
NON MANUFACTURÉ PRISE À LA GORGE
D R E C N O C T H E P R
DÉTRUIRE À LA BASE ÉPOUSE EN INDE
ÉCOLE D’ADMINISTRATION EN PORTÉE À L’INTÉRIEUR FICELLES DU MÉTIER
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FORCES DE DÉFENSE COIN DES BRETONS
AVEC LA TVA IL BOSSE DUR
POISSON DORÉ ARTICLE D’ARAGON
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FEMELLE DU COLVERT
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TYPE D’ÉTOILE, TOUTE PETITE
UN LIEU À NE PAS FRÉQUENTER
E A M T O R M O S D O E C H V O P C E R E O I N M A M R I
C U L D E S A O C S T E I L E U C O I D R E A R U A U R S D E E N I S C H A E L T E L A N N I D R V C A E N I A N T E
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V N E R I N E T S A I T L E C E R E E I N A D A T E R E T E L T C I E E B R A I S T E T N C R N O I A M B L E U E A A B U L L P P E E E R A I M M S E E T E S S U R N E H A R M A D I T S O
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LE FIGARO
lundi 15 mars 2021
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DELPHINE D’AMARZIT, DISCRÈTE PIONNIÈRE £@MarieVisot
I
l y a quelques semaines, voir toutes ces réactions à l’annonce de sa nomination à la tête de la Bourse de Paris l’a fait sourire. Delphine d’Amarzit n’est de pas de nature à se mettre sous les feux des projecteurs. Elle a même pensé un temps qu’être présentée comme « la première femme qui… » l’agacerait. Et puis finalement, non. « Parce que j’ai vu que les gens retenaient le parcours et les compétences avant le reste », confie aujourd’hui la quadra déterminée, qui prend donc ce lundi la direction du marché des actions en France, intégrée dans la société Euronext. Delphine d’Amarzit a 47 ans et un CV long comme le bras. « Elle pourrait vous sembler être la parfaite technocrate française ; mais ne vous y trompez pas, elle ne l’est pas du tout… », dit d’emblée son ami Bertrand Dumont, actuellement directeur de cabinet de Bruno Le Maire. Sur le papier, il est vrai que tout y est. Cela commence dans une famille traditionnelle, d’origine de Bourgogne et de l’Ain, entre militaires et industriels. Une famille pleine de légendes et d’héritages, où l’on navigue entre un ancêtre aux multiples talents, Nicolas-Jacques Conté, qui après avoir accompagné Napoléon dans sa campagne d’Égypte, inventa la mine du crayon à papier, deux grands-pères cavaliers - l’un, résistant mort en déportation après avoir été dénoncé, l’autre, féru de poésie latine, ayant réussi à s’évader -, ou encore des grands-mères avec un caractère à tenir la culotte. Cela continue à Paris - père cadre en entreprise, mère orthophoniste - où la jeune Delphine suit sa scolarité dans le très classique et catholique établissement pour filles Daniélou, avec d’intégrer Sciences Po et « sans se mettre de pression », l’ENA. Sortie dans la tête du classement, elle intègre la prestigieuse Inspection des finances. Une de ses toutes premières missions consiste à aller voir ce
UN DERNIER MOT [email protected]
REBOND ELLE DEVIENT, À 47 ANS, LA PREMIÈRE FEMME À PRENDRE LA TÊTE D’EURONEXT FRANCE, LA BOURSE DE PARIS. qui se passe du côté du Port de Marseille. Ayant fait remarquer aux douaniers qu’ils n’indiquaient pas l’heure d’ouverture des colis, comme ils le devaient, elle s’était alors entendu répondre, un grand sourire figé sur les lèvres de son interlocuteur : « L’administration ne nous a pas fournis de montres, madame… » Le ton était donné et sa carrière lancée.
Ses week-ends en camion XAVIER LAHACHE/CANAL+
Marie Visot
méro deux d’Orange, qui fut aussi son directeur au Trésor. Ses proches louent son humour, sa manière de ne pas se prendre au sérieux. Insistent sur sa liberté de parole et son caractère entier qui a parfois détonné dans le milieu dans lequel elle évoluait - « jeune, on disait que j’étais insolente, aujourd’hui on dit que je suis franche », dit-elle. C’est là que la « parfaite technocrate » du papier s’éloigne un peu… Elle-même reconnaît s’être détachée des conventions familiales et n’avoir, dans sa carrière, pas toujours fait ce qu’on attendait d’elle. « Il n’y a pas grand-chose qui l’impressionne », sourit Bertrand Dumont. Une facette de sa personnalité qui a certainement plu, à l’époque où elle était ministre à Bercy, à Christine Lagarde. Aujourd’hui, la nouvelle patronne d’Euronext Paris et la présidente de la BCE entretiennent encore une relation « presque filiale », ditelle pudiquement.
« Mettre en mots les chiffres »
Nous sommes en 2000 et elle rejoint le Trésor, comme secrétaire générale du Club de Paris, cette instance qui s’occupe de la dette des pays pauvres. Plutôt littéraire à l’origine, elle prend goût à « mettre en mots les chiffres ». C’est parti pour quinze années à Bercy - « j’ai commencé sous Jean Arthuis et j’ai fini sous Michel Sapin », s’amuse-t-elle. Durant cette période « passionnante », elle navigue entre les différents services de la puissante administration - où elle se spécialise en finances et dans les questions internationales - et les passages en cabinets ministériels (ceux de Francis Mer, Nicolas Sarkozy, brièvement Hervé Gaymard et Thierry Breton). En 2007, elle fait une incursion auprès du premier ministre François Fillon, pour le conseiller sur les questions financières. Si la crise la happera pendant cette période, c’est un autre épisode qui lui revient spontanément à l’esprit. Alors qu’elle est sur le point de partir à Davos, où le premier ministre doit intervenir au célèbre Forum, l’État est prévenu de l’« affaire Kerviel » et de ce que tout ce que cela implique pour la Société générale, les autres banques françaises et les marchés boursiers. « Elle a géré tout ça avec sang-froid, en direct sur place avec François Fillon, dans des conditions qui ressemblent à l’enfer !, la félicite encore aujourd’hui son ami l’avocat Antoine Gosset-Grainville, à
l’époque son directeur adjoint de cabinet. Dans cette situation, et dans bien d’autres, j’ai vu de vraies qualités d’adaptation ». Elle en sourit aujourd’hui « parce que ça c’est plutôt bien terminé ». Mais se souvient avoir plus d’une fois tremblé ce jour-là ! En 2015, après plus de quinze années passées au service de l’État, elle prend un tournant. « J’étais arrivée à un moment où j’ai moins eu le sentiment d’être utile », dit-elle. Ça a été « un triple choc », résume un ami : elle passe dans le privé, dans
une fonction et un secteur qu’elle ne connaît pas. D’abord chez Canal+ comme secrétaire générale, puis comme directrice générale déléguée chez Orange Bank. « C’était un vrai pari de miser sur moi, je ne sais pas si je l’aurais fait à leur place ! », confie-t-elle, assumant un léger syndrome de l’imposteur. « Il fallait tout monter, elle a fait un super-boulot en gagnant le respect et la confiance de tout le monde. C’est quelqu’un qui sait fédérer autour d’elle, avec une vraie honnêteté intellectuelle », répond Ramon Fernandez, nu-
Et puis, qui imaginerait que cette femme des temps modernes passe ses weekends… « en camion »? Ou, plus exactement, dans la cabine avant d’un camion de chevaux. C’est son moyen de s’évader. En couple « avec quelqu’un de formidable », elle sillonne la France pour s’adonner à sa passion de l’équitation. Ça, c’est quand elle n’est pas chez elle en pleine lecture ou à préparer un bœuf bourguignon - « tiens, ça fait longtemps que je n’en ai pas fait »…- et une tarte fine aux pommes à savourer avec un bon verre de chablis. On les imagine presque autour d’une table, avec « la bande du Club de Paris », Emmanuel Moulin, devenu directeur du Trésor, Bertrand Dumont et Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Élysée. Certes, le contexte et leurs fonctions respectives les privent pour l’instant de ces moments. Mais, « ce n’est que partie remise… » ■
Par Étienne de Montety
Nu [nu] adj.
À poil, mais pas au poil.
P
our dénoncer la situation de la culture, une actrice s’est mise à nu sur la scène de la cérémonie des César. Le mot vient du latin nudus, qui signifie dépouillé de ses vêtements. Ce fut exactement l’état de cette comédienne, qui s’était habillée en Peau d’Âne avant de retirer celle-ci. Bras, torse, tête, ne tergiversons pas, elle se retrouva entièrement nue. Comme le verre, elle voulait, semble-t-il approcher la transparence, par une attitude sans fard. Des nues, le cinéma en a vu d’autres, et des belles, mais vendredi soir, tout le monde est tombé de celles-ci : l’événement était consacré au septième art, pas à la politique du gouvernement. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas d’accord avec un système complexe qu’il faut aller jusqu’au simple appareil. Le sujet appelle peut-être la nuance. La comédienne attendait sûrement que sa nudité ait un effet radical, mais on lui doit la vérité, aussi nue qu’elle. Son geste est jugé pour ce qu’il est : une provocation nunuche. ■
FIGARO-CI ... FIGARO-LÀ Après le recrutement de Vincent Chriqui pour coordonner les groupes de travail de sa campagne présidentielle, Xavier Bertrand vient de nommer l’un de ses proches, Jean-Paul Mulot, porte-parole de son think-tank La Manufacture. C’est la première fois depuis la création de ce mouvement qu’un tel poste voit le jour. Ex-représentant permanent des Hautsde-France au Royaume-Uni, Jean-Paul Mulot débuta comme journaliste au Quotidien de Paris avant de rejoindre Le Figaro, dont il fut l’un des directeurs adjoints de la rédaction. Cette nomination préfigure un rôle futur dans la campagne présidentielle du candidat.
FRANÇOIS BOUCHON/LE FOGARO
Xavier Bertrand prépare ses équipes pour la présidentielle
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Le tabloïd danois Ekstra Bladet, le seul en Europe du Nord à publier des petites annonces pour les prostituées, a décidé de mettre un terme à la publication de ces offres sexuelles tarifées très populaires pour ses lecteurs. « Le temps est venu d’abandonner cette pratique », a indiqué le conseil d’administration du quotidien, en butte aux critiques de plus en plus virulentes des associations de femmes dénonçant des réseaux de prostitution. L’Organisation des travailleuses du sexe a regretté cette décision « malheureuse et injustifiée ».
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Les travailleuses du sexe privées de publicité
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